Le terme de lésion cérébrale désigne une atteinte au cerveau, provoquée par une maladie ou une atteinte au cerveau. Quand un patient subit lésion cérébrale grave, il est très difficile pour son médecin de déterminer l’ampleur des dégâts et de prendre des décisions thérapeutiques adaptées. Un patient à peine conscient diffère d’un patient dans un état végétatif, comme l’était notamment Vincent Lambert. Ainsi, si une personne dans un état végétatif peut ouvrir les yeux, se réveiller et s’endormir régulièrement et conserver certains réflexes basiques, elle ne montrera aucun signe de conscience. En revanche, un malade dans un état de conscience minimale pourra parfois montrer des signes de conscience. D’après une nouvelle étude parue dans la revue Nature, un simple test de reniflement, très facile à réaliser, pourrait aider les médecins à prédire le taux de rétablissement et de survie à long terme d’un patient ayant subi de graves lésions cérébrales. A terme, cela permettrait de mettre en place des stratégies de gestion de la douleur plus adéquates et de mieux anticiper des décisions concernant une éventuelle fin de vie.
Notre odorat repose sur des structures situées au plus profond de notre cerveau. Chez une personne en bonne santé, le cerveau modifie automatiquement la façon elle renifle en réponse à différentes odeurs. Quand une odeur nous est désagréable, nous respirons automatiquement plus vite et moins profondément, que nous soyons éveillés ou endormis. Ici, les chercheurs ont présenté des bocaux contenant différentes odeurs à 43 patients gravement atteints de lésions cérébrales.
Après leur avoir expliqué le test, l’expérimentateur leur a présenté un bocal contenant soit une odeur agréable de shampoing soit une odeur nauséabonde de poisson pourri, soit aucune odeur. Chaque bocal a été présenté dix fois pendant cinq secondes, de façon aléatoire, au patient. Dans le même temps, le volume d’air reniflé était mesuré par le biais d’un petit tube appelé canule nasale.
“La précision du test de reniflement est remarquable”
Les chercheurs ont alors constaté que les patients peu conscients inhalaient beaucoup moins en réaction aux odeurs mais ne faisaient pas la différence entre les senteurs agréables et désagréables. Ils ont également modifié leur débit d’air nasal en réponse au bocal sans odeur. Cela implique donc une prise de conscience du bocal ou une anticipation apprise d'une odeur. En revanche, les patients en état végétatif présentaient des résultats plus variés : certains n’ont pas modifié leur respiration du tout, d’autres si.
Il s’est ensuite avéré que 100% des participants qui ont réagi au test de reniflement ont repris conscience. Trois ans et demi plus tard, 91% d’entre eux étaient toujours en vie. En revanche, 63% de ceux qui n’avaient présenté aucune réponse étaient décédés. “Nous avons découvert que si les patients dans un état végétatif avaient une réaction de reniflement, ils passaient ensuite à un état de conscience minimale. Dans certains cas, c'était le seul signe que leur cerveau allait se rétablir — et nous l'avons vu des jours, des semaines et même des mois avant tout autre signe”, a déclaré le Professeur Anat Arzi, du département de psychologie de l'université de Cambridge (Grande-Bretagne) et de l'Institut Weizmann des sciences d'Israël, l’un des chercheurs ayant dirigé l’étude. “La précision du test de reniflement est remarquable - j'espère qu'il aidera à traiter les patients gravement atteints de lésions cérébrales dans le monde entier”, se félicite-t-il.
Incorporer cette méthode dans les outils de diagnostic
“Lorsque la réponse du renifleur fonctionne normalement, cela montre que le patient peut encore avoir un certain niveau de conscience même si tous les autres signes sont absents”, commente quant à lui le docteur Tristan Bekinschtein, du département de psychologie de l'université de Cambridge, qui a participé à l'étude. “Cette nouvelle méthode simple pour évaluer la probabilité de guérison devrait être immédiatement incorporée dans les outils de diagnostic pour les patients souffrant de troubles de la conscience.”
Il est cependant important de rappeler que même si l’on peut se rétablir d’une lésion cérébrale grave, la blessure laisse généralement une trace à vie. Certains patients ne peuvent plus marcher, ni parler correctement. Toutefois, les cicatrices peuvent aussi être mentales. En effet, le cerveau d’un patient ayant subi une lésion cérébrale ne fonctionne plus comme avant. Ainsi, après leur sortie de l’hôpital, certains ne perçoivent plus qu’une moitié de leurs corps tandis que d’autres ne comprennent plus ce qu’on leur dit, se retrouvent dans l’incapacité de reprendre leur profession ou de planifier de simples tâches quotidiennes.