- Le médicament a réussi à prévenir les réactions allergiques, y compris les réactions anaphylactiques graves et potentiellement mortelles chez des souris.
- C’est la première fois qu'on découvre une méthode capable de prévenir l’anaphylaxie autre que l’évitement de l’allergène.
- En France, entre 1997 et 2004, 2 516 chocs anaphylactiques ont été recensés.
Quand un individu est allergique à un aliment ou à un médicament, il n’est pas à l’abri d’un choc anaphylactique, potentiellement mortel. En effet, le choc anaphylactique sérieux touche une à trois personnes sur 1 000. En Europe, le risque de mortalité est estimé à 1 à 5 par million d’habitants. L’anaphylaxie est une réaction allergique systémique grave qui peut survenir dans les secondes ou les minutes qui suivent l’exposition à un allergène. Dans la plupart des cas, des signes cutanés apparaissent (urticaire, démangeaisons, éruptions cutanées, gonflement des paupières et des lèvres, de la langue, de la gorge, des mains). Le patient peut également souffrir de diarrhée et d’asthme. Les symptômes nécessitant une prise en charge immédiate sont la chute de la pression artérielle en-dessous de 6, qui peut entraîner une perte de connaissance, et l’œdème de la muqueuse laryngée, susceptible de conduire à l’asphyxie. Aujourd’hui, une nouvelle avancée scientifique pourrait bien révolutionner la vie des personnes allergiques. Selon une étude présentée le 2 juin dans le Journal of Clinical Investigation, des chercheurs américains ont découvert un traitement qui pourrait prévenir une anaphylaxie légère à mortelle, quelle qu’en soit la cause.
Lors de cette étude, les chercheurs ont utilisé un inhibiteur de BTK (tyrosine kinase de Bruton, une enzyme que l’on trouve à l’intérieur des cellules) approuvé par la Food and Drug administration, l'agence du médicament américaine. Ces derniers ont permis de bloquer les réactions allergiques quand ils ont été testés sur des mastocytes humains dans un tube à essai. L’enzyme BTK bloqué, les mastocytes ne peuvent pas être déclenchés par des allergènes et des anticorps allergiques pour libérer de l'histamine et autres médiateurs allergiques.
Afin de tester l’efficacité de cette pilule in vivo, les scientifiques l’ont ensuite administré à un nouveau modèle de souris “humanisée” d'anaphylaxie. Résultat : le médicament a réussi à prévenir les réactions allergiques, y compris les réactions anaphylactiques graves et potentiellement mortelles, chez les animaux.
“Cette pilule pourrait changer et sauver des vies”
C’est la première fois que des scientifiques découvrent une méthode capable de prévenir l’anaphylaxie autre que l’évitement de l’allergène. “Cette pilule pourrait littéralement changer et sauver des vies, se félicite le docteur Bruce Bochner, auteur principal de l’étude, professeur à la faculté de médecine Feinberg de l'université Northwestern (Etats-Unis). Imaginez pouvoir prendre un médicament de manière proactive pour prévenir une réaction allergique grave.”
Espérons que ces résultats prometteurs conduisent à de futurs essais cliniques chez l’homme. A terme, ce traitement pourrait permettre d’éviter les réactions allergiques graves. Bochner et son équipe envisagent donc de voir si le médicament pourrait être reformulé pour être ajouté à l’EpiPen, qui injecte de l’épinéphrine à une personne souffrant d’une réaction allergique pour inverser ses symptômes. Qui plus est, les personnes présentant un risque d’exposition allergique à des antibiotiques vitaux ou celles sur le point de subir une désensibilisation alimentaire orale pourraient prendre cette pilule à titre préventif, avance le chercheur.
L’intérêt des tests cutanés
Dans le passé, plusieurs études avaient déjà montré l’intérêt de l'inhibiteur de BTK ibrutinib pour les personnes allergiques. Les patients cancéreux souffrant d’allergies aux poils de chats ou aux pollens d’ambroisie avaient ainsi vu leurs symptômes cutanés disparaitre de 80 à 90% en une semaine après avoir pris ce médicament. De même pour des personnes en bonne santé souffrant d’allergie alimentaire.
“L'inhibition des tests cutanés est une sorte de test de substitution pour savoir si le médicament est réellement efficace, explique Bochner. Donc, un objectif futur est de donner ce médicament à des sujets allergiques à la nourriture ou aux médicaments, de montrer par des tests cutanés que leur sensibilité allergique a été bloquée par l'effet du médicament et de leur donner ensuite la nourriture ou le médicament, en s'attendant à ce qu'ils aient peu ou pas de réaction”, conclut-il.
En France, entre 1997 et 2004, 2 516 chocs anaphylactiques ont été recensés, selon la Société française d’anesthésie et de réanimation. Pour informer les allergiques et toutes les personnes qui les côtoient sur les risques liés à ce phénomène et comment le prendre en charge, l’Association française pour la prévention des allergies (AFPRAL) a donc lancé un site d’information : Urgence Anaphylaxie. Elle recommande en premier lieu à toutes les personnes allergiques de se munir en permanence d’une trousse de secours. Cette dernière contient de l’adrénaline sous forme de stylo auto-déclenchant ou EpiPen et souvent un aérosol de broncho-dilatateur, des cachets ou sirop corticoïdes et anti-histaminiques. Si l’allergique est un jeune enfant, la trousse est généralement gardée par les parents tandis qu’un autre exemplaire est mis à l’école à disposition des professeurs.