Alors que la France se prépare à entamer le déconfinement le 11 mai, les résidents des Ehpad n'auront peut-être pas à attendre jusque-là pour revoir leurs proches. En effet, le 19 avril, le ministre de la Santé a annoncé un “droit de visite pour les familles” dès le lendemain. “Ce sera à la demande du résident, dans des conditions extrêmement limitées (…) et sous la responsabilité des directions d’établissements, qui devront dire à la famille lorsque ce sera possible et dans quelles conditions", a précisé Olivier Véran.
Une reprise des visites avec des mesures très strictes
Une mesure que salue Bernard, expert-comptable confiné à Mandelieu-la-Napoule (Alpes-Maritimes), du moment que les gestes barrières sont bien respectés. L'Ehpad dans lequel se trouve sa mère, âgée de 88 ans, commence à reprendre doucement les visites, régies par des mesures très strictes. D'abord, le créneau par résident ne doit pas dépasser une heure toutes les deux semaines, et seules deux personnes au maximum peuvent venir. Ensuite, chaque visite “devra faire l’objet d’une ordonnance médicale" établie par un docteur de l'Ehpad.
De leur côté, les proches devront accepter de se faire prendre la température, désinfecter les mains, et de se voir remettre un masque. Autres obligations : respecter les règles de distanciation sociale et signer “deux attestations indiquant, pour la première, qu’ils ont bien connaissance qu’il y a au moins un cas Covid-19 sur l’établissement, et, pour la deuxième, qu’ils ne sont pas porteurs ou contact depuis moins de 14 jours de symptômes du Covid-19.” Enfin, l'établissement s'engage à désinfecter tout le mobilier après chaque visite.
“Je sais qu'elle n'est pas contaminable par nous”
“Pour moi, cette forme de déconfinement dans les Ehpad n'est pas forcément fondamentale, mais je comprends que certains en aient besoin. Je pense notamment au cas où un couple est séparé, le mari à l'extérieur, et la femme à l'intérieur, illustre Bernard. C'est important aussi pour toutes les personnes qui ne sont pas très habituées à l'informatique, comme mon frère, par exemple.”
Si le fils de 59 ans évoque ce sujet, c'est parce que l'Ehpad dans lequel se trouve sa mère a instauré un système basé sur la technologie pour maintenir le contact entre les résidents et leurs proches pendant le confinement. “Cela me suffit parce que, comme ça, je sais qu'elle n'est pas contaminable par nous, ses enfants, ni par ses petits-enfants”, estime l'expert-comptable.
“Ça fait du bien à ma mère”
En effet, dès la semaine du 16 mars, la direction a mis en place un document Doodle, dans lequel chaque proche peut s'inscrire. Il est ensuite appelé par un membre du personnel soignant sur la tranche horaire indiquée et est ainsi mis en contact avec le résident par le biais d'un appel vidéo.
“Cela me permet de voir ma mère directement, comme si j'étais en face d'elle, raconte Bernard. C'est déjà une très grande satisfaction de savoir qu'il y a une information disponible visuellement. Cela me permet de m'assurer de son état physique. Je sais qu'elle bouge, qu'elle va bien. Puis, ça fait du bien à ma mère ; elle était très heureuse de voir ma fille aînée avec son ventre de femme enceinte.”
L'indispensable communication entre les Ehpad et les proches
En parallèle, la direction envoie à chaque famille un mail au moins une fois par semaine qui récapitule les éléments essentiels des derniers jours : si le médecin est passé, si un membre du personnel est malade… “C'est bien détaillé, estime l'expert-comptable. En plus, l'infirmière de ma mère me tient bien informé car elle avait eu de la fièvre et ne mangeait plus, comme si elle avait eu un petit coup de virus. Quand c'est passé, elle m'a rappelé pour me dire que tout allait bien.”
Une communication indispensable dans le contexte actuel : sur les 21 856 personnes décédées des suites du Covid-19 en France depuis le début de la crise sanitaire, 8 309 sont mortes dans des établissements sociaux et médico-sociaux. “Il y a un risque plus important de transmission et de décès dans les Ehpad, comme on l'a vu jusqu'ici, malheureusement. Forcément, je crains une contamination. J'ai peur à l'idée que ma mère puisse attraper le virus, confie Bernard. D'autant que le personnel soignant m'a expliqué que certains résidents ne comprennent pas le principe de la distanciation sociale ou l'oublient, simplement. Tout ça, c'est difficile à supporter.”