Et si le stress post-traumatique avait d'autres facteurs que l'évènement traumatisant ? C'est la piste sur laquelle se sont engagés des chercheurs du centre de recherche médical Langone Health de l'université de New York (Etats-Unis) et de l'école de médecine Grossman de l'université de New-York. Dans leur étude publiée ce 10 août dans la revue Translational Psychiatry, ils montrent que les indicateurs les plus significatifs du stress post-traumatique (SPT) sont la tendance à sursauter en cas de bruits soudains, mais également les manifestations de symptômes de santé mentale en début de carrière — comme l'anxiété ou la dépression — et certaines différences génétiques, dont certaines pouvant influencer le système immunitaire.
“Si nous pouvons identifier les principaux facteurs de risque qui causent le SPT et les traiter avant qu'ils n'aient la chance de se transformer en un trouble de stress post-traumatique à part entière (SSPT), nous pouvons améliorer la qualité de vie des policiers et peut-être d'autres intervenants d'urgence, et mieux les aider à faire face aux facteurs de stress de leur travail”, explique Charles Marmar, l'auteur principal de l'étude et professeur de psychiatrie à l'École de médecine Grossman de l'université de New-York.
Intelligence artificielle
Pour parvenir à ces conclusions, les chercheurs ont utilisé un programme informatique développé par le centre de recherche médical Langone Health et l'université du Minnesota. Grâce à ce logiciel, ils ont confronté une “combinaison d'analyse statistique” aux bases de données biologiques provenant de 207 agents de police des départements de New York, San Francisco, Oakland et San Jose qui avaient le SSP. Tous les agents ont vécu au moins un événement mettant leur vie en danger au cours de leur première année de travail. Pour traiter ces masses d'informations et déterminer les meilleurs indicateurs d'apparition du stress post-traumatique, les scientifiques ont fait appel au machine learning, l'apprentissage automatique en français. Ce champ de l'intelligence artificielle utilise les capacités de calcul d'un ordinateur au sein de données structurées qui apprend au fur à et à mesure des indications des humains. Ce logiciel est entraîné à trouver des modèles, soit des schémas possibles de causes à effet.
À l'aide de ce programme, les chercheurs ont recherché des modèles dans 148 caractéristiques différentes que l'on croyait auparavant impliquées dans le SPT. Ils ont cartographié 83 différentes combinaisons possibles de facteurs, ou voies, qui auraient pu influencer les agents à mesure qu'ils développaient la maladie. “Sur la base de ces techniques, notre étude a identifié des causes spécifiques du SSPT plutôt que des liens possibles” assure le professeur Charles Marmar. Au total, 5 facteurs qui apparaissent le plus fréquemment ont été identifiés : la tendance à sursauter facilement, l'apparition d'une détresse grave après l'évènement traumatique, des problèmes de santé émotionnelle (anxiété ou dépression), mutation du gène HDC — agissant défavorablement sur le système immunitaire — et une mutation du gène MR, impliqué dans la “réponse de combat ou de fuite” soit une réaction immédiate du corps aux menaces.
Pas de fatalité
Sans l'un de ces 5 facteurs, les scientifiques estiment que les risques de développer un SSPT sont faibles et apportent de l'espoir dans un possible traitement préventif. “Plusieurs des facteurs causaux que nous avons identifiés — le gène HDC, le gène MR et la réponse de surprise — indiquent des circuits nerveux bien cartographiés, ce qui devrait nous permettre de trouver des médicaments et des thérapies comportementales qui pourraient aider”, déclare Glenn Saxe, un des principaux co-auteurs de l'étude et professeur au département de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent du centre de recherche Langone de l'université de New-York.
Le chercheur estime que cette étude permet également d'influencer les éléments provoquant l'apparition de certains facteurs. Par exemple, dans 60 % des voies causales la difficulté à s'adapter au travail a contribué au développement du STP. Par conséquent, il suffirait de davantage soutenir les nouveaux policiers afin de les aider à mieux s'adapter à leur nouveau travail de la police, cela pourrait réduire leur risque de développer un stress post-traumatique selon le médecin.
Selon l'Institut étasunien de santé mentale, 8 personnes sur 100 auront une expérience de SPT une fois au cours de leur vie. Les officiers de police sont particulièrement touchés par ce phénomène puisqu'ils expérimentent en moyenne 3 expériences traumatiques chaque six mois. Les répercussions sur la santé ? Cauchemars, agressivité et pénibles souvenirs d l'évènement traumatique pouvant provoquer un mauvais sommeil, de l'anxiété, de la dépression et un risque accru au suicide.