Plus le temps passe et plus les effets néfastes de la combustion du bois pour notre santé s’empilent. Déjà connu pour sa nocivité dans le chauffage, le bois est également mauvais pour cuire des aliments. Dans son congrès annuel, la Radiological Society of North America (RSNA) a dévoilé une étude sur les risques de la cuisine au bois pour nos poumons.
Un mode de combustion encore utilisé par presque un Terrien sur deux
Dans le monde, environ 3 milliards de personnes cuisinent avec de la biomasse, comme du bois ou des broussailles séchées. Ce mode de cuisson est majoritairement utilisé en Afrique subsaharienne et en Asie, même si les populations occidentales ne sont pas en reste lorsqu'elles font des barbecues. Les polluants issus de la combustion de la biomasse contribuent largement aux quelque 4 millions de décès annuels dus à des maladies liées à la pollution de l'air domestique.
Alors que les initiatives de santé publique menées par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ont tenté de soutenir la transition des combustibles de la biomasse vers le gaz, qui brûle plus proprement, un nombre important de foyers continuent d'utiliser du bois pour cuisiner. Facile d’accès et peu coûteux, les contraintes financières et la réticence à changer les habitudes établies sont des facteurs qui jouent en faveur du bois, surtout lorsqu’il est combiné avec un manque d'informations sur les répercussions de sa fumée sur la santé des poumons.
Pour en comprendre les conséquences désastreuses sur la santé humaine, les chercheurs ont étudié l’influence des polluants des fourneaux chez 23 personnes cuisinant avec du gaz de pétrole liquéfié ou du bois à Thanjavur, en Inde. Les recherches se sont faites en équipe multidisciplinaire dirigée de l'université de l’Iowa (Etats-Unis), en collaboration avec des chercheurs de l'Institut des sciences et technologies Periyar Maniammai (Inde).
De l’air piégé dans les poumons
Les chercheurs ont mesuré les concentrations de polluants dans les foyers et ont ensuite étudié la fonction pulmonaire des participants, en utilisant des tests traditionnels tels que la spirométrie. Ils ont également eu recours à l'imagerie par tomodensitométrie avancée pour effectuer des mesures quantitatives. Par exemple, cela leur a permis de voir ce qu’une personne inhalait ainsi que ce qu’elle expirait. Ils ont pu mesurer la différence entre les images pour voir comment le fonctionnement des poumons.
Les résultats ont montré que les personnes qui cuisinaient avec du bois étaient exposées à des concentrations plus importantes de polluants et d'endotoxines bactériennes que les utilisateurs de la cuisson à gaz. Ils avaient également un niveau de piégeage de l'air nettement plus élevé dans leurs poumons, une condition associée aux maladies pulmonaires.
“Le piégeage de l'air se produit lorsqu'une partie du poumon est incapable d'échanger efficacement l'air avec l'environnement, de sorte que la prochaine fois que vous inspirez, vous n'apportez pas assez d'oxygène dans cette région et vous éliminez le dioxyde de carbone”, indique Abhilash Kizhakke Puliyakote, chercheur en médecine à l’université de Californie à San Diego.
Des dégâts massifs qui n’impliquent pas forcément de douleurs
Chez un sous-ensemble d'utilisateurs de bois, les chercheurs ont trouvé des niveaux très élevés de piégeage de l'air et une mécanique tissulaire anormale, même en comparaison avec d'autres utilisateurs de bois. Dans environ un tiers du groupe, plus de 50 % de l'air qu'ils inhalaient se retrouvait piégé dans leurs poumons.
“Une telle sensibilité accrue dans un sous-groupe est également observée dans d'autres études chez les fumeurs de tabac, et il pourrait y avoir une base génétique qui prédispose certaines personnes à être plus sensibles”, souligne Abhilash Kizhakke Puliyakote.
Les résultats de l'étude soulignent l'importance de réduire au minimum l'exposition à la fumée. Même sans avoir de symptômes ou de difficultés respiratoires, le poumon peut présenter des lésions et une inflammation qui peuvent passer inaperçues et potentiellement non résolues chez certaines personnes. Dans leur conclusion, les chercheurs précisent que cette étude, qui s’est basée sur la cuisson domestique, peut être extrapolée pour englober d’autres sources d’exposition aux fumées du bois, comme dans les deux de forêt.