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NeuroCovid

Coronavirus : les trois étapes d'atteinte du système nerveux par le SARS-CoV-2

Il avait déjà été prouvé que le nouveau coronavirus pouvait s'attaquer au système nerveux. Des scientifiques ont baptisé ce phénomène NeuroCovid et l'ont récapitulé en trois phases bien distinctes. 

Coronavirus : les trois étapes d'atteinte du système nerveux par le SARS-CoV-2 image_jungle/iStock




L'ESSENTIEL
  • Les troubles neurologiques engendrés par la Covid-19 se produiraient en raison de la tempête cytokinique déclenchée par le virus.
  • Si l'orage cytokinique est sévère, le malade peut souffrir de lésions cérébrales.

Décidément, les pouvoirs malveillants du nouveau coronavirus semblent s’étendre de jour en jour. Outre les dommages pulmonaires, cardiaques et rénaux que le SARS-CoV-2 peut entraîner, il avait également déjà été avancé que le virus pouvait s'attaquer au système nerveux. Aujourd’hui, dans le Journal of Alzheimer's Disease, des scientifiques américains récapitulent ce phénomène, qu’ils ont décidé de baptiser NeuroCovid.

Les troubles neurologiques engendrés par la Covid-19 se produiraient en raison de la tempête cytokinique, dont les médias ont déjà beaucoup parlé, car cet emballement du système immunitaire est à l’origine de nombreux décès. Ainsi, cet “orage” peut entraîner une inflammation du système nerveux au point de provoquer des encéphalopathies (inflammations cérébrales). D’autant plus que les neurones sont riches en ACE2, le récepteur grâce auquel le SARS-CoV-2 s’attache aux cellules.

Si le virus peut rester à l’intérieur de certains neurones sans présenter de toxicité aiguë, il peut causer des dysfonctionnements sur le long terme. Ainsi, la production protéines anormales chez les patients qui ont souffert d’une forme sévère de la Covid-19 “peut donc théoriquement conduire à une dégénérescence cérébrale des décennies plus tard”, écrivent les chercheurs.

Trois stades 

Pour vulgariser leurs propos, ces derniers décrivent le phénomène du NeuroCovid en trois étapes.

  • Stade 1 Perte du goût et de l’odorat : l’attaque du virus se limite aux récepteurs ACE2 des cellules épithéliales nasales et gustatives. La tempête de cytokines reste faible et contrôlée et le malade guérit de lui-même.
  • Stade 2 Orage cytokinique : SARS-CoV-2 entraîne une réponse immunitaire forte avec des niveaux élevés de cytokines. Cela entraîne la formation de caillots sanguins qui vont se loger dans les vaisseaux. Certains malades peuvent alors avoir un accident vasculaire cérébral (AVC) ou souffrir d’une occlusion artérielle ou veineuse (thrombose).
  • Stade 3 Orage cytokinique sévère : l'emballement immunitaire abîme le filtre qui protège le cerveau, la barrière hémato-encéphalique. Cela entraîne l’infiltration de facteurs inflammatoires et d’autres contenus sanguins, y compris des particules virales dans le milieu cérébral. Le malade souffre de lésions cérébrales. En résultent un délire, une encéphalopathie ou des convulsions. 

Dépression, troubles du sommeil, déficit de l'attention….

Ainsi, “les patients atteints de Covid-19 peuvent présenter un large éventail de manifestations neurologiques qui peuvent être dues à la lésion du système nerveux central et périphérique via une tempête de cytokines, des caillots sanguins, des dommages directs par le SARS-CoV-2, et/ou une imitation moléculaire”, notent les chercheurs. Parmi les “conséquences neuropsychiatriques à long terme”, ils craignent chez les anciens malades de la Covid “un déclin cognitif, un déficit de l'attention (…) ou la maladie d'Alzheimer dans le futur”. Au niveau psychiatrique, une vague de patients souffrant de trouble de stress post-traumatique, d’anxiété, d’insomnie, de psychose pourraient se révéler dans “les années à venir”, mettent-ils en garde.

En conclusion, comme cela avait été le cas lors de l’épidémie de SRAS qui avait frappé l’Asie en 2002, ou de celle du MERS, qui circulait au Proche-Orient en 2012, “tous les patients atteints d'une infection au Covid-19 qui quittent l'hôpital ne retrouveront pas 100% de leurs fonctions émotionnelles et neurocognitives de base”. Il faudra donc suivre les malades rétablis de la Covid-19 avec une grande attention. “Nous devons ajouter Covid-19 à la liste des diagnostics différentiels pour nos patients dans une unité de neurologie et rester conscients que les patients doivent avoir un bilan complet et standard pour leur évaluation et leur traitement. Les neurologues doivent envisager de demander des analyses sanguines pour déterminer les niveaux de cytokines (…) ainsi que la PCR et/ou la sérologie du SARS-CoV-2”, concluent-ils.

Un phénomène observé à plusieurs reprises dans le monde entier

Depuis le début de l’épidémie de Covid-19, plusieurs études ont montré l’impact du SARS-CoV-2 sur le système nerveux des malades, même après leur rétablissement. Le 25 février, dans un papier paru dans le Journal of Medical Virology, des chercheurs chinois écrivaient : “Dans l'ensemble, la propension neuroinvasive a été démontrée comme une caractéristique commune des Coronavirus. Compte tenu de la grande similitude entre le CoV du SRAS et le CoV-2 du SRAS, il est fort probable que le CoV-2 du SRAS possède également un potentiel similaire. D'après une enquête épidémiologique sur le Covid-19, le temps médian entre le premier symptôme et la dyspnée était de 5 jours, entre l'admission à l'hôpital et les soins intensifs de 7 jours et de 8 jours. Des études précédentes ont signalé que certains patients infectés par le CoV-2 du SRAS présentaient des signes neurologiques tels que des maux de tête (environ 8 %), des nausées et des vomissements (1 %). Plus récemment, une étude (…) portant sur 214 patients atteints de Covid-19 a également révélé qu'environ 88 % (78/88) des patients atteints de la forme grave présentaient des manifestations neurologiques, notamment des maladies cérébrovasculaires aiguës et des troubles de la conscience. Par conséquent, la prise de conscience de la possibilité d'une neuroinvasion peut avoir une importance déterminante pour la prévention et le traitement de l'insuffisance respiratoire induite par le SARS-CoV-2.”

Une étude pakistanaise parue le 13 mars dans le journal Chemical Neuroscience a ensuite mis en avant le fait que la Covid-19 puisse entraîner la perte de l’odorat et du goût pour étayer cette théorie. Grâce à des recherches effectuées sur des souris transgéniques, modifiées pour être sensibles aux coronavirus affectant les humains, les chercheurs ont montré que SARS-CoV-1 ou le MERS-CoV peuvent pénétrer dans le cerveau, possiblement par le nerf olfactif et se propager ensuite rapidement dans certaines zones spécifiques du cerveau, comme le thalamus et le tronc cérébral.

Enfin, un papier français intitulé Caractéristiques neurologiques d'une infection grave par le SARS-CoV-2 paru le 15 avril dans The New England Journal of Medicine, rapporte que 84% des 48% patients de l’unité de soins intensifs de Strasbourg malade de la Covid présentaient des anomalies à l’examen neurologique. Plus inquiétant encore, 33% des personnes qui quittaient cette unité conservaient des symptômes résiduels comme le manque d’attention ou les difficultés à prendre des décisions ou à contrôler leur comportement.

 

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