Il y a eu 521 arrêts cardiaques enregistrés en dehors de l’hôpital en région parisienne entre le 17 mars et le 26 avril, selon les chiffres du registre francilien (Paris et Hauts de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne) du Centre d’Expertise Mort Subite (Paris-CEMS). Ces six premières semaines du confinement ont été plus meurtrière que d’habitude, avec un taux de 26,6 arrêts cardiaques pour un million d’habitants. Entre 2012 et 2019, à la même période, il était de 13,4. C'est quasiment le double, comme l’a souligné une étude réalisée par Eloi Marijon et Nicole Karam, du Centre de Recherche Cardiovasculaire de Paris (Inserm/Université de Paris), en collaboration avec Daniel Jost (Brigade des sapeurs-pompiers de Paris) et parue récemment dans le journal The Lancet Public Health.
90% des arrêts cardiaques ont eu lieu à domicile
“Le profil des patients est le même que d’habitude [2/3 d’hommes, autour de 69 ans], indique à l’AFP Eloi Marijon. En revanche, plus de 90 % des arrêts ont eu lieu à domicile, avec des témoins, le plus souvent la famille, qui pratiquaient beaucoup moins de massage cardiaque et des secours plus longs à arriver malgré les routes vides.” Ce qui explique, selon les auteurs de l’étude, une réduction de près de 50% de la survie des patients car plus la réanimation cardio-respiratoire est opérée tôt plus les chances de survie sont élevées. Pourtant, selon les chercheurs, seuls 33 % environ de ces arrêts cardiaques “supplémentaires” seraient directement associés au Covid-19.
Les décès collatéraux du Covid-19
Comment expliquer une telle augmentation ? “Il y a eu rupture du suivi médical des patients parce qu’ils n’ont pas pu consulter, qu’ils ont craint de gêner (...), ou ont eu peur, pour certains, d’être contaminés à l’hôpital”, détaille le Pr Marijon. Le renoncement aux soins de certains patients, notamment atteints de pathologies cardiaques, peut expliquer cette augmentation. D’autres hypothèses sont possibles comme l’automédication des patients, la sédentarité, le stress mais aussi les possibles difficultés à joindre les secours avec des temps d’attentes plus importants. Selon les auteurs de l’étude, ces arrêts cardiaques hors secteur hospitalier sont des décès collatéraux du Covid-19, même s’ils ne sont pas pris en compte dans les statistiques officielles.