Le nouveau coronavirus qui sévit au Moyen-Orient en cette période de pèlerinage à haut risque de contamination l’aurait presque éclipsé. Pourtant la menace pandémique pourrait également venir d’Asie, comme le rappelle aujourd’hui une publication chinoise dans le British Medical Journal. Depuis l’identification du virus de grippe aviaire H7N9 en mars dans la région de Shanghaï, 133 personnes ont été infectées et 43 en sont mortes, dans toute la moitié Est de la Chine.
Jusqu’à présent, aucune transmission de l’homme à l’homme, susceptible de déclencher une pandémie n’avait été rapportée. Il semble que ce soit désormais chose faite, d’après des chercheurs du Centre de contrôle des maladies de la province du Jiangsu. Dans leur article, ils apportent la confirmation génétique qu’un homme de 60 ans et sa fille de 32 ans sont décédés en avril et mai dernier du fait de 2 souches virales quasiment identiques. Si le père a certainement attrapé le virus en fréquentant un marché aux volailles, sa fille, elle, n’a eu aucun contact avec des oiseaux. Elle a seulement soigné son père au début de sa grippe et attrapé le virus lors de ces contacts rapprochés.
Le virus H7N9 ne s’est pas encore adapté à l’Homme
« Ce premier cas de transmission interhumaine est probant mais il ne signifie pas que le virus aviaire H7N9 s’est adapté à l’Homme et qu’il est désormais capable de passer facilement d’un individu à l’autre », nuance le Pr Sylvie van der Werf, responsable du Centre national de référence des virus grippaux à l’Institut Pasteur à Paris. En d’autres termes, le virus est bien passé du père à sa fille garde-malade mais ce n’est pas pour autant qu’il a muté en un virus à haut risque facilement transmissible d’homme à homme, par la salive ou le contact des mains.
Ecoutez le Pr Sylvie van der Werf, responsable du Centre national de référence des virus grippaux à l’Institut Pasteur à Paris : « Il faut distinguer une transmission à la faveur d’un contact rapproché prolongé, comme c’est le cas ici et une adaptation du virus à l’Homme. H7N9 n’en est pas encore là. »
A tout moment, une conjonction de mutations peut permettre au virus H7N9 de s’adapter et d’acquérir cette grande capacité de transmissibilité interhumaine. Et plus il infecte de nouveaux individus, plus la probabilité qu’il s’adapte augmente.
Ecoutez le Pr Sylvie van der Werf, responsable du Centre national de référence des virus grippaux à l’Institut Pasteur à Paris : « Plus il y a de cas d’infection humaine, plus il y a d’opportunités pour que les variants du virus les plus adaptés à l’Homme soient sélectionnés. »
Or on sait que le virus H7N9 a d’ores et déjà une forte capacité d’infection de l’Homme car il possède à sa surface des protéines qui lui permette de s’accrocher aux cellules qui tapissent les voies respiratoires humaines. C’est ce qui explique aussi que les personnes infectées souffrent d’infections respiratoires sévères. La plupart des victimes, dont le père et sa fille évoqués par les chercheurs chinois ont été hospitalisés pour une pneumonie rapidement dégradée en détresse respiratoire fatale.
La menace pandémique reste inchangée
Pour l’heure, ce cas avéré de transmission interhumaine ne modifie pas les recommandations des spécialistes, qui préconisaient déjà d’éviter tout contact prolongé avec des personnes malades. La proximité des volailles est également à éviter, d’autant plus qu’il est impossible de distinguer les animaux malades des animaux sains. « C’est la particularité du virus H7N9 qui nous pose des difficultés : il ne provoque pas de symptômes chez les volailles », souligne le Pr van der Werf. A la différence du virus H5N1 qui tuait la majorité des volailles infectées, H7N9 peut donc étendre silencieusement son réservoir animal et augmenter ainsi ses chances d’infecter l’Homme et de s’y adapter.