Désengorger les urgences, sans dissuader les Français de s'y rendre. Face à cette équation, les ministres de la Santé, Olivier Véran, et des Comptes publics, Olivier Dusspot, ont présenté le projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2021 (PLFSS) où figure une proposition : remplacer l'actuel ticket modérateur par un “forfait patient urgences” (FPU). Actuellement, le ticket modérateur payé par les usagers représente 20% du coût des soins — les 80% restants étant à la charge de la Sécurité sociale. Là, si ce projet de loi est adopté en l'état, la Sécurité sociale réglerait la totalité de l'addition à l'unique condition que la venue du patient aux urgences engendre une hospitalisation.
Un pari financier d'une autre nature pour les patients se dessine. Ceux dont la consultation aux urgences ne débouche pas sur une hospitalisation devront s'acquitter de ce FPU. Cette participation financière directe sera uniformément appliquée à tous les patients non hospitalisés, et son montant — pour l'instant inconnu — sera fixé par décret. “La mise en place d'un tel forfait permettra, pour le patient, de limiter les situations de reste à charge très élevé et d'améliorer la lisibilité des coûts de pris en charge et, pour les établissements, de simplifier la facturation et d'améliorer le recouvrement”, assure un communiqué des ministères. Seule exception : les patients bénéficiant actuellement d'un régime d'exonération de ticket modérateur — comme les patients atteints d'une affection de longue durée comme le diabète, les femmes enceintes dans leur dernier trimestre ou les titulaires d'une allocation supplémentaire du fonds de solidarité vieillesse — devront payer un montant minoré dont le prix reste pour l'heure inconnu.
La peau du ticket modérateur
Un moyen de limiter la bobologie aux urgences ? La Cour des comptes notait en 2019 que l'activité des urgences n'a pas cessé de croître entre 2012 et 2016. Selon les Sages de la rue Cambon, la principale raison de consultation était la traumatologie (36% des passages) où 20% débouchaient sur une hospitalisation. Or, comme le souligne le Cour, les Français sollicitent de plus en plus les urgences pour son côté pratique, c'est-à-dire une “préférence pour la présence sur un même lieu de l'ensemble des services, besoins de santé”, ainsi qu'une évolution des pratiques médicales “avec des examens complémentaires plus systématiques, absence croissante de médecins intervenant en dehors des horaires d'ouverture des cabinets”.
Des facteurs structurels donc. Cependant, la suppression totale du ticket modérateur a été, selon Les Échos, demandée par les professionnels lors du Ségur de la santé en juin dernier, notamment par le directoire de l'AP-HP (Assistance publique-Hôpitaux de Paris) qui réunit les représentants de la communauté médicale, les doyens des facultés de santé et les dirigeants du groupe. Ils assurent que ne plus facturer le reste à charge aux mutuelles permettrait de remplacer dans ce groupe 1 500 emplois administratifs par des postes de soignants. Ce n'est pas la voie choisie par le gouvernement. Ce projet de loi doit encore être débattu dans les deux hémicycles.