La recherche sur Alzheimer avance et de nouvelles découvertes pourraient permettre d’avancer le diagnostic et faire bénéficier les patients d’une meilleure prise en charge. La première concerne le développement d’un test sanguin qui, en mesurant les niveaux de deux molécules dans le sang, permet de prédire une progression d’Alzheimer chez des patients avec une déficience cognitive légère. La deuxième est moins conventionnelle. Des chercheurs américains se sont rendus compte que les personnes diagnostiquées avec une démence sont plus susceptibles de manquer le paiement de leurs factures six ans avant ce dépistage.
88% d’efficacité
Le développement de tests sanguins pour dépister Alzheimer fait l’objet de plusieurs recherches ces dernières années. Plusieurs études ont mis en avant la possibilité d’utiliser cette méthode pour diagnostiquer la maladie. Cela se confirme avec la publication de travaux de chercheurs britanniques et suédois le 30 novembre dans la revue Nature Aging. Grâce à l’analyse de la concentration des molécules ptau 181 et NfL dans le sang, les scientifiques estiment être capables de prédire la future progression de la maladie chez des individus qui ne présentent qu’une légère déficience cognitive. Cela confirme une précédente étude récente, parue le 28 juillet dernier dans le The Journal of the American Medical Association (JAMA), qui affirme que l’analyse sanguine est efficace pour poser un diagnostic. Les chercheurs ont avancé qu’une accumulation anormale de la protéine phospho-tau217 est un signe annonciateur de la maladie.
Dans cette nouvelle étude, les chercheurs ont examiné les données de 570 patients sur lesquels le test sanguin a pu prédire avec une efficacité de 88% le développement d'Alzheimer chez les patients sur une période de quatre ans. “Si ces marqueurs sanguins peuvent prédire la survenue d'Alzheimer dans des groupes plus importants et plus hétérogènes, nous pourrions assister à une révolution”, estime Richard Oakley, responsable de la recherche au sein de l'organisation caritative Alzheimer's Society. “Ces résultats doivent être confirmés mais dans le contexte d'autres travaux récents, cela pourrait être un pas important vers un diagnostic plus précoce, ainsi que vers l'expérimentation de nouveaux traitements à un stade moins avancé de la maladie”, abonde Musaid Husain, professeur de neurologie à l'université d'Oxford.
Des “symptômes” financiers
En attendant qu’un tel test soit disponible, s’intéresser aux retards de paiement de certaines factures pourrait donner une idée de qui est le plus susceptible de développer la maladie. Ces “symptômes” financiers ont été rapportés par des chercheurs américains de la Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health et du Federal Reserve Board of Governors et ont été présentés dans le 30 novembre dans le JAMA Internal Medicine. Ils ont découvert que les patients diagnostiqués avec la pathologie ont observé des manques dans le paiement de leurs factures Medicare, le système de santé américain, six avant le diagnostic d’Alzheimer. Une période qui s’étend à 7 ans chez ceux qui ont un niveau scolaire inférieur.
Les paiements manquants sur les factures courantes pourraient palier l’absence de dépistage précoce d’Alzheimer. “Actuellement, il n'existe aucun traitement efficace pour retarder ou inverser les symptômes de la démence, confirme Lauren Hersch Nicholas, professeur agrégé au Département de la politique et de la gestion de la santé de la Bloomberg School et auteur principal de l’étude. Cependant, un dépistage plus précoce, associé à des informations sur le risque d'événements financiers irréversibles, comme la saisie et la reprise de possession, sont importants pour protéger le bien-être financier du patient et de sa famille.”
Aucun retard de paiement lié à d’autres maladies
L'analyse a révélé que le risque élevé de retard de paiement lié à la démence représente 5,2% des impayés parmi les six années précédant le diagnostic, atteignant un maximum de 17,9% neuf mois après le diagnostic. Les taux élevés de retard de paiement ont persisté jusqu'à 3,5 ans après que les patients aient reçu leur diagnostic, ce qui suggère un besoin continu d'aide pour gérer l'argent. Pour arriver à ces résultats, les chercheurs ont analysé les informations sur 81 364 bénéficiaires de Medicare vivant dans des ménages d'une seule personne dont 54 062 n’ont jamais reçu de diagnostic de démence entre 1999 et 2014 et 27 302 ont eu un diagnostic de démence au cours de la même période.
Pour déterminer si les symptômes financiers observés sont propres à la démence, les chercheurs ont comparé les résultats financiers des paiements manqués à d'autres problèmes de santé, notamment l'arthrite, le glaucome, les crises cardiaques et les fractures de la hanche. Ils n'ont trouvé aucune association entre une augmentation des défauts de paiements avant un diagnostic d'arthrite, de glaucome ou de fracture de la hanche. “Nous ne voyons pas le même schéma avec d'autres problèmes de santé, poursuit Lauren Hersch Nicholas. La démence était la seule condition médicale pour laquelle nous avons constaté des symptômes financiers constants, en particulier la longue période de détérioration des résultats avant la reconnaissance clinique. Notre étude est la première à fournir des preuves quantitatives à grande échelle de l'adage médical selon lequel le premier endroit à rechercher pour la démence est dans le chéquier.”