L’immunité progresse-t-elle plus vite que l’on ne pense ? Deux études récemment publiées dans de grandes revues scientifiques suggèrent que de nombreux enfants ont développé une immunité contre le virus sans y avoir été infecté. La première, parue le 6 novembre dans la revue Science, estime que 44% des enfants ont développé des anticorps efficaces contre la Covid-19 sans même avoir été infectés. Les chercheurs britanniques avancent que l’exposition à d’autres coronavirus ont conduit leur organisme à développer une réponse immunitaire efficace contre le nouveau coronavirus SARS-CoV-2. La seconde étude, présentée le 11 novembre dans la revue Nature Communications, affirme que certains enfants ont développé une réponse immunitaire suite à une exposition chronique au virus SARS-CoV-2 de leurs parents.
Les enfants mieux protégés que les adultes
L’exposition à d’autres coronavirus protégerait près d’un enfant sur deux contre une infection au nouveau coronavirus SARS-CoV-2. Des chercheurs britanniques ont mené une étude sur 302 personnes mineures, comparant les résultats sanguins de patients atteints du virus à ceux de volontaires qui ne l’ont pas attrapé. Ils ont constaté que 43,8% des enfants et adolescents de 1 à 16 ans qui n’ont pas contracté le virus sont porteurs d’anticorps IgG qui protègent contre une infection à la Covid-19.
Les chercheurs estiment que ces résultats sont importants dans le cadre de la lutte contre la pandémie. “Nos résultats montrent que les enfants sont beaucoup plus susceptibles de développer des anticorps à réaction croisée que les adultes, poursuit Kevin Ng, auteur de l’étude. Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour comprendre pourquoi, mais cela pourrait être dû au fait que les enfants sont plus régulièrement exposés à d’autres coronavirus.”
Ces recherches complémentaires doivent montrer, notamment, pourquoi les adultes qui auraient été exposé à d’autres coronavirus durant leur vie n’ont pas conservé les anticorps qui pourrait les protéger contre la Covid-19. Le Dr. Stephen J. Elledge, professeur de génétique à l'école de médecine de Harvard, a estimé au New York Times que ces anticorps et les cellules mémoires qui les accompagnent disparaissent avec le temps.
Pas d’infection mais des anticorps
La famille jouerait un rôle important dans la formation d’anticorps efficace contre la Covid-19 chez les enfants. Des chercheurs australiens du Murdoch Children's Research Institute (MCRI) ont montré que le contact continue auprès de leurs parents infectés par le virus ont conduit leur organisme à développer ces anticorps malgré des résultats négatifs au dépistage chez ces enfants. Les auteurs de l’étude ont examiné le profil immunitaire d'une famille de Melbourne de deux parents atteints de la Covid-19 avec des symptômes et de leurs trois enfants en âge d'aller à l'école primaire. Des échantillons de sang, de salive, de nez et de gorge, de selles et d'urine ont été prélevés dans la famille tous les 2-3 jours. Les chercheurs ont trouvé des anticorps spécifiques du SRAS-CoV-2 dans la salive de tous les membres de la famille et lors de tests sérologiques détaillés par rapport à des témoins sains.
“Le plus jeune enfant, qui n'a présenté aucun symptôme, a eu la réponse anticorps la plus forte, s’est étonnée la Dr Melanie Neeland du MCRI. Malgré la réponse des cellules immunitaires active chez tous les enfants, les taux de cytokines, messagers moléculaires dans le sang qui peuvent déclencher une réaction inflammatoire, sont restés faibles. Cela était cohérent avec leurs symptômes légers ou absents.”
Les chercheurs avancent que cette étude montre qu’une exposition chronique au virus pousse le système immunitaire des enfants à développer des systèmes de protection, en l’occurrence des anticorps, pour se prémunir contre une infection. “L'étude des réponses immunitaires au SRAS-CoV-2 dans tous les groupes d'âge est essentielle pour comprendre la sensibilité à la maladie, les différences de gravité et les vaccins candidats”, a conclu Nigel Craworf, professeur au MCRI.