La scarlatine est une maladie infantile que l'on croyait reléguée dans les tréfonds de l'Histoire, pourtant des chercheurs australiens sonnent l'alerte suite à la multiplication des cas dans le monde ces dernières années. Selon ces scientifiques, cela serait dû à une nouvelle mutation bactérienne de la maladie. Dans leur étude publiée ce 6 octobre dans Nature, les analyses des cas de scarlatine en Chine continentale et à Hong-Kong montrent que cette résurgence n'est “ni spécifique du type EMM [facteur de virulence spécifique aux streptocoques, NDLR], ni causée par la propagation d'un seul clone producteur de scarlatine, assurent les scientifiques. Au lieu de cela, les souches d'éclosion de scarlatine multiclonale sont généralement associées à l'acquisition d'éléments génétiques mobiles porteurs d'exotoxines [toxine bactérienne diffusant dans le milieu ambiant, NDLR].” Ainsi, les chercheurs soupçonnent la scarlatine d'avoir muté et acquis via un ou des prophages [virus de bactérie incorporé dans le génome de la bactérie, NDLR] qui lui donne davantage de virulence. Une hypothèse qui reste encore à démontrer.
Mais l'épidémie semble déjà là. Plusieurs flambées régionales de scarlatine ont été recensées en Asie du Nord-Est en 2011 et au Royaume-Uni en 2014. Selon Ouest-France, le Public Health England, l'organisme de santé publique en Angleterre, a dénombré plus de 1 143 cas de scarlatine dans le Kent en 2018 contre seulement 362 en 2017. Un accroissement soudain et exponentiel. “Cette résurgence mondiale de la scarlatine a provoqué une multiplication par plus de 5 le taux de contamination et plus de 600 000 cas dans le monde”, assurent les auteurs de l'étude.
À l'aube d'une nouvelle pandémie de scarlatine
Cependant, les facteurs à l'origine de la résurgence de la maladie restent un mystère. “Les déclencheurs potentiels de ces nouvelles épidémies de scarlatine restent incertains, mais l'accumulation de preuves épidémiologiques indique que les nouveaux prophages [génome de virus bactérien inséré dans la bactérie, NDLR] et éléments de résistance aux antibiotiques ont joué un rôle important dans l'évolution, la virulence et la diversification de la scarlatine à l'origine des souches de SGA en Asie du Nord-Est” attestent les chercheurs australiens. Les chercheurs soupçonnent le superantigène responsable du “transport” de la bactérie streptocoque du groupe A (SGA) de lui avoir donné certaines de ses caractéristiques.
Comment la reconnaître ? La scarlatine provoque fièvre (38,5°C), angine et éruption cutanée. Souvent bénigne, elle s'exprime surtout chez les enfants entre 5 et 10 ans durant l'hiver. Il n'existe pas de vaccin et la scarlatine est contagieuse avant même l'apparition des symptômes. Selon le Sécurité sociale, un enfant a du mal à avaler, présente de la fièvre et un aspect caractéristique de la langue — d'abord recouverte d'un enduit blanc, qui ensuite se rétrécit au centre, puis prend une couleur framboisée — il faut se rendre chez le pédiatre afin de traiter l'enfant avec des antibiotiques afin de limiter la durée de contagion. Cependant, si l'enfant a une fièvre élevée (supérieure à 40°C), somnole, pleure de façon inexpliquée, des traces violacées sur la peau ou une dégradation générale de son état de santé, il faut l'emmener aux urgences. La scarlatine était l'une des principales causes de décès chez les enfants au début des années 1900, mais son incidence a diminué régulièrement au cours du 20e siècle. Il semble que cette flambée de scarlatine a été ralentie par les dispositifs de distanciation sociale mis en place pour lutter contre la Covid-19, une autre pandémie.