Tous les moyens sont bons contre la Covid-19. En ce sens, douze professeurs de médecine ont publié une tribune dans le journal Le Monde pour réclamer l’autorisation de l’immunothérapie pour soigner la Covid-19 chez les patients les plus âgés. “Actuellement, ces patients n’ont accès à aucun traitement spécifique et sont suivis à domicile par leur médecin, puis hospitalisés en cas d’aggravation. De nouveaux traitements bloquant l’entrée du virus dans les cellules viennent de montrer leur capacité à diviser par trois le risque d’hospitalisation dans deux études randomisées en double aveugle contre placebo qui ont inclus plus de 1 000 patients”, plaident-ils.
Des anticorps efficaces
Les traitements mis en avant par les professeurs de médecine reposent sur l’immunothérapie passive. “Comme pour d’autres infections, telles que le tétanos ou la rage, elle consiste à apporter rapidement au patient infecté des anticorps qui persistent quelques semaines environ, afin de guérir l’infection, précisent-ils. La perfusion de plasma de patients convalescents et hyperimmunisés contre le virus SARS-CoV-2 est un exemple d’immunothérapie passive.” La sérothérapie, soit la transfusion de plasma sanguin de patients guéris de la Covid-19 à des patients hospitalisés dans un état grave n’a montré qu’une efficacité limitée. “Ce traitement nécessite une logistique complexe, n’est pas exempt de risque infectieux, varie d’un plasma à l’autre en efficacité, et n’est pas adapté à un traitement à grande échelle en pleine pandémie”, poursuivent les professeurs de médecine.
Les professeurs de médecine insistent sur les médicaments qui stimulent les anticorps capables de bloquer l’entrée du virus dans les cellules : les lymphocytes. Les médicaments visés sont le bamlanivimab, le casirivimab et l’imdévimab. “Pour le bamlanivimab, 309 patients ont reçu une administration unique de cet anticorps à différentes doses, et 143 patients le placebo, rappellent-ils. La perfusion de cet anticorps a été réalisée chez des patients présentant des symptômes de la maladie, ne nécessitant pas d’hospitalisation, au maximum trois jours après un test positif pour le SARS-CoV-2. Le critère principal de l’étude – la diminution de la charge virale au onzième jour – a été atteint avec l’une des trois doses. Chacune d’entre elles a permis une diminution du risque d’hospitalisation avec, chez les patients à risque de forme sévère (environ 70 % des patients inclus dans l’étude), un risque d’hospitalisation de 4 % sous bamlanivimab et de 15 % sous placebo. Aucun patient sous bamlanivimab n’a été hospitalisé en réanimation. Et la tolérance du traitement a été très satisfaisante.” Les résultats de l’étude sont parus le 28 octobre dans le New England Journal of Medicine. Pour les deux autres médicaments, les résultats n’ont pas encore été publiés mais l’Agence américaine des médicaments (FDA) a indiqué que la charge virale a diminué plus rapidement chez les patients qui ont pris le traitement.
Accélérer le calendrier
Ces anticorps pourraient être un complément aux vaccins. “Les patients âgés et fragiles ne sont pas nécessairement ceux qui produiront le plus d’anticorps en réponse à la vaccination, et ces anticorps pourraient rester précieux en cas d’infections des sujets à haut risque de forme sévère – les résidents des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes par exemple, ou les patients ayant eu une transplantation d’organe”, estiment-ils. Aux États-Unis, ces deux anticorps ont reçu une autorisation exceptionnelle d’utilisation que sont également entrain de délivrer certains pays européens.
Les médecins s’attendent maintenant à ce que les autorités françaises concernées se positionnent et plaident pour une autorisation. “Il faut maintenant espérer que les autorités françaises sauront trouver un cadre pour permettre, dès les prochains jours, l’accès de ces anticorps aux patients à risque de forme sévère, tout en continuant l’étude de leur tolérance et de leur efficacité, et l’évaluation du rapport coût/bénéfice, insistent-ils. La situation sanitaire justifie une accélération du calendrier.”
“En plus de ‘dépister-tracer-’, nous avons enfin la possibilité de traiter les patients âgés et les plus fragiles pour éviter leur hospitalisation prolongée et le risque de complications sévères. L’accès à ces traitements, dont certains sont fabriqués en France, permettrait également de diminuer le risque de saturation de l’hôpital. Ne passons pas à côté de cette chance !”, concluent-ils.