- Le pallidum ventral, une structure du cerveau dédiée aux émotions, contrôle aussi nos préférences alimentaires.
- En fonction de notre humeur et de notre niveau de déshydratation, notre cerveau sera plus ou moins influencé par de la nourriture.
- Il est possible de changer nos préférences alimentaires artificiellement, car elles fonctionnent sur le même principe qu'une addiction.
Qu’est-ce qui prédestine notre goût pour un aliment plutôt qu’un autre? D’aucuns parleraient de saveurs ou de textures appétissantes. Mais les chercheurs de l’université John Hopkins (Etats-Unis) s’appuieraient plutôt sur nos émotions et notre niveau de déshydratation. Dans leurs travaux publiés par la revue Science Advances le 4 novembre 2020, ils ont réussi à déterminer le rôle du pallidum ventral dans ce que nous aimons manger.
Humeur et soif, les deux moteurs de nos envies de nourriture
Pour leur recherche, les scientifiques se sont basés sur une découverte qu’ils ont fait il ya deux ans, selon laquelle l’activité neuronale du pallidum ventral, la partie chargée de gérer les émotions, est liée à nos préférences alimentaires.
En analysant des souris, les chercheurs ont démontré que cette région du cerveau actualise nos préférences alimentaires au fur et à mesure. De plus, ces conditions changent en fonction de notre humeur et de notre niveau de soif. C’est la raison pour laquelle certains aliments sont des madeleines de Proust, car ils évoquent une émotion ou un souvenir rattachée à une nourriture spécifique.
“Nous savions que le pallidum ventral est impliqué dans ce processus, rappelle Patricia Janak, autrice principale de l’étude et professeur de psychologie et de neuroscience à l’université John Hopkins. La manière exacte dont les neurones s'y prennent était encore un peu mystérieuse, surtout en temps réel, lorsque la meilleure décision à prendre maintenant peut changer en fonction de votre état.”
En manipulant cette région chez les souris, les chercheurs ont pu influencer leurs préférences alimentaires, notamment en ce qui concerne les récompenses. Pour cela, ils ont donné deux options à des souris qu’ils avaient au préalable assoiffées. En actionnant un premier levier, elles obtiennent de l’eau plate tandis que le second levier leur délivre de l’eau sucrée.
Des préférences changées artificiellement
“Au début, elles choisissaient l'eau plate quand elles avaient soif, indique David Ottenheimer, ancien doctorant de John Hopkins, passé depuis à l’université de Washington. A la fin du test, quand elles n'avaient plus soif, elles ont choisi l'eau sucrée, qui a un goût plus sucré.” Dans le même temps, l’équipe surveillait l’activité cérébrale des souris. Ils ont découverts que leurs neurones reflétaient les choix des rongeurs à chaque récompense. A mesure que les souris consommaient de l’eau sucrée, l’activité neuronale en faveur de l’eau diminuait, sûrement proportionnellement à l’envie d’étancher leur soif.
Sachant que le sucre a un fort pouvoir addictif et que cela pouvait fausser la première expérience, ils ont réitéré le même test, avec cette fois-ci de l’eau sucrée face à une saveur moins désirable pour les papilles. En manipulant artificiellement les neurones responsables du pallidum ventral, ils ont réussi à détourner les souris de l’eau sucrée.
“Nous émettons l'hypothèse que les neurones du pallidum ventral qui suivent nos préférences peuvent en fait être impliqués dans la formation des choix que nous faisons lorsque nous sommes confrontés à des décisions alimentaires”, explique David Ottenheimer. Sa collègue Patricia Janak poursuit sa pensée: “Ces mêmes circuits sont responsables des choix faits en matière d’addiction. Ainsi, les connaissances que nous acquérons ici peuvent nous aider à comprendre comment nous donnons la priorité à certaines drogues par rapport à d'autres récompenses.”