Y a-t-il eu des défaillances dans la gestion de la crise sanitaire ? C'est la question à laquelle le Pr Jérôme Salomon, directeur général de la santé (DGS), n'a pas voulu répondre. Ce mardi, le responsable administratif a défendu la stratégie de la France devant la mission d'information Covid-19 de l'Assemblée nationale - aux pouvoirs d'une commission d'enquête -, malgré un lourd bilan et les nombreux couacs soulevés dans la presse comme la pénurie de masques pour les professionnels de santé.
Même si la Covid-19 a provoqué le décès de 29 550 personnes en France - ce qui la place selon le décompte de l'université Johns Hopkins au rang du 5e pays le plus endeuillé au monde -, Jérôme Salomon ne fera aucun mea culpa ou n'identifiera aucun dysfonctionnement. Rappelons qu'il a conseillé la ministre Marisol Touraine sur les questions de sécurité sanitaire entre 2013 et 2015, a rédigé des notes pour le candidat Emmanuel Macron en 2016, était membre du Conseil d'administration de Santé publique France en octobre 2016 jusqu'à sa prise de fonction en janvier 2018 comme directeur général de la Santé. Au cœur de la politique sanitaire publique du pays depuis près de 7 ans, Jérôme Salomon a gardé la ligne de conduite d'un administratif : il décrit, applique mais n'explique pas grand-chose.
Les députés demandent "des réponses précises"
Pourtant les membres de la commission d'enquête on tenté de lui faire analyser ou d'expliquer les 'couacs' les plus saillants de la gestion de crise sanitaire... en vain. Sur la décision de ne pas rendre obligatoire les masques pour le grand public ? "Comme dirait Voltaire : avant de savoir on ne sait pas" a-t-il déclaré en affirmant avoir suivi les recommandations changeantes de l'OMS et affirmant qu'il n'y a pas de consensus scientifique autour des masques 'grand public'. Des explications sur sa note au candidat Emmanuel Macron de 2016 disant que la France n'est pas prête face au risque épidémiologique ? Pr Jérôme Salomon esquive et omet d'expliquer l'esprit de cet écrit. Pourquoi ne pas avoir suivi les recommandations de l'OMS en matière de dépistage systématique ? Il félicite la coopération entre les différents laboratoires vétérinaires, civils, militaires et décrit la volonté de Santé Publique France de continuer le dépistage auprès de 230 clusters. Pourquoi avoir commandé 100 millions de masques fin 2019 alors qu'un audit en septembre 2019 chiffre les besoins à 1 milliard ? Il décrit l'évolution de la doctrine sanitaire de transformer ce stock 'figé' en 'dynamique' afin d'éviter de se retrouver d'un coup avec une masse de masques inutilisables.
"Il ne répond à rien et noie le poisson. On ne sait pas en quoi il considérait la France comme pas prête, ni ce qu’il a fait pour préparer le pays", pestait auprès du Monde par SMS un député de la commission, pendant l’audition. Brigitte Bourguignon (LREM) présidente de cette commission a interpellé l'auditionné demandant des "réponses précises" à des "questions précises". Au bout de 4h d'échanges, Pr Jérôme Salomon n'aura jamais prononcé le mot "pénurie" concernant le manque criant de masques pour les personnels soignants. Un premier échange de sourds dans ce marathon parlementaire. La commission d'enquête des députés compte auditionner cette semaine l'actuelle directrice de Santé Publique France et son prédécesseur, le président du conseil scientifique Covid-19 ainsi que les deux prédécesseurs de Jérôme Salomon au poste de directeur général de la Santé.
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