L’avènement des ciseaux génétiques a été une grande avancée pour le monde la recherche. Cette technique d’édition génétique permet de découper certaines séquences d’un génome pour la remplacer par une autre. Cet outil, inventé par la Française Emmanuelle Charpentier et l’Américaine Jennifer Doudna, a même reçu en 2020 le prix Nobel de chimie. Et un nouveau système efficace pour traiter les cancers métastatiques grâce aux ciseaux génétiques a été découvert par des chercheurs de l’université de Tel-Aviv (Israël). Les résultats de cette étude sont parus le 18 novembre 2020 dans la revue Science Advances.
Découper la partie cancéreuse avant qu’elle ne se réplique
L’idée derrière leur découverte consiste à ôter la partie cancéreuse d’une cellule pour éviter sa propagation. “C'est la première étude au monde qui prouve que le système d'édition du génome CRISPR peut être utilisé pour traiter efficacement le cancer chez un animal vivant, indique Dan Peer, chef du laboratoire de nanomédecine de précision à l'école Shmunis de biomédecine et de recherche sur le cancer de l'université de Taïwan. Il faut souligner qu'il ne s'agit pas d'une chimiothérapie. Il n'y a pas d'effets secondaires, et une cellule cancéreuse traitée de cette manière ne redeviendra jamais active. Les ciseaux moléculaires de Cas9 coupent l'ADN de la cellule cancéreuse, la neutralisant ainsi et empêchant définitivement sa réplication.”
L’étude a conduit les chercheurs à s’intéresser aux deux cancers les plus mortels, à savoir le glioblastome et le cancer métastatique des ovaires. Le glioblastome est le type de cancer du cerveau le plus commun et le plus agressif, avec une espérance de vie de 15 mois après le diagnostic et un taux de survie à cinq ans de seulement 3%. Grâce à un traitement avec CRISPR et des nanoparticules de lipides (LNP) contenue dans Cas9, la combinaison CRISPR-LNP a doublé l'espérance de vie moyenne des souris atteintes de glioblastomes, améliorant leur taux de survie global d'environ 30%.
Des taux de survie bien supérieurs
Concernant le cancer des ovaires métastatique, qui représente une cause majeure de décès chez les femmes et le cancer le plus mortel du système reproductif féminin, le traitement par CRISPR-LNP chez des souris atteintes d'un cancer ovarien métastatique a augmenté leur taux de survie global de 80%.
“La technologie d'édition du génome CRISPR, capable d'identifier et de modifier n'importe quel segment génétique, a révolutionné notre capacité à perturber, réparer ou même remplacer des gènes de manière personnalisée, souligne Dan Peer. Malgré son utilisation intensive dans la recherche, la mise en œuvre clinique n'en est qu'à ses débuts car il faut un système de livraison efficace pour acheminer le CRISPR de manière sûre et précise vers ses cellules cibles. Le système de livraison que nous avons développé cible l'ADN responsable de la survie des cellules cancéreuses. Il s'agit d'un traitement innovant pour les cancers agressifs qui n'ont pas de traitement efficace à l'heure actuelle.”
Selon les chercheurs, si des résultats concluants ont pu être obtenus sur deux cancers particulièrement agressifs, de nouvelles possibilités pourraient voir le jour prochainement. Grâce aux ciseaux génétiques, il sera bientôt possible de traiter d'autres types de cancer ainsi que des maladies génétiques rares et des maladies virales chroniques comme le Sida.