Partir à l'assaut du Mont-Blanc à la dernière minute, sans préparation ni équipement adéquat, n'est désormais plus possible. Depuis le 15 juin dernier, un arrêté préfectoral régule l'accès au plus haut sommet d'Europe, qui culmine à 4 810 mètres d'altitude. En cause : le nombre d'ascensionnistes par an, qui s'élève à près de 25 000. Car, en plus de la surfréquentation des refuges, la popularité du Mont-Blanc entraîne des problèmes de sécurité, voire des incivilités et des atteintes à l’ordre public. Le tout dans un contexte où le site est fortement touché par le réchauffement climatique.
Ainsi, un dispositif de régulation vise à faire respecter l’effectif public maximal des refuges de la voie normale, de même que l’interdiction de camper en site classé en dehors de la dérogation accordée au camp de base de Tête Rousse. Autre objectif : contrôler les guides de haute montagne pour s'assurer qu'ils sont tous titulaires d'une carte professionnelle ou d'un diplôme, afin de s'assurer de leurs qualifications. Enfin, l'arrêté ambitionne également de continuer à favoriser la prévention engagée depuis plusieurs années sur l'équipement et la préparation nécessaires à l'ascension, ainsi que sur les conditions de la montagne.
Une “brigade blanche” pour faire respecter le dispositif de régulation
Pour mener à bien ce projet, l'obligation de réservation nominative dans l’ensemble des refuges de l’itinéraire a été mise en place, tout comme le passage sous gestion du camp de base de Tête Rousse, avec une limitation de sa capacité à 50 personnes. En parallèle, Jean-Marc Peillex, le maire de Saint-Gervais-les-Bains, a créé une “brigade blanche”, chargé du contrôle des récépissés de réservation des ascensionnistes sur tout le tracé de l’itinéraire. Ainsi, elle intervient en complément des pelotons de gendarmerie de haute montagne (PGHM).
La mise en place de ces mesures avait été annoncée à la mi-février, lorsque Emmanuel Macron s'était rendu en Haute-Savoie. Elles seront en vigueur jusqu'au 29 septembre prochain. “C’est la fin de la règle ‘au nom de la liberté on laisse tout faire’, y compris ce qui était interdit par les textes, a déclaré Jean-Marc Peillex à 20 Minutes en juin dernier. Le Mont-Blanc est protégé, c’est un site classé. Le camping par exemple y est interdit. Et pourtant, on a toléré pendant des années le camping autour du refuge du Goûter. Il y a encore cinq ans, on était monté jusqu’à 90 tentes, soit 180 personnes, alors que c’était interdit. Pendant des décennies, tout le monde s’est voilé la face.”
“Jusqu’en 2018-2019, je me suis retrouvé bien seul”
Cela fait 17 ans — soit depuis la canicule de 2003, qui avait dévoilé le piteux état du sommet le plus haut d'Europe — que l'élu se bat pour protéger le Mont-Blanc. “On a fait des textes et personne ne les a appliqués au nom de ce principe selon lequel la montagne est un espace de liberté, a regretté le maire de Saint-Gervais-les-Bains auprès de nos confrères. Mais comme on est allé trop loin, comme le gardien du refuge a failli se faire casser la figure, comme il y a eu une surfréquentation du sommet, les gens ont commencé à se dire qu’on ne pouvait plus continuer comme ça. Et il y a eu un basculement de prise de conscience. Mais jusqu'en 2018-2019, je me suis retrouvé bien seul.”
Jean-Marc Peillex fait allusion aux progrès qui s'étaient déjà fait ressentir au terme de la saison estivale 2019 : deux personnes y étaient décédées et 46 avaient été secourues, contre respectivement 3,6 et 62 en moyenne ces 10 dernières. Par ailleurs, si des “comportements inappropriés” étaient encore constatés, aucune incivilité grave n'avait été relevée. Enfin, tandis que les capacités maximales des hébergements avaient été respectées, un nouveau balisage luminescent de l’itinéraire d’ascension de l’aiguille du Goûter s'était révélé efficace.