Loïc, 26 ans, consultant en transformation digitale
"Je suis très attachée aux notions de responsabilité et de justice. Donc, pour moi, la chose la plus importante à la sortie de la crise serait que l'on juge les responsables des mauvaises décisions qui ont été prises. Elles nous ont amenés à près de 30 000 morts en France, à la pénurie de masques, de gants et à un système hospitalier complètement a genoux. Qu'il s'agisse de membres du gouvernement actuel ou des précédents, il faudrait qu'ils assument les conséquences de leurs actes.
Ensuite, le point qui m'importe beaucoup est la mise en place du télétravail un à deux jours par semaine dans les métiers où il peut être instauré. Ce serait bien que les salariés aient cette possibilité. De toute manière, je pense que cela va être une solution dans les mois à venir pour respecter la distanciation physique, notamment à Paris.
Enfin, j'aimerais que l'on se rende compte à quel point la mondialisation, avec le principe de chercher la réduction des coûts dans toutes les activités économiques, a pour but ultime de faire le plus de gains possibles. Il faut qu'un pays soit capable de se gérer tout seul, et qu'il y ait une sorte de virage à ce niveau. Car, dans des situations un peu compliquées, chaque État pense à soi : si on n'a pas de quoi se nourrir, se protéger et se soigner, on est en difficulté".
Béatrice, 53 ans, organisatrice d'évènements
"Pour moi, la priorité est de retrouver ma liberté de circuler et de revoir les gens que j'aime sans restrictions. Mais, de manière plus générale, j'aimerais que les pays tirent une leçon de la crise sanitaire pour laisser un monde meilleur à nos enfants. À titre personnel, j'ai envie que mes filles puissent évoluer dans un monde plus citoyen, plus fiable, plus épanouissant, et plus sûr. Cela passerait par la prise de conscience que certaines choses sont essentielles.
Au niveau de l'économie, cela se traduirait par une recentralisation, avec une production plus nationale. Tout n'est pas négatif dans la mondialisation, il y a des choses à conserver : c'est exceptionnel de pouvoir échanger du point de vue commercial, intellectuel, et culturel. Par contre, on a vu ses dégâts : on était presque revenu à un système colonialiste, avec des transferts à sens unique. Il faudrait en prendre conscience afin d'agir et devenir un petit peu auto-producteur. Dans une certaine mesure, je pense que l'indépendance des pays et des personnes permettrait d'harmoniser et équilibrer le monde".
Anna, 25 ans, auditeur financier
"Plusieurs points me tiennent à cœur concernant le 'monde d'après', mais, pour moi, le plus important est de réformer le milieu hospitalier. Ma mère travaille à l'hôpital et, avec la crise sanitaire, elle est en burn-out total. Elle m'a raconté des choses horribles, sur des membres du personnel soignant qui étaient à deux doigts du suicide, et qui disaient que si on ne les laissait pas poser une journée, ils rentreraient chez eux se pendre. Avoir un système hospitalier dans cet état est indigne de la France : c'est vraiment une honte.
De manière plus générale, j'aimerais que le pays soit un petit peu plus autonome et délocalise moins : on a eu une pénurie de masques car c'est la Chine qui les produit. Je comprends que ce soit plus cher de le faire en France, mais, au final, c'est un cercle vertueux du point de vue économique. Je ne pense vraiment pas que la politique des coûts plus bas soit profitable. À une plus petite échelle, je voudrais que le télétravail soit facilité en entreprise, puis retrouver ma vie sociale d'avant".
Valentin, 27 ans, consultant énergie
"L'environnement est ce qui compte le plus pour moi dans ce que l'on appelle le 'monde d'après'. C'est la première fois que nous sommes confrontés à une crise sanitaire de cette envergure et c'est ce qui se rapproche le plus d'une crise environnementale, que l'on va forcément connaître. Il faudrait que l'on fasse plus attention à notre consommation énergétique, et, surtout, à la manière dont on consomme. Avec la fermeture des frontières, il y a eu beaucoup moins d'importations, et de nombreux produits n'étaient pas disponibles sur le marché : je pense qu'il faut que chacun comprenne l'importance d'avoir une certaine indépendance.
Avec les masques, par exemple, on s'est rendu compte que la mondialisation n'était pas forcément la bonne option. En matière d'environnement, les impacts sont conséquents, entre le transport et les méthodes de production. Il faut que chacun relève sa consommation énergétique individuelle, qu'elle soit primaire ou finale. Par exemple, en achetant un jean, on devrait penser aux coûts en eau, en CO2 et au coût humain. S'il a été fabriqué dans une usine en France, ils ne sont pas trop élevés, alors que s'il a été produit en Chine, si; notamment avec l'assemblage et le transport".
Mathilde, 27 ans, dessinatrice
"Pour moi, le plus important dans le 'monde d'après' est que chacun profite des remises en question qui ont eu lieu pendant la crise sanitaire pour ne pas replonger dans le schéma 'métro, boulot dodo'. L'idée serait de lever le nez du guidon pour chercher quelque chose qui nous épanouisse, même si cela revient à sortir du moule. Dans mon cas, cela se traduit par le fait de retrouver ma liberté de circuler afin de pouvoir recommencer à voyager.
Dès ma sortie d'études, j'ai fait le choix d'exercer mon métier en indépendante afin de me rendre à l'étranger le plus possible, or j'ai l'impression que la crise sanitaire m'a coupé les ailes. Avant, je partais plusieurs semaines, voire mois, au moins trois fois par an. Néanmoins, en être privée m'a fait réaliser que j'aimerais partir plus longtemps que d'habitude la prochaine fois. L'idée serait peut-être de moins alterner les périodes où je suis en France et celles où je me rends à l'étranger pour les faire durer davantage. Échanger avec les autres, que ce soit au sein du même pays ou entre différentes cultures, me semble indispensable dans le 'monde d'après'".