La course au vaccin contre la Covid-19 s’accélère et deux pistes semblent prendre de l’avance. Ces essais, dont les résultats ont été publiés dans la revue The Lancet, sont encore préliminaires mais sont encourageants. Les deux projets sont basés sur un adénovirus, une famille de virus très courants qui provoque notamment les rhumes, qui ont été génétiquement modifiés pour produire la protéine, dite spike, du SARS-CoV-2. Les résultats concernent la phase 2 des essais cliniques, qui teste la tolérance et l’apparition d’une réponse immunitaire après l’injection du vaccin, comparé à un placebo. La phase 3 des essais va être enclenchée. Elle vise à tester leur efficacité sur un plus grand nombre de participants. Si celle-ci se révèle efficace, une commercialisation pourra être envisagée.
Une très forte réponse immunitaire, aucun effet indésirable
Le projet britannique est développé par des chercheurs de l’université d’Oxford (Royaume-Uni), en partenariat avec l’industrie pharmaceutique AstraZeneca. Le vaccin, testé sur plus de 1 000 patients, a montré qu’il crée une bonne réponse immunitaire en produisant des anticorps et des lymphocytes T. “Si notre vaccin s’avère efficace, c’est une option prometteuse, car ce type de vaccin peut être fabriqué facilement à grande échelle”, avance Sarah Gilbert, chercheuse à l’université d’Oxford. “On ne sait pas encore si ces niveaux d’immunité peuvent protéger contre l’infection (…) ni si ce vaccin peut protéger les plus fragiles des formes graves de Covid-19”, a commenté Jonathan Ball, professeur de virologie moléculaire à l’université de Nottingham (Royaume-Uni), qui n’a pas participé à l’étude.
Côté chinois, le projet, développé à Wuhan, d’où est partie la pandémie, est mené par des chercheurs de plusieurs organismes et financé par le groupe de biotechnologie coté à Hongkong CanSino Biologics. La phase 2 de l’essai clinique a porté sur 500 patients et montré là aussi une double réponse immunitaire contre la Covid-19. Aucun effet indésirable n’a été constaté. Un mois après l’injection du candidat-vaccin, 85% des candidats ont présenté des anticorps neutralisants dans le sang, contre 90% pour l’étude britannique. L’essai chinois est le seul à avoir des patients de plus de 55 ans, chez qui les taux d’anticorps observés ont été moins élevés. “Il est possible qu’une dose supplémentaire [de vaccin] soit nécessaire pour entraîner une réponse immunitaire plus forte dans la population âgée”, a estimé l’un des auteurs, Wei Chen, de l’Institut de biotechnologie de Pékin.
En France, l’Institut Pasteur a lancé la phase 1
Jean-François Delfraissy, le président du conseil scientifique, a souhaité jouer la carte de la prudence face à ces résultats prometteurs qui suscitent l’espoir. “Faisons très attention à ces annonces. L’industrie pharmaceutique, c’est normal, veut pousser les avancées qui peuvent arriver. Ce sont quand même des effets d’annonce, a-t-il réagi au micro d’Europe 1, lundi soir. C’est normal qu’il y ait une réponse immunitaire, mais on ne sait pas encore de quelle nature, avec quelle force, avec quelle durée, et quels types d’anticorps sont présents. Je suis extrêmement prudent. On va aller plus vite que d’habitude pour un vaccin contre le coronavirus, mais nous sommes plutôt dans une stratégie de fin d’année 2020 ou début 2021.”
Parmi les autres projets de vaccins en lice, la biotech américaine Moderna semble également bien avancée. La semaine dernière, elle a annoncé lancer la phase 3 de son candidat-vaccin le 27 juillet prochain. Celle-ci va concerner 30 000 personnes, la moitié recevant un placebo. En France, c’est l’institut Pasteur qui tient la corde de la recherche. Le candidat-vaccin, basé sur une souche de la rougeole, est testé sur 90 volontaires pendant le mois de juillet. Si celle-ci est concluante, les phases 2 et 3 devraient être lancées en même temps pour gagner du temps et pourraient débuter en octobre. Si ce candidat-vaccin se révèle efficace et sans danger, une commercialisation pourrait survenir au premier trimestre 2021.