Depuis quelques années, les femmes atteintes d’endométriose parlent enfin de leur quotidien difficile lié à cette maladie gynécologique chronique résultant d’une migration anormale des cellules de l’endomètre en dehors de l’utérus. A l'origine de fortes douleurs dans le bas du ventre, notamment pendant les règles et/ou durant les rapports sexuels, l'endométriose toucherait plus d’une femme sur dix âgée de 16 à 50 ans et entraînerait dans 25 à 50% des cas une infertilité.
Fatigue, douleurs, troubles digestifs et urinaires
Bien que la douleur soit physique, l'endométriose affecte aussi la qualité de vie des femmes qui en souffrent en devenant peu à peu psychologique. EndoFrance a mené une vaste étude en partenariat avec l’Ipsos et le laboratoire Gedeon-Richter sur le quotidien de 1557 femmes atteintes de cette pathologie et 100 de leurs conjoints. “Selon les résultats de l’enquête EndoVie, l’endométriose se déclare tôt dans la vie d’une femme, avant 20 ans dans la moitié des cas, analyse l'association. Dès le début de la maladie, les symptômes sont multiples et ne se limitent pas aux règles douloureuses. La démarche diagnostique dure en moyenne sept ans à partir des premiers symptômes.”
Dans le détail, 66% d'entre elles ont des douleurs multiples du nombril au bas-ventre, 54% souffrent d'une fatigue chronique, 52% ont des troubles digestifs, 50% ont des douleurs pendant les rapports sexuels, 48% ont des douleurs lombaires ou dans les membres inférieurs, 45% ont des saignements anormaux, 34% rencontrent des difficultés pour concevoir un enfant et 25% ont des troubles urinaires. Huit femmes sur 10 atteintes d'endométriose ont des règles douloureuses.
“L’évolution de la maladie dans le temps est très différente d’une femme à une autre, elle peut s’accélérer brutalement, rester quiescente pendant des années, être très bruyante à 20 ans, puis s’éteindre au fil des années…, explique le docteur Jean-Philippe Estrade, chirurgien gynécologue et obstétricien à la clinique Bouchard-Elsan,(Marseille). Chez les adolescentes, le véritable enjeu est avant tout de leur permettre de mener une vie normale, d’aller à l’école ou à la faculté alors que les douleurs durant les règles sont extrêmement intenses.”
Des conséquences physiques et psychologiques
Les femmes interrogées évoquent les conséquences de la maladie dans de nombreux domaines de la vie quotidienne tels que leur forme physique et psychique, sexualité, vie sociale, loisirs, vie professionnelle… EndoFrance qualifie l'endométriose de “maladie de la femme”, mais aussi du couple tant elle affecte la sexualité et le projet d'avoir des enfants. Pour 66% d'entre elles, elle a une influence sur leur vie sexuelle, 67% sur le plan psychologique et 63% sur le plan physique, 61% dans leur vie amoureuse et de couple et 53% dans leurs loisirs.
L'endométriose touche également le bien-être au travail de 65% des femmes qui en souffrent : 62% évoquent des conséquences sur leurs capacités physiques et intellectuelles pour travailler et 60% sur leur concentration. Cinquante-huit pour cent d'entre elles se sentent plus stressées et 56% démotivées.
Les conjoints également touchés par l'endométriose
Bien que l'endométriose soit une maladie gynécologique et donc féminine, elle affecte aussi le bien-être des conjoints qui sont 40% à s'inquiéter pour leur dulcinée, 15% dans l'incompréhension et 15% dans la compassion. “Depuis quelques années, nous constatons la présence de conjoints, ou parents, dans nos réunions d’information, précise Yasmine Candau, présidente de l’association EndoFrance. Et nous nous en félicitons. Les hommes posent souvent beaucoup de questions, cherchent à comprendre et éprouvent aussi le besoin de partager leurs émotions.”
Néanmoins, 7 femmes sur 10 ressentent une diminution du désir et de la libido et près de 6 femmes sur 10 s’abstiennent de rapports sexuels pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois, ce qui dégrade également la sexualité de leur conjoint. Dix-huit pour cent d'entre eux ont même dû renoncer à des projets d'avenir comme se marier ou acheter une maison et 25% à fonder une famille.
“Depuis l’an dernier, nous organisons des rencontres ‘spéciales couples’. Elles sont très appréciées car nous offrons un espace de parole à chacun, explique Yasmine Candau. Les femmes expriment ce dont elles ont besoin, les hommes ce qui leur pose problème. Nous les encourageons à dialoguer, à oser dire les choses, notamment en ce qui concerne la sexualité. Nous les orientons vers les professionnels — sexologue ou thérapeute de couple — qui peuvent les aider. Le partage d’expériences se révèle bien souvent une aide précieuse.”