- Diagnostiquée en avril 2019, la chercheuse décèdera quelques mois plus tard des suites de la maladie, à 33 ans.
- Une plainte pour "homicide involontaire" et "mise en danger de la vie d’autrui" a été déposée par la famille de la victime.
Emilie H. manipule des souris lorsqu’elle se coupe le 30 mai 2010 dans un laboratoire de Jouy-en-Josas (Yvelines). La maladie de Creutzfeldt-Jakob nouveau variant (vMCJ) a été inoculée aux rongeurs. La jeune femme porte des gants, déchirés lors de l’accident. Quelques minutes plus tard, elle contacte une infirmière et sa plaie est désinfectée. L'incident sera déclaré comme accident du travail, mais ce n'est que 7 ans plus tard qu'il refera surface. En 2017, Emilie H. présente des symptômes de la vMJC. Elle sera diagnostiquée en avril 2019, et décèdera quelques mois plus tard des suites de la maladie, à 33 ans.
Sept ans plus tard, l’apparition des premiers symptômes
The New England Journal of Medicine (NEJM) explique que la jeune femme ressent des douleurs dans l’épaule droite et dans le cou à partir de novembre 2017. En six mois, son cas s’aggrave et toute la partie droite de son corps la fait souffrir. À partir de janvier 2019, elle fait des hallucinations et montre des troubles de la mémoire. En avril, la maladie est diagnostiquée par la Cellule nationale de référence des maladies de Creutzfeldt-Jakob de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière. D’après une publication de l’Association française pour l’avancement des sciences (AFAS), la cellule a conclu à une origine compatible avec "une contamination accidentelle en milieu professionnel", du fait notamment de "l’exposition professionnelle à un agent bovin et/ou à l’agent de la maladie de Creutzfeldt-Jakob". Le NEJM explique que les caractéristiques cliniques de la patiente et les analyses neuropathologiques réalisées post-mortem sont similaires à celles de 27 patients ayant souffert de vMJC en France.
Une contamination liée à l’accident
La piste d’une contamination orale par l’ingestion de viande contaminée est peu probable dans ce cas, car les deux derniers cas de vMJC confirmés sont décédés en 2013 et en 2014, bien avant les premiers symptômes de la jeune femme. "L’exposition transdermique à du matériel contaminé par des prions est plausible chez cette patiente, explique la revue scientifique, car la souche à prions qu’elle avait manipulée était compatible avec le développement de la vMJC." Le prion est une protéine présente naturellement dans l’organisme et qui peut devenir pathogène. "Le délai de 7,5 ans entre l’accident de laboratoire et ses symptômes cliniques est conforme à la période d’incubation dans la forme transmise par transfusion de la maladie", ajoutent les scientifiques.
Une plainte déposée par l’entourage
En juin 2019, une plainte pour "homicide involontaire" et "mise en danger de la vie d’autrui" a été déposée par la famille de la victime, comme le rapporte BFMTV. Elle vise l’Institut National de Recherche Agronomique, employeur de la jeune femme au moment de l’accident. "Il n'y a absolument aucun doute sur le lien direct entre la blessure qu'elle a subie en 2010 et son décès aujourd’hui", a précisé l’avocat de la famille Me Julien Bensimhon. D’après la plainte, le laboratoire n’était pas aux normes, l’équipement de sécurité n’était pas adéquat et il n’y a pas eu suivi médical après l’accident. Une mission d’expertise a été ouverte par le Tribunal administratif de Paris.