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Maladies neurodégénératives

11 septembre : les premiers intervenants du World Trade Center exposés à un risque de démence

Par Charlotte Arce

Des anomalies neuroradiologiques donnent lieu à une démence chez les premiers intervenants sur le site du World Trade Center le 11 septembre 2001.

VEX Collective/iStock
Deux études portant sur des intervenants sur le site du World Trade Center montrent que ces derniers présentent des anomalies neuroradiologiques et des modifications sanguines similaires à celles observées chez les patients atteints de la maladie d'Alzheimer.
Une première étude a constaté chez des personnes souffrant de déficience cognitive légère une diminution de l'épaisseur de la matière grise dans le cerveau.
La seconde étude menée sur des victimes de stress post-traumatique a mis en évidence une accumulation dans leur sang d'une protéine caractéristique de maladies neurodégénératives.

Il y a 19 ans, le 11 septembre 2001, deux avions détournés par des membres du groupe terroriste Al-Qaïda étaient projetés contre les tours jumelles du World Trade Center (WTC) à New York (Etats-Unis). Outre les 2 753 victimes, les experts ont recensé, au fil des années, des dizaines de milliers de personnes directement ou indirectement exposées aux poussières causées par l’effondrement des tours, et souffrant de problèmes pulmonaires, de déficience respiratoire, de maladies cardiovasculaires ou encore de cancers.

Selon deux études menées par l’université de Stony Brook (État de New York, États-Unis) et présentées virtuellement lors de la conférence internationale de l'Alzheimer's Association ce mardi 28 juillet, les premières personnes étant intervenues sur le site du WTC après les attentats ont un risque accru de développer une démence.

Une perte de matière grise

Les expositions environnementales et les pressions psychologiques subies par les personnes qui ont répondu au 11 septembre et à ses conséquences ont eu un effet insidieux sur leur santé et leur bien-être, explique Benjamin Luft, directeur du programme de santé et de bien-être du World Trade Center de Stony Brook. Aujourd'hui, près de 20 ans après le 11 septembre, les cliniciens qui s'occupent de ces personnes voient de plus en plus de patients qui présentent des signes de troubles cognitifs et de démence éventuelle. Les résultats de nos nouvelles études fournissent pour la première fois des données qui soutiennent l'idée que cette population de patients atteints de troubles cognitifs n'a pas seulement des problèmes psychologiques tels que le syndrome de stress post-traumatique (SSPT), mais qu'elle peut être à haut risque pour des troubles neurodégénératifs, une possibilité qui doit être étudiée immédiatement et de façon continue.”

Dans le cadre de la première étude, les chercheurs ont utilisé l’imagerie IRM pour évaluer la matière cérébrale d’anciens intervenants du World Trade Center, sans symptôme de déficience cognitive et âgés de 45 à 65 ans. Ils ont mesuré le cortex cérébral, la zone du cerveau responsable de la cognition. Les résultats ont montré une atrophie de la zone corticale dans 23 des 34 régions corticales, parmi lesquelles les lobes frontal, temporal et occipital chez une majorité de participants à l’étude. “Nous avons trouvé une corrélation directe entre les personnes souffrant de troubles cognitifs et l'épaisseur corticale, indiquant une réduction de la matière grise du cerveau à des niveaux compatibles avec une maladie neurodégénérative”, explique Sean Clouston, premier auteur des travaux.

Selon lui, le niveau de réduction de l'épaisseur corticale chez de nombreux volontaires est “un indicateur possible de démence à un stade précoce avec une possible apparition précoce de la démence susceptible de se produire pour une partie de ces individus à la quarantaine.”

Il précise toutefois que ces patients doivent faire l'objet d'une étude longitudinale pour déterminer si ces changements évoluent dans le temps. D'autres travaux d'imagerie et recherches connexes sur le cerveau sont également nécessaires pour déterminer la ou les causes de l'atrophie cérébrale chez les personnes intervenues sur le site du World Trade Center.

Une accumulation de protéines infectieuses dans le sang

La deuxième étude, publiée prochainement dans la revue Translational Psychiatry, s’est elle intéressée à 181 intervenants souffrant de stress post-traumatique et de déficience cognitive légère. Une analyse sanguine de 276 protéines a montré chez les volontaires une protéinopathie, c’est-à-dire une accumulation de protéines sanguines caractéristiques de certaines maladies neurodégénératives telles qu’Alzheimer.

Nous pensons que la neuroinflammation est un mécanisme possible dans lequel les répondants souffrant de SSPT semblent avoir un risque plus élevé de développer une légère déficience cognitive, a déclaré Benjamin Luft, l'auteur principal. Nous espérons que notre analyse unique des protéines associées aux maladies liées à la déficience cognitive dans cette population est un moyen supplémentaire d'identifier leur risque en fonction des changements dans leur corps probablement dus à leur exposition."