- L'efficacité à 70% du vaccin contre la Covid-19 d'AstraZeneca est confirmée par la revue scientifique The Lancet, une première.
- Les vaccins subissent assez de tests de la part des laboratoires, des agences de sûreté du médicament et de la part de la communauté scientifique pour être reconnus somme sûrs et efficaces.
C’est une confirmation qui a un poids. Même si l'affaire dite de la "chloroquine" a pu semer le trouble sur sa crédibilité, la revue scientifique The Lancet est la première à valider un vaccin contre la Covid-19. Dans son étude, elle confirme les résultats d’efficacité à 70% du vaccin développé par la société AstraZeneca et l’université d’Oxford (Royaume-Uni), conformément aux résultats avancés par le groupe pharmaceutique le 23 novembre.
Le vaccin proposé par AstraZeneca est l’un des plus avancés au monde, avec celui du laboratoire américain Moderna et de l’alliance américano-allemande Pfizer/BioNTech, qui est actuellement au cœur de la campagne de vaccination britannique qui a débuté hier. Pour l’instant, les données fournies par les deux laboratoires font état d’une efficacité de respectivement 94,1% et 95%. Toutefois, les données détaillées de ces vaccins n’ont pas été dévoilées dans les revues scientifiques, chargées d’authentifier ces chiffres.
Bientôt le feu vert des agences de sûreté du médicament
Des demandes ont toutefois été faites auprès des différentes agences du médicament pour qu’elles examinent et autorisent leur mise sur le marché. C’est sur cette base que le Royaume-Uni a décidé de procéder aux premières vaccinations, et que la Food and Drug Administration (FDA) américaine, l’équivalent de notre Agence nationale de sûreté du médicament, affirme ne pas voir de problème majeur dans ces vaccins malgré quelques effets secondaires dans le vaccin à ARN messager proposé par Pfizer/BioNTech.Cependant, dès le début de cette campagne, les autorités sanitaires britanniques ont dû diffuser une mise en garde à destination des personnes ayant des antécédents de réactions allergiques importantes en recommandant de "ne pas les vacciner": deux personnes ont en effet été victimes de mauvaises réations après avoir reçu la première injection du vaccin Pfizer-BioNTech, toutes les deux étant habituellement déjà sujettes à des manifestations allergiques "au point de garder toujours de l'adrénaline - le remède essentiel aux chocs anaphylactiques, NDLR- sur elles".
L'inconnue des vaccins à ARN messager
L’acide ribonucléique messager, ou ARN messager, est une copie temporaire d’une section de notre ADN, le code génétique de toutes nos cellules. Un brin d’ARN messager contient toutes les instructions d’assemblage pour permettre à une cellule de créer une protéine. Dans le cas du vaccin proposé par Pfizer et BioNTech, l’ARN messager qui sera injecté dans le corps aura pour mission d’indiquer aux cellules quelles sont les protéines qu’elles doivent synthétiser pour se défendre face au coronavirus.
L’intérêt derrière la validation scientifique réside dans l’examen des résultats, qui seront déterminants afin de connaître plus précisément la sûreté et l’efficacité de ce vaccin. Pour l’heure, seul le vaccin de Pfizer/BioNTech présente des effets secondaires. Dans les premiers éléments d’analyse transmis par la FDA, des douleurs au bras, de la fatigue, des maux de tête, des frissons, des courbatures voire de la fièvre peuvent être observées chez les personnes qui ont reçu le vaccin américano-allemand. Si les effets de ce vaccin à ARN messager peuvent être contraignants, ils ne le sont cependant pas assez pour éviter sa commercialisation.
Une efficacité mais un manque de recul
“Il y a des incertitudes sur les premières lignes, qui sont liées au fait que pour les vaccins à ARN messager, celui de Pfizer comme celui de Moderna, nous n’avons pas d’antériorités vaccinales -c'est la première fois que ce type de vaccin est utilisé sur l'homme, NDLR- avec ce type de molécules, souligne le professeur Gilles Pialoux, chef du service des maladies infectieuses à l’hôpital Tenon, à Paris. Toutefois, il y a une antériorité thérapeutique, notamment avec des maladies orphelines, donc on n’est pas totalement vierge d’informations mais on manque évidemment de recul.”
Ce manque de recul est dû à la rapidité de mise au point du vaccin, qui a atteint la phase III des essais cliniques en moins de six mois, quand il faut plusieurs années, cinq en moyenne, pour d’autres vaccins. Compte tenu de la situation pandémique de la maladie, il fallait faire au plus vite. Ainsi, alors que la plupart des essais cliniques ont débuté cet été, les effets à long terme ne peuvent être connus à cause de la rapidité du processus.
Néanmoins, même si ces nouveaux vaccins peuvent causer de l’inquiétude au sein de la population, l’efficacité démontrée lors des essais cliniques, les tests effectués par les agences de sûreté du médicament et les études réalisées par la communauté scientifique sont autant de garde-fou qui attestent de leur validité.
Avec toutes ces étapes, l’innocuité des futurs vaccins, qu’ils proviennent de Pfizer/BioNtech, Moderna ou AstraZeneca semble à priori assurée, car la balance bénéfice/risque penche en faveur du vaccin, malgré certains effets négatifs qui peuvent être gênants au départ. Toutefois, comme le souligne Gilles Pialoux, cela sera compliqué pour le personnel médical de faire comprendre les bienfaits de ce vaccin à une population qui peut être réticente, à plus forte raison quand les conseillers ne sont pas les payeurs. “Je trouve hallucinant que le programme français n’ait pas mis les soignants en première ligne comme l’ont fait les CDC [Centers for Disease Control and Prevention, l’équivalent américain de nos Agences régionales de santé, NDLR] ou comme l’ont fait les Britanniques, ça c’est une zone d’ombre. Il va falloir attendre pour les soignants, mais je pense qu'ils vont avoir du mal à convaincre de se vacciner, je pense notamment aux médecins, alors qu’ils ne sont pas en première ligne.”
En effet, dans son calendrier vaccinal, le gouvernement n’a pas prévu de vacciner en priorité le personnel de santé lors de la première phase de vaccination qui débutera en janvier. Celle-ci sera réservée aux personnes âgées, aux malades chroniques ainsi qu’aux séniors en Ehpad. Les professionnels de santé, qui sont pourtant en première ligne, ne recevront le vaccin que dans la deuxième et la troisième phase, en fonction de leur âge et de leur état de santé.