Il y a quelques jours, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a décidé de suspendre toutes les études menées avec l'hydroxychloroquine et la chloroquine. Une décision intervenue juste après la publication dans la revue The Lancet d’une étude qui ne trouve aucun bénéfice à l’utilisation des traitements à base de chloroquine sur les patients atteints du Covid-19. Pire, ce traitement serait dangereux en raison de ses effets secondaires, notamment cardiovasculaires.
Un nouvel examen de l’étude réclamé
Ce vendredi 29 mai, 120 scientifiques provenant du monde entier ont apposé leur signataire à une lettre ouverte pour exprimer leurs inquiétudes sur les méthodes de la vaste étude parue dans The Lancet. Parmi les signataires de cette lettre ouverte se trouvent des cliniciens, des statisticiens et autres chercheurs du monde entier, de Harvard à l’Imperial College de Londres. Le porte-parole de Didier Raoult a lui aussi partagé ses interrogations quant à l'étude remettant en cause l'utilisation de la chloroquine sur Twitter
Face à la médiatisation importante de cette étude et de tout ce qui touche à la chloroquine provoquant “une inquiétude considérable chez les patients et les participants” aux essais clinique, les scientifiques appellent à la réalisation d’une analyse indépendante des conclusions de l’étude. “J’ai des doutes sérieux sur les bénéfices d’un traitement à la chloroquine/hydroxychloroquine contre le Covid-19 et j’ai hâte que cette histoire se termine, mais je crois que l’intégrité de la recherche ne peut pas être invoquée uniquement quand un article ne va pas dans le sens de nos préconceptions”, a résumé sur Twitter le Pr François Balloux, du University College de Londres.
L'origine des données, principal point de discorde
Pour les signataires de cette lettre, de nombreux points posent questions dans l’étude publiée par The Lancet. “Cet examen a soulevé à la fois des inquiétudes liées à la méthodologie et à l’intégrité des données”, avancent ainsi les scientifiques dans la lettre. L’étude publiée dans The Lancet se fonde sur les données de quelque 96.000 patients hospitalisés entre décembre et avril dans 671 hôpitaux, et compare l’état de ceux qui avaient reçu le traitement avec ceux qui ne l’avaient pas reçu. La comparaison de données de plusieurs hôpitaux aux protocoles différents ou encore l’origine des données font partie de la liste des interrogations soulevées par la centaine de scientifiques. Est-ce qu’ils “peuvent donner les noms des hôpitaux canadiens dont ils affirment qu’ils ont contribué aux données, pour qu’elles puissent être vérifiées de façon indépendante ?”, a par exemple demandé sur Twitter Todd Lee, expert en maladies infectieuses à l’Université canadienne McGill.
Dans un communiqué, Surgisphere, la société qui a récolté les données utilisées dans l’étude publiée dans The Lancet, a défendu l’intégrité de ses données. Elle ajoute que les hôpitaux qui les ont fourni sont des collaborateurs et que les accord dans l’utilisation des données qui les lient “ne nous permettent pas de les rendre publiques”. L’épidémiologiste Allen Cheng, un des signataires, a remis cette version en cause puisqu’il a pointé du doigt le fait que des données présentées comme provenant d’hôpitaux australiens seraient en réalité issues de pays asiatiques.