- Pendant la grossesse, le fœtus n'est pas protégé contre les métabolites microbiens qui proviennent de la flore intestinale maternelle.
- Les effets des substances d’origine végétale ingérés par une femme enceinte pourraient représenter un risque pour le foetus.
- Les substances étrangères au corps doivent être manipulées avec beaucoup de précautions.
La flore intestinale, ou microbiote intestinal, représente l'ensemble des micro-organismes qui se trouvent dans le tractus digestif humain. Ces micro-organismes sont dits commensaux : ils vivent en symbiose avec le corps humain. Ils sont non pathogènes et contribuent au bon fonctionnement de l’organisme. L’importance du microbiote intestinal est tel que les scientifiques se référent souvent à lui comme à un “deuxième cerveau”. Aussi, une flore intestinale saine est indispensable pour être en bonne santé. Il a notamment été montré qu’elle pouvait avoir des incidences sur l’efficacité des antidépresseurs, le diabète de type 2 ou encore la croissance de certaines tumeurs. Par conséquent, il n’est pas surprenant que celle d’une femme enceinte ait une influence sur le développement de son futur bébé.
Dans un papier paru ce mois-ci dans la revue Science, des chercheurs ont compilé les dernières connaissances sur l’importance de la flore intestinale maternelle dans le développement du système immunitaire de l’enfant. D’après eux, les effets des substances d’origine végétale (baies de goji, graines de chia...) que les femmes enceintes ingèrent ont été sous-estimés dans la recherche. Or, ces derniers pourraient représenter un risque pour le fœtus.
Les scientifiques ont toujours supposé que l’embryon et le fœtus se développaient dans un environnement totalement stérile dans l’utérus et que la colonisation par des microbes n’intervient qu’à partir de la naissance. “Cependant, le fœtus n'est pas protégé contre les métabolites microbiens qui proviennent de la flore intestinale maternelle”, note Stéphanie Ganal-Vonarburg, l’une des autrices de l'étude. D’après elle, le placenta ne protège que partiellement l’enfant et le transfert de substances microbiennes entraîne la maturation du système immunitaire inné de la progéniture dès la grossesse.
Le doute des substances naturelles
“Il est courant que les femmes enceintes prennent des médicaments avec une grande prudence et seulement après avoir consulté leur médecin, car de nombreux médicaments peuvent traverser le placenta et interférer avec le développement de l'enfant. Cependant, on en sait beaucoup moins sur les substances naturelles présentes dans l'alimentation qui peuvent être transmises à l'enfant à naître et sur la mesure dans laquelle cela peut être bénéfique ou néfaste pour le développement du système immunitaire de l'enfant”, poursuit Stéphanie Ganal-Vonarburg.
Cette dernière et son collègue Andrew Macpherson, co-auteur de l’article, ont également trouvé des preuves que les produits métaboliques de l’alimentation ne peuvent pas atteindre directement l’organisme maternel et donc le fœtus en développement. Le plus souvent cela doit passer par la flore intestinale. D’après les chercheurs, ce phénomène s’applique également à la consommation de produits à base de plantes telles que les baies de goji ou les graines de chia, aliments considérés comme très sains.
“Bien que les produits végétaux soient des substances ‘naturelles’, il s'agit toujours de substances dites xénobiotiques qui sont étrangères au corps et doivent être manipulées avec beaucoup de précaution, avance Andrew Macpherson. Surtout lorsque les femmes enceintes prennent des produits à base de plantes en grande quantité.”
De plus amples études sont nécessaires sur le sujet
En conclusion, les chercheurs recommandent d’étudier quelles substances naturelles pourraient avoir un effet, positif ou non, sur le développement du fœtus et quelle influence les différences de la flore intestinale maternelle peuvent avoir sur ce processus.
En février, une étude parue dans le BMJ s’était également intéressée à la fleur intestinale des femmes enceintes. Elle démontrait que la consommation d’édulcorants hypocaloriques, telle que l’aspartame, réputé (à tort) comme plus sain pour la santé que le sucre, ou la stevia, une alternative naturelle, pendant la grossesse augmenterait l’amas de graisse corporelle du bébé et perturberait son microbiote intestinal à lui.
“Comprendre les conséquences des ingrédients alimentaires sur le métabolisme maternel et le microbiote intestinal peut aider à définir le régime maternel optimal, ce qui favorise un avenir plus sain pour la mère et l'enfant”, expliquaient donc les chercheurs.