Pas moins de 287 millions d’euros. Telle est la somme de la fraude dont l’Assurance maladie a été victime en 2919, selon la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam). D’après le Parisien qui relaie l’information ce jeudi 18 juin, la fraude viendrait plus des soignants et des établissements de santé que d’un abus de cartes Vitale.
Pour en arriver à ce chiffre, 1 650 agents de terrain ont examiné quelque 13 millions de factures. D'après Nicolas Revel, le patron de la Cnam devant la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la fraude aux prestations sociales, “23 000 enquêtes ont été ouvertes à la suite d'un préjudice constaté et 8 800 actions en contentieux ont été ouvertes, contre 5 500 en 2014”. La fraude des professionnels et des établissements de santé représente 20% des cas mais 48% du préjudice financier total, avec pas moins de 135,1 millions d'euros. Les fraudeurs sont à 48% des professionnels de santé tels que des pharmaciens, des médecins ou des transporteurs et à 31% des établissements de soins.
Pire encore, les experts ont identifié des groupes organisés sur Internet diffusant des pratiques illicites, allant des arrêts de travail fictifs aux facturations à l’Assurance maladie de médicaments qui seront ensuite vendus dans d’autres pays.
“La question des cartes Vitale n'est pas un marqueur de fraude”
La fraude commise par les assurés concerne quant à elle 51% des cas mais ne représente que 21% du préjudice total. En fin d’année dernière, “il y avait en France 58,4 millions de cartes Vitale en circulation pour 59 millions d'habitants de plus de 16 ans”. Aussi, “la question des cartes Vitale n'est pas un marqueur de fraude”, tranche Nicolas Revel, alors qu’en février dernier une polémique était née suite à la révélation, devant la même commission, du surplus de cartes en circulation (2,6 millions).
L'Assurance maladie avait alors tenu à rassurer les craintes quant aux risques que des personnes installées à l’étranger se fassent rembourser des prestations indues. Avoir une carte Vitale ne signifie pas forcément que l'on a des droits, les cartes peuvent être inutilisables, avait ainsi rappelé la présidente de l'organisme Mathilde Lignot-Leloup. “Les droits des bénéficiaires sont interrogés lors des prestations par les professionnels de santé ou les administrations”, avait-elle déclaré.
Qui plus est, “il y a des personnes qui peuvent ne pas avoir été recensées par l'Insee, comme les étudiants étrangers, les retraités vivant à l'étranger, les assurés de la caisse des Français de l'étranger, les détachés restant salariés en France, des personnes qui ont quitté le territoire sans le signaler…”, explique l’Assurance maladie.
En 15 ans, 44 millions de cartes Vitale ont été supprimées, car beaucoup avaient été données aux mêmes personnes par leurs différents régimes d'affiliation. “Encore en 2019, le régime général en a supprimé 2,7 millions pour cause de décès de l'assuré, départ à l'étranger… Et 100 000 ont été détruites car leurs bénéficiaires, contactés pour vérifier leur résidence en France, n'ont jamais répondu”, détaille Nicolas Revel, rappelant que “ces cartes n'étaient à l'origine que de 0,023 % des feuilles de soins. (…) Souvent des gens perdent leur carte, en demandent une nouvelle, retrouvent l'ancienne et s'en servent.”
“Entre 2014 et 2018, 1,2 milliard d’euros de fraudes ont été détectées et stoppées”
Depuis 2005, l’Assurance maladie a détecté et stoppé près de 2,4 milliards d’euros. “Entre 2014 et 2018, 1,2 milliard d’euros de fraudes ont été détectées et stoppées contre 744 millions entre 2009 et 2013, soit une augmentation de plus de 50%. En 2018, ce montant s’élève à 261,2 millions”, explique l’Assurance maladie sur son site.
Pour lutter contre cette fraude “diverse et mouvante”, “les techniques et les dispositifs pour lutter contre la fraude mis en œuvre par l’Assurance Maladie évoluent sans cesse : rotation des champs investigués chaque année, adaptation de la réglementation, intensification des échanges de données entre les administrations, recours à de nouvelles techniques d’exploitation des bases de données statistiques de l’Assurance Maladie, grâce au datamininget même plus récemment via le recours au big data”, est-il précisé.