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Prix Breakthrough

Pourquoi l'instinct maternel n'existe pas

Par Amanda Breuer-Rivera

Le prix Breakthrough 2021 récompense la chercheuse franco-américaine Catherine Dulac pour son travail sur l'instinct parental. Retour sur ses recherches. 

Konoplytska/istock
Une chercheuse française installée aux États-Unis a été récompensée pour sa découverte sur le mécanisme de l'instinct parental chez les souris.
La directrice de recherche à Harvard a démontré qu'un groupe de neurones - aussi bien présent chez les souris de sexe féminin que masculin - provoque ce comportement.

Vingt-cinq ans que la chercheuse française Catherine Dulac s'est installée aux États-Unis comme neurobiologiste. Jeudi 10 septembre, elle a reçu le prix Breathrough - récompense créée en 2012 par des patrons de la Silicon valley - pour ses travaux sur l'instinct parental chez les souris. Son sujet d'étude, débuté en 2002, démontre que s'occuper de petits est dicté par des hormones. De ce fait, "l'instinct maternel" est tout aussi présent chez les souris mâles, à condition que les hormones déclenchent ce comportement.

Une découverte qui ne correspondait pas ce à quoi s'attendait la chercheuse à l'époque. "Ce qui nous fascinait, c'était de comprendre quelles sont les zones du cerveau, les neurones, les cellules qui contrôlent ce comportement, et essayer de déterminer s'il existe une différence entre le cerveau mâle et le cerveau femelle, explique la directrice de recherche à l'université d'Harvard sur les ondes de France culture. Donc nous avons effectué un certain nombre d'expériences et nous avons découvert de façon très précise les régions du cerveau, dans une zone qu'on appelle l'hypothalamus, et dans cette zone, le type de neurone très particulier qui est essentiel pour le comportement parental. La grande surprise, c'est que ces neurones existent à la fois dans le cerveau mâle et le cerveau femelle."

Instinct parental également partagé

Ainsi, souris mâles et femelles peuvent spontanément s'occuper de souriceaux, tout comme ils peuvent les tuer. Si les souris de sexe masculin ont tendance à se débarrasser des jeunes pour pouvoir s'accoupler avec les femelles, les chercheurs ont observé que l'instinct paternel apparaissait trois semaines après la reproduction. Cependant, la souris de sexe femelle peut aussi avoir un comportement infanticide sous le manque de nourriture, d'eau ou d'une trop grande pression de prédateurs.

Qu’en est-il des humains ? "On ne sait pas. Mais la région du cerveau dans laquelle ces neurones se trouvent, l'hypothalamus, est une région où il y a énormément de fonctions qui sont très conservées dans tous les vertébrés, en particulier chez les mammifères, explique Catherine Dulac. C'est la région qui contrôle la faim, la satiété, la soif, le sommeil, la reproduction, le comportement agressif, des tas de comportements qui sont conservés parmi les espèces. Est-ce que les neurones qui contrôlent l'instinct parental sont aussi conservés ? Je parie que oui, mais il va falloir faire des recherches pour le démontrer."

C'est bien le fait que cette découverte va à l'encontre du déterminisme des comportements selon le sexe qui a plu au jury du Breakthrough 2021. En plus de cette reconnaissance, la scientifique a reçu une dotation de 3 millions de dollars. Elle a déclaré à l'AFP qu'elle compte en donner une partie "à des causes liées à la santé et à l’éducation des femmes et des populations défavorisées."