Les patients diabétiques pourront-ils bientôt contrôler leur production d’insuline ? Alors que le diabète de type 2 touche près de 3,3 millions de personnes en France, soit 5% de la population, de nouveaux travaux menés par des chercheurs de l'université du Wisconsin-Madison (États-Unis) laissent espérer l’exploration prochaine d’une nouvelle piste thérapeutique. Dans la revue Cell Metabolism, ils publient deux études dans lesquelles ils expliquent avoir identifié une enzyme jusqu’ici inconnue, la pyruvate kinase, capable de d’aider les cellules bêta du pancréas à détecter les niveaux de sucre et ainsi libérer la quantité d'insuline appropriée.
Une nouvelle enzyme clé
Le diabète de type 2 est une maladie chronique causée par un déficit d’insuline, une hormone produite par le pancréas et qui régule naturellement le taux de glucose dans le sang. Caractérisée par un taux anormalement élevé de sucre dans le sang, le diabète de type 2 est régulé par une modification des habitudes de vie, des contrôles glycémiques quotidiens et, le cas échéant, par une insulinothérapie.
La découverte faite par les chercheurs de l'université du Wisconsin-Madison pourrait toutefois aider à la mise au point d’un nouveau traitement qui stimulerait la production d’insuline.
Celle-ci serait faite par l’enzyme pyruvate kinase qui augmente non seulement la sécrétion d'insuline mais a d'autres effets de protection du métabolisme dans le foie, les muscles et les globules rouges. "Trop d'insuline peut faire baisser la glycémie à des niveaux dangereux, et trop peu d'insuline peut conduire au diabète, résume Matthew Merrins, professeur de médecine à l'école de médecine et de santé publique, qui a dirigé les travaux. La question que nous posons ici est la suivante : comment des nutriments comme le glucose et les acides aminés activent-ils les cellules bêta du pancréas pour qu'elles libèrent la quantité d'insuline nécessaire ?"
Une libération de la juste dose d’insuline
Pendant des décennies, les scientifiques ont cru c’étaient les les mitochondries, les générateurs d'énergie dans les cellules, qui initiaient la sécrétion d'insuline. Ils ont ensuite découvert que l’enzyme pyruvate kinase - qui convertit le sucre en énergie, indépendamment des mitochondries -, jouait aussi un rôle dans la production d’insuline par le pancréas.
Lors des premières expériences, les chercheurs ont fourni du sucre et de l'ADP, c’est-à-dire la molécule à basse énergie produite par les mitochondries, à des sections de cellules pancréatiques contenant de la pyruvate kinase. L'enzyme a alors englouti les deux composants, ce qui a épuisé l’ADP. Comme la pyruvate kinase était située près de la protéine de détection de l'ADP qui déclenche la sécrétion d'insuline, elle a eu un effet important. "C'est l'un des concepts importants de notre article : la localisation du métabolisme est essentielle à sa fonction", souligne le Pr Merrins.
Les chercheurs ont alors mené de nouvelles expériences qui utilisaient des îlots pancréatiques de souris et d'humains, les groupes de cellules qui libèrent l'insuline. En essayant de stimuler l'activité de la pyruvate kinase, ils sont parvenus à quadrupler la production d’insuline par les cellules pancréatiques. Mais seulement lorsqu’une condition était présente : quand il n’y avait plus de sucre. Pour les chercheurs, c’est le signe que l’enzyme pyruvate kinase ne peut pas être forcée à libérer trop d'insuline.
"La pyruvate kinase ne change pas la quantité de carburant qui entre dans la cellule, elle modifie simplement la façon dont ce carburant est utilisé, explique le Pr Merrins. Les médicaments qui activent la pyruvate kinase stimulent fortement la sécrétion d'insuline sans provoquer une trop grande libération d'insuline qui peut conduire à l'hypoglycémie."
Une nouvelle piste thérapeutique
Dans l'étude complémentaire, les chercheurs ont examiné comment les activateurs de la pyruvate kinase affectaient le métabolisme chez les rats sains et obèses. Dans une série d'expériences, ils ont découvert que l'activation de la pyruvate kinase augmentait à la fois la sécrétion d'insuline et la sensibilité à l'insuline tout en améliorant le métabolisme du sucre dans le foie et les globules rouges.
Selon les auteurs, ces traitements pourraient être Cettet ont par conséquent un métabolisme du sucre dysfonctionnel. "L'idée thérapeutique est de recâbler le métabolisme pour déclencher plus efficacement la sécrétion d'insuline tout en améliorant le fonctionnement des autres organes", conclut le Pr Merrins.