Les prises de position sur la cigarette électronique se suivent mais ne se ressemblent pas forcément. Alors que la Ligue nationale contre le Cancer se montre très réservée et souligne qu’ « aucune étude sérieuse n'a tranché sur les substances potentiellement nocives contenues dans la cigarette électronique », le Comité contre les maladies respiratoires et la Fondation du souffle viennent de prendre une position beaucoup plus favorable. Pour les pneumologues, la cigarette électronique peut être une alliée dans la lutte contre le tabac. Dans La lettre du souffle du mois d’août, la Fondation avance ses arguments.
Les dangers de la e-cigarette : « Très certainement moindres comparés à la toxicité majeure de la fumée de tabac (1) »
Pour l’Agence du médicament, concernant « le risque de toxicité des solvants utilisés dans les cigarettes électroniques, en particulier le propylène glycol, il est difficile de se prononcer en raison de l’absence de données qualitatives et quantitatives suffisantes. A ce jour, aucun effet indésirable ou cas d’intoxication en lien avec la présence de ces solvants dans les cigarettes électroniques n’a été rapporté. » Mais, l’ANSM recommande de ne pas consommer ce produit. Ce dernier point d’information date cependant de mai 2011.
Aujourd’hui, les preuves scientifiques attestant de l’innocuité du produit font toujours défaut. Des incertitudes persistent sur les effets à long terme des fortes inhalations, le contrôle qualité des produits n’est pas encore optimal. Mais, comme le confie le Dr Béatrice Lemaître, tabacologue au CHU de Caen et Sectretaire générale adjointe d’Alliance contre le tabac, à La lettre du souffle, « Même si des incertitudes persistent, les risques sont très certainement moindres en comparaison de la toxicité majeure de la fumée de tabac ». Et même le contrôle qualité s’est amélioré. Une étude sur les principales marques européennes de cigarettes électroniques vient de montrer que la plupart des produits sont de qualité pharmacologique. « La nicotine par exemple, n’a rien à voir avec celle qui était dans les cigarettes chinoises, indique le Pr Louis Jeannin, ancien chef de service de pneumologie du CHU de Dijon et président du comité contre les maladies respiratoires de Côte d’Or. Elle est de qualité semblable à celle que les laboratoires peuvent utiliser pour fabriquer des substituts nicotiniques. »
La e-cigarette pour arrêter de fumer : « Tout ce qui permet de diminuer la consommation de tabac est bon à prendre (1) ».
Là encore, le doute persiste. « Il faudra encore mener de nombreuses études pour savoir si la e-cigarette peut être considérée comme un traitement efficace de la dépendance tabagique », selon La Fondation du souffle. Certes, la première étude française donne « des résultats encourageants » puisque sur 100 fumeurs depuis plus de 10 ans qui ont testé la cigarette électronique, 8 patients avaient arrêté de fumer au bout de trois mois, et 45 avaient diminué leur tabagisme de plus de 50%. Mais il s’agit d’une observation sur un nombre limitée de personnes et la méthodologie est contestée. Il n’empêche… Pour le Pr Louis Jeannin, « tout ce qui permet de diminuer la consommation de tabac est de toute façon bon à prendre. C’est un outil de réduction des risques que nous ne pouvons pas ignorer ».
Un risque que la e-cigarette incite les jeunes à fumer : « Aucune étude ne permet de l'affirmer (1) ».
Pour le moment, le Comité contre les maladies respiratoires et la Fondation du souffle soulignent que les jeunes utilisateurs de cigarettes électroniques sont en grande majorité déjà fumeurs. Et ce jeune fumeur « va possiblement constater que dans le fond, en vapotant, ce n’est pas si difficile de diminuer : c’est donc autant de cigarettes qui ne seront pas fumées ». Les pneumologues citent une étude de mai 2013 sur 1400 enfants qui montre que 1% des non-fumeurs auraient utilisé une e-cigarette mais seulement une ou deux fois.
L' intérêt économique de la e-cigarette : « Un fumeur peut économiser 2400 euros par an (1)».
C’est oui, et à plusieurs titres, selon la Fondation du souffle. Une personne qui fume un paquet par jour pourrait économiser jusqu’à 2400 euros par an s’il passe à la cigarette électronique. L’assurance maladie pourrait bien, elle aussi, être gagnante « à court terme par la diminution des arrêts de travail à l’occasion des maladies saisonnières, plus sévères chez les fumeurs ; à long terme par celle des maladies chroniques graves liées au tabagisme ». Quant à l’Etat, qui empoche chaque année 15 milliards d’euros grâce au tabac, il pourrait lui aussi y trouver son compte en « prenant des mesures financières adaptées », estime La lettre du souffle.
(1) La Lettre du souffle (août 2013)