Alors que la pandémie de Covid-19 s'est emparée de la plupart des pays du monde, la communauté scientifique internationale se mobilise afin de trouver des moyens de l'endiguer. Fin avril, en France, des chercheurs majoritairement issus du CNRS, de l'Inserm, de l'APHP et de l'Institut Pasteur ont commencé à s'intéresser aux conséquences thérapeutiques des agents modulateurs du récepteur nicotinique. En d'autres termes, ils suggèrent que la nicotine pourrait protéger du nouveau coronavirus.
Si elle venait à se vérifier, cette hypothèse — qui fait l'objet de plusieurs études — ne devrait encourager personne à commencer à fumer, ni à augmenter sa consommation de cigarettes. En effet, une étude publiée dans le numéro du mois de mai 2020 de la revue Hypertension révèle les implications de l’exposition chronique à la nicotine dans le développement de maladies cardiovasculaires et pulmonaires. Selon les scientifiques, elle pourrait entraîner une hypertension pulmonaire.
Des effets néfastes dès la première semaine d'exposition
Pour mener à bien leurs travaux, les chercheurs, issus du Louisiana State University Health Sciences Center New Orleans, ont utilisé un nouveau modèle d’inhalation de nicotine chez la souris, qui imite fidèlement les fumeurs humains, ainsi que les utilisateurs de cigarette électronique.
Pendant huit semaines, ils ont examiné les effets de l’inhalation chronique de nicotine sur le développement de maladies cardiovasculaires et pulmonaires. Ils se sont particulièrement intéressés à la tension artérielle et au remodelage cardiaque — la cause la plus fréquente d'insuffisance cardiaque après un infarctus. Résultat : dès la première semaine d'exposition, l’inhalation de nicotine a augmenté la pression artérielle systolique — mesurée lors de la phase de relâchement du cœur — et diastolique — correspondant à la contraction du cœur — des souris.
Hausse de la pression systolique du ventricule droit
“L’augmentation était temporaire, mais était suffisamment longue pour présenter des risques potentiels pour la santé des personnes atteintes de maladies cardio-pulmonaires préexistantes", indique Eric Lazartigues, professeur de pharmacologie au Louisiana State University Health Sciences Center New Orleans, dans un communiqué publié sur le site de l'établissement.
En plus de l’hypertension pulmonaire induite par l'inhalation chronique de nicotine, les chercheurs ont découvert que cette dernière conduisait à la “muscularisation” des artérioles pulmonaires — des petites branches des artères menant aux capillaires — auparavant non musculaires. Ce phénomène est conforme à une hausse de la pression systolique du ventricule droit et de la résistance vasculaire pulmonaire.
L’insuffisance ventriculaire droite, l'une des principales causes de décès dans l’hypertension pulmonaire
Pour rappel, l’insuffisance ventriculaire droite est l'une des principales causes de décès dans l’hypertension pulmonaire. Or, les chercheurs ont découvert qu’une exposition de huit semaines à la nicotine avait entraîné une pression systolique du ventricule droit considérablement plus élevée, ainsi qu’un épaississement des parois et une hypertrophie ventriculaire droite. De quoi décourager celles et ceux qui comptaient sur la nicotine pour se protéger contre le Covid-19.