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La santé en vacances

Vacances : “Il faut plus de dix jours pour que le changement de rythme ait un véritable effet”

Par Floriane Valdayron

Partir en vacances est loin d'être anodin. Entre le rythme à adopter sur place, la fréquence annuelle et la durée à attribuer aux congés, le repos ne s'improvise pas. Les clés avec Damien Davenne, chronobiologiste et professeur à l'université de Caen.

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Professeur à l'université de Caen et directeur de l'unité de recherche COMETE au sein de l'Inserm, Damien Davenne est spécialisé dans l'étude des rythmes biologiques des êtres vivants. Entre ses clés pour récupérer pendant les vacances et ses conseils pour optimiser au mieux ses congés sur l'année, le chronobiologiste est catégorique: toute phase d'activité doit être suivie par un temps de repos. Il nous explique pourquoi?

Au bout de combien de jours de vacances décrochons-nous vraiment ?

En général, on est dans le coaltar les premiers jours des vacances, mais cela dépend beaucoup de l'état dans lequel on est lorsque l'on part. Je pense qu'il ne faut que deux à trois jours pour vraiment lâcher prise et se plonger dans les vacances si on a une profession qui le permet. Cela demandera peut-être jusqu'à cinq jours aux personnes qui ont vraiment besoin de récupérer des nuits normales de sommeil, adaptées à leur propre rythme. Il y a aussi des gens pour qui le travail est tout à fait supportable, qui n'aiment pas ralentir et s'arrangent pour ne jamais le faire : ils ne changent pas leurs habitudes en partant en vacances.

Cela reste très individuellement dépendant: chacun a la capacité de lâcher ou non. Elle varie en fonction de ce que l'on lâche et du stress qu'il y a eu juste avant le départ : souvent, le fait de partir induit une semaine stressante car on a plein de choses à finir et on manque de temps pour le faire. C'est là qu'il faut savoir lâcher prise. Par ailleurs, certaines personnes ont besoin de deux à trois jours chez elles pour faire une coupure avant de partir, tandis que d'autres devront absolument s'en aller tout de suite car elles ne se sentent pas en vacances chez elles.

Combien de temps faut-il partir pour ressentir les effets positifs des congés ?

Il faut plus de dix jours pour que le changement de rythme ait un véritable effet et que l'on en profite vraiment. C'est pour cela que l'idéal est d'organiser ses vacances par tranches de deux semaines, au minimum. Les gros weekends peuvent également être efficaces car ils ne sont pas suffisamment longs pour que le changement de rythme s'instaure. À l'inverse, les vacances d'une semaine comme celles de la Toussaint sont une aberration: elles sont à la fois trop longues et trop courtes. 

Comment bien récupérer en vacances ?

La régularité est la clé, même si on fait la fête car on est en vacances. En se fixant des heures de réveil extrêmement régulières, tout le reste suivra: on se couchera à l'heure qu'il faut la veille, quand on pourra le faire. Il faut se sonder : si on est du matin, il convient de se réveiller entre 6 et 7 heures, et si on est plutôt un couche-tard, il vaut mieux viser un réveil aux alentours de 9 ou 10 heures. Bien sûr, se laisser une marge d'une heure est loin d'être catastrophique. Enfin, lorsque c'est possible, il est recommandé d'instaurer une sieste quotidienne de 20 minutes, au maximum.

Si l'on ne tient pas compte de ses propres rythmes, on perturbe son système et on gaspille beaucoup d'énergie pour pas grand-chose. Ainsi, il faut également appliquer la régularité du rythme veille/sommeil aux repas, en évitant trop d'excès le soir. Récupérer passe aussi par le fait de se dépenser, et d'entrer dans des phases de repos méditatif, avec de très beaux paysages sous les yeux, par exemple. En somme, il faut vraiment éviter les situations stressantes, lâcher prise et goûter à la vie, à ce qui s'offre à nous ; aux plaisirs simples.

Quelle est la bonne fréquence annuelle de vacances à adopter ? 

Les seuls travaux qui ont véritablement été menés portent sur le domaine de l'éducation. On sait que, dans ce milieu, il y a sept semaines d'activité puis deux de repos dans les périodes optimales. C'est l'idéal. En revanche, avoir instauré des grandes vacances l'été ne l'est pas, car c'est le moment de l'année où nous sommes programmés pour être plus actifs, plus dynamiques, plus ‘rentables'. C'est également paradoxal pour les enfants, puisque c'est là qu'ils sont les plus réceptifs et performants pour l'apprentissage.

Il faudrait plutôt dormir plus longtemps et se reposer l'hiver, mais, même si tout le favorise, ce n'est pas comme ça que l'on gère notre vie. Puis, il faut dire que ce n'est pas désagréable d'avoir des vacances l'été car on peut aller à la plage et visiter des lieux extraordinaires grâce aux conditions météorologiques. Par ailleurs, il y a toute une économie individuelle et collective qui incite les gens à sortir et à consommer l'été : c'est parfaitement admis.

Faudrait-il “s'affranchir” de la limite des cinq semaines de congé par an ?

C'est assez compliqué. Cela reviendrait à une réduction du temps de travail. Toute une philosophie de société a été engagée avec les 35 heures, et cela a vite dérivé avec des mécanismes au niveau de l'organisation individuelle, souvent en désaccord avec la physiologie de la personne. Par exemple, pour beaucoup, 35 heures reviennent à 3,5 jours de travail : c'est une aberration. En réalité, il devrait y avoir peu de travail quotidien, réparti sur beaucoup de jours. On n'est pas fait pour certains types de métiers qui nécessitent de travailler beaucoup, mais l'appât du gain entre en jeu, ainsi que plein d'autres considérations qui viennent faire oublier la physiologie de l'individu.

Malgré tout, il faut garder en tête que l'on a besoin de repos : toute phase d'activité doit être suivie par un temps de repos, sinon le rythme s'installe au détriment de l'individu. C'est ce que l'on retrouve au niveau de l'indicateur veille/sommeil : on peut travailler à en perdre le sommeil et, bien souvent, les vacances permettent de récupérer ce dernier. Ainsi, beaucoup d'insomniaques dorment un peu mieux en vacances.