- Une modification génétique de cellules adipeuses blanches immatures permet de les rendre similaires aux cellules adipeuses brunes, qui brûlent les calories au lieu de les stocker.
- Testée sur des souris, la technologie des ciseaux génétiques a permis aux rongeurs de développer une meilleure sensibilité à l'insuline et de prendre moins de poids.
La thérapie génique est-elle l’avenir du combat mondial contre l’obésité et le surpoids ?
C’est ce que laisse espérer une nouvelle étude menée par des chercheurs rattachés au Joslin Diabetes Center (États-Unis). Publiée dans la revue Science Translational Medicine, elle montre l’utilité de la technique CRISPR-Cas9, dite des "ciseaux génétiques" pour transformer génétiquement des cellules adipeuses blanches, qui emmagasinent les calories, pour les rendre similaires aux cellules adipeuses brunes qui, elles, les brûlent pour générer la chaleur corporelle.
"Les cellules adipeuses brunes brûlent de l’énergie au lieu de la stocker comme le font les cellules de graisse blanches, explique Yu-Hua Tseng, chercheuse en physiologie et en métabolisme intégratifs au Joslin Diabetes Center. Ce faisant, les cellules adipeuses brunes peuvent réduire les niveaux excessifs de glucose et de lipides dans le sang qui sont liés aux maladies métaboliques telles que le diabète." Elle précise cependant les personnes en surpoids ou obèses ont tendance à avoir moins de cette graisse brune bénéfique. Les cellules adipeuses brunes transformées, appelées HUMBLE (pour "human brown-like", humaines de type brun) sont cependant conçues pour surmonter ce problème.
Une plus grande sensibilité à l’insuline
L’équipe de recherche a d’abord créé les cellules HUMBLE à partir de globules blancs humains à un stade de progéniture, c’est-à-dire n’étant pas encore complètement développés dans leur forme finale. Ils ont ensuite utilisé une variante du système d'édition du génome CRISPR-Cas9 pour stimuler l'expression d'un gène appelé UCP1, qui déclenche le développement des progénitures de globules blancs en cellules de type graisse brune.
Ces cellules HUMBLE ont été transplantées à des souris dépourvues de système immunitaires, ce qui leur a permis de se développer. Elles ont alors fonctionné comme les propres cellules adipeuses brunes des souris.
Soumises à un régime alimentaire riche en graisse, les souris ayant reçu des cellules HUMBLE ont montré une sensibilité beaucoup plus grande à l’insuline et une capacité à éliminer le glucose dans le sang que les souris du groupe témoin. Elles ont aussi pris moins de poids.
Deux options à l’étude
Pour les chercheurs, ces résultats pré-cliniques sont encourageants. Ils espèrent pouvoir bientôt générer des cellules brunes HUMBLE pour des patients individuels. Une telle procédure consisterait ainsi en retirer une quantité infime de globules blancs d'un patient, d'isoler les cellules progénitrices, de modifier ces cellules pour stimuler l'expression de l'UCP1, puis de retransplanter les cellules HUMBLE résultantes au patient.
Cependant, précise le Dr Tseng, cette approche individualisée pourrait s’avérer compliquée et coûteuse. Elle travaille donc sur des alternatives. La première serait d’utiliser des cellules non-personnalisées qui seraient ensuite encapsulées par des biomatériaux qui protègent les cellules du rejet par le système immunitaire du patient. L'autre option est celle des thérapies géniques qui expriment directement le gène UCP1 dans les cellules progénitrices de graisse blanche de l'organisme, de sorte que ces cellules acquièrent des propriétés semblables à celles de HUMBLE.
"L'utilisation de thérapies cellulaires ou génétiques pour traiter l'obésité ou le diabète de type 2 relevait autrefois de la science-fiction. Aujourd'hui, les avancées scientifiques, telles que les technologies d'édition de gènes du CRISPR, nous aideront à améliorer le métabolisme, le poids corporel, la qualité de vie et la santé générale des personnes souffrant d'obésité et de diabète", conclut le Dr Tseng.