- Des études précédentes ont montré que la grippe entraînerait une production plus élevée des récepteurs qui sont utilisés par le coronavirus pour s'ancrer aux cellules respiratoires humaines.
- Pour diminuer les effets de la grippe sur la transmission de coronavirus, les auteurs de l’étude plaident pour une vaccination antigrippale comme protection supplémentaire contre la Covid-19.
L’arrivée prochaine de l’hiver et de la grippe interroge les scientifiques alors que la pandémie de coronavirus continue de frapper les populations. Pour tenter de prédire les conséquences de cette collusion des deux virus, des scientifiques de l'Institut Max Planck de biologie des infections à Berlin et de l'Institut Pasteur de Paris ont utilisé un modèle mathématique pour étudier les premiers mois de la pandémie coronavirus en Europe. Il a permis de montrer que la diminution des cas de Covid-19 au printemps n'est pas uniquement liée aux mesures prises pour l’endiguer mais aussi à la fin de la saison grippale.
La grippe faciliterait l’infection à la Covid-19
Des études précédentes ont montré que la grippe entraînerait une production plus élevée des récepteurs qui sont utilisés par le coronavirus pour s'ancrer aux cellules respiratoires humaines. A partir de ce principe, la reprise de la saison grippale qui accompagnera les premiers jours de froid devrait multiplier par 2,5 la transmission de coronavirus, selon les outils de calcul des chercheurs.
Pour arriver à ce résultat, ils ont développé un modèle mathématique de transmission et de mortalité du coronavirus pour comprendre l'influence de la saison grippale sur la pandémie. La propagation du coronavirus au cours du premier semestre 2020 dans quatre pays européens, la Belgique, la Norvège, l’Italie et l’Espagne a ainsi été modélisée. Ont ensuite été intégrés plusieurs paramètres tels que le temps d’infection, la durée de transmission ou encore les mesures prises pour ralentir la propagation, comme la distanciation sociale ou le confinement. Les résultats de cette étude ont fait l’objet d’une pré-publication le 9 septembre sur medRxiv, qui doit encore fait l’objet d’un examen par d’autres chercheurs avant d’être publiés dans une revue spécialisée. “Ces estimations s’alignent sur des recherches antérieures”, a indiqué Matthieu Domenech de Cellès de l'Institut Max Planck et auteur principal de l’étude, à Reuters.
Grâce à la modélisation mathématique, les chercheurs ont testé différentes hypothèses sur les effets de la grippe sur la pandémie. Les résultats montrent qu’en période de co-circulation des deux virus, le grippe peut multiplier le taux de transmission du coronavirus par 2 voire 2,5. La comparaison de leur modèle avec les données sur les décès quotidiens dans les quatre pays leur a permis de démontrer que leur modèle est conforme à la mortalité observée.
Bientôt la twindemic
Pour diminuer les effets de la grippe sur la transmission de coronavirus, les auteurs de l’étude plaident pour une vaccination antigrippale comme protection supplémentaire contre la Covid-19. “En Italie, des taux plus élevés de vaccination contre la grippe ont été associés à des taux plus faibles de décès dus à la Covid-19, ajoute Matthieu Domenech de Cellès à Reuters. En outre, une étude américaine portant sur près de 11 700 personnes testées pour la Covid-19 a révélé que ceux qui avaient des vaccins contre la grippe étaient moins susceptibles d'avoir un test positif.”
La vaccination contre la grippe permettrait de soulager les hôpitaux et de contenir l'effet potentiel de la grippe sur la transmission du coronavirus. “Avant la prochaine ‘twindemic’ (la circulation simultanée du coronavirus et de la grippe, NDLR), nos résultats suggèrent la nécessité d’augmenter la vaccination contre la grippe”, estime le chercheur. En France, plusieurs voix s’élèvent pour rendre cette vaccination obligatoire. L’Académie de médecine souhaite “rendre obligatoire la vaccination antigrippale pour tous les soignants et les personnels sociaux en contact avec les personnes vulnérables, en particulier dans les EHPAD, les institutions, les hôpitaux et les crèches”, selon son communiqué en date du 13 mai dernier.