Le passage des antidouleurs à l’héroïne n’est pas si rare. Selon un rapport des services de santé de l’administration américaine, le fait de consommer des antidouleurs sans raison médicale augmente les risques de devenir héroïnomane. Leur étude révèle que les Américains âgés de 12 à 49 ans qui avaient pris des antalgiques illégalement étaient 19 fois plus susceptibles d'avoir commencé à consommer de l'héroïne dans la dernière année que les autres personnes de ce groupe d'âge. En fait, près de 80% des nouveaux héroïnomanes étaient des consommateurs d’antalgiques. Et l’escalade peut être rapide puisque, toujours selon ce rapport, 3,6% des personnes devenaient addicts à l’héroïne dans les cinq ans.
« Les analgésiques sur ordonnance, lorsqu'ils sont utilisés conformément à leur prescription, peuvent être un avantage énorme pour les patients, mais leur usage non médical peuvent entraîner une dépendance, des lésions corporelles graves et même la mort », alerte le Dr Peter Delany, le directeur du centre sur les statistiques en matière de santé comportementale.
"L'abus d'analgésiques est une épidémie"
Si les autorités sanitaires américaines tirent la sonnette d’alarme, c’est parce qu’entre 2008 et 2011, le nombre de personnes dépendantes à l’héroïne a plus que doublé, passant de 179 000 à 369 000. Et la consommation d’antalgiques a suivi la même courbe. Entre 1999 et 2010, les CDC ont recensé près de 48.000 femmes décédées suite à l’utilisation abusive d’antidouleurs sur prescription. Chaque jour aux Etats Unis, les surdoses d'analgésiques opiacés sur ordonnance causent le décès de 18 femmes, soit plus de 6.600 morts pour la seule année 2010. Plus inquiétant encore pour les autorités américaines, cette surmortalité évitable a augmenté de plus de 400% chez les femmes depuis 1999, contre 265% chez les hommes. Pour les Centres fédéraux de contrôle et de prévention des maladies, l'abus des analgésiques opioïdes est devenu « une véritable épidémie ».
Les Français moins en danger que les Américains
En France, la consommation d'antidouleurs opiacés est sans doute moins forte, notamment parce que leur accès est nettement plus restreint. L’étude DRAMES (Décès en Relation avec l’Abus de Médicaments et de Substances) faisait état en 2010 de 376 décès, dus à des overdoses par héroïne, traitements de substitutions aux opiacés et médicaments contre la douleur. Mais nous ne disposons malheureusement d'aucune donnée précise et exhaustive sur ce phénomène.