Au milieu des mauvaises nouvelles annonçant un rebond épidémique, des hôpitaux en saturation ou encore des prévisions inquiétantes sur l’évolution du nombre de morts, il y a une nouvelle qui fait du bien. Celle-ci concerne l’immunité collective qui repose sur la part de la population déjà atteinte par le virus, ou bien un virus similaire qui engendrerait une immunité croisée, et qui serait protégée contre une réinfection. Trois chercheurs britanniques ont publié un éditorial publié le 3 septembre dans le renommé British Medical Journal dans lequel ils estiment qu’une part plus importante que ce que l'on croit de la population possède déjà cette immunité et nous rapprocherait d’une immunité collective.
Des tests sérologiques incomplets
Le débat autour de la part de la population immunisée nécessaire pour aboutir à l’immunité collective reste ouvert entre les scientifiques mais elle est estimée par l'OMS entre 60 et 70%. En France, bien qu’aucune étude n’ait été publiée sur le sujet, le Conseil scientifique a estimé, dans un avis publié le 27 juillet, à 4,4% la part de la population concernée lors de la première vague. Un chiffre qui a grimpé jusqu’à 10% dans certaines régions. Ce taux d’immunité est calculé grâce aux tests sérologique qui ont pour but de faire un diagnostic d’infection en contrôlant la présence d’anticorps spécifique au virus. Or, ces tests ne reflèteraient pas la réalité selon les chercheurs. “Les études séroépidémiologiques sous-estiment la véritable séroprévalence du SRAS-CoV-2 pour plusieurs raisons, estiment les auteurs. Sur les 24 tests de diagnostic sérologique que la FDA (Food Drug Administration, l’autorité de santé américaine, NDLR) a initialement autorisés pour une utilisation en urgence, six ne prennent en compte que le nucléocapside, y compris les tests à haut débit largement utilisés.”
L’autre problème des tests sérologiques est qu’ils ne recherchent que les anticorps IgC et IgM. Les chercheurs notent que les IgA jouent également un rôle prépondérant dans la réponse immunitaire. Ces anticorps sont surtout présents dans les muqueuses des voies respiratoires et pas de la sang, empêchant leur prise en compte et rendant les résultats des tests sérologiques incomplets. Une étude luxembourgeoise pré-publiée le 18 mai dans la revue medRxiv, donc pas encore acceptée par le comité de rédaction d’une revue scientifique, estime que 11% des personnes possèdent des anticorps IgA contre 1,9 % pour d’anticorps IgG.
L'immunité croisée, autre facteur
Enfin, autre argument qui plaide pour une immunité collective plus importante que prévue, selon les chercheurs : la réponse immunitaire varie selon les individus. Ceux qui sont atteints d’une forme grave du virus ne développent que très peu d’anticorps. En outre, une étude menée par des chercheurs espagnols et publiée dans la revue The Lancet le 6 juillet dernier a estimé que les anticorps disparaissent en quelques semaines chez les patients peu ou pas symptomatiques. En outre, la notion d’immunité croisée ajoute un nombre potentiellement important de personnes qui seraient déjà immunisé contre la Covid-19.
Ces données font envisager aux chercheurs qu’une immunité collective n’est pas loin. “Je suis tout à fait prêt à croire qu'il y a des zones à New York et à Londres qui ont déjà atteint une immunité substantielle”, a estimé Bill Hanage épidémiologiste de l'école de santé publique T.H. Chan de Harvard, au New York Times.