- Dans ses nouvelles recommandations, la Société Européenne de Cardiologie a précisé quand était indiquée l'ablation atriale : en cas d'échec du traitement par antiarythmiques, lorsque la fibrillation est paroxystique ou persistante
- Elle peut aussi être recommandée en première intention chez les patients souffrant en plus d'insuffisance cardiaque
- Pour les patients âgés, l'ablation peut être recommandée si les risques de récidive sont maîtrisés
Trouble du rythme cardiaque le plus fréquent chez l’adulte de plus de 40 ans, la fibrillation atriale esT une perturbation du rythme cardiaque qui correspond à une action non coordonnée des cellules du muscle de la paroi des oreillettes, en raison d’un défaut de la conduction de l’influx électrique qui coordonne normalement ces contractions. Ceci abouti à des contractions rapides et irrégulières des oreillettes du cœur qui doivent assurer la circulation sanguine. En cas de fibrillation atriale, celles-ci dernières ne parviennent plus à évacuer correctement le sang vers les ventricules cardiaques, ce qui peut provoquer hémorragies, embolies ou accident vasculaire cérébral (AVC).
Lorsqu’elle est diagnostiquée, la fibrillation auriculaire peut être prise en charge de multiples façons : les anticoagulants, les défibrillateurs et la chirurgie ablative ont leur place dans la gestion de cette maladie. En août dernier, le congrès de l’European Society of Cardiology (ESC) ont donné de nouvelles recommandations dans la prise en charge de la fibrillation atriale, comme nous le confirme Jérôme Taieb, cardiologue au Centre hospitalier d’Aix-en-Provence. "Les lignes ont bougé suite aux recommandations de l’ESC 2020. Il a été précisé une nouvelle place de l’ablation dans la fibrillation auriculaire. Une technique invasive qui a pour but d’arrêter ou de ralentir la progression de cette maladie."
Comme le rappelle le Pr Taieb, les recommandations de l’ESC 2020 ont insisté sur la nécessité de discuter avec le patient de l’intérêt de l’intervention et des risques associés, et de l’intérêt de contrôler les facteurs de risque : hypertension, surpoids, apnée du sommeil…
Que dire de ces nouvelles indications de l’ablation ?
L’indication de l’ablation intervient généralement après l’échec du traitement par antiarythmiques. "Les classes 1 et 3, précise le Pr Taieb. C’est-à-dire ceux qui peuvent agir sur les oreillettes. La place des bêtabloquants est moins importante." Cette ablation auriculaire concerne la fibrillation paroxystique et la fibrillation auriculaire persistante, y compris celle avec facteur de risque de récidive. Elle n’est par ailleurs envisagée que lorsque la fibrillation auriculaire est symptomatique.
Il peut aussi arriver que l’ablation soit prescrite en première intention, dans des cas paroxystiques spécifiques, et toujours en ayant discuté avec les patients au préalable. Dans les cas de fibrillation auriculaire couplée à de l’insuffisance cardiaque, une récente étude a démontré l’intérêt "de récupérer cette oreillette pour permettre à la pompe de fonctionner chez les patients insuffisants cardiaques".
L’âge du patient est-il déterminant dans la prise en charge ?
"Après 80 ans, 10 % de la population est concernée par la fibrillation auriculaire, souligne le Pr Taieb. Plus on avance dans l’âge, plus ce trouble est susceptible de survenir. Je rappelle aussi que c’est le premier des troubles du rythme cardiaque" en termes de fréquence.
Pour autant, les nouvelles recommandations de l’ESC ne s’attardent pas spécifiquement sur les cas des patients âgés. "Elles précisent en revanche qu’il y a des patients avec des risques de récidive, et que dans ces sur-risques, il y a l’âge. L’ancienneté de la fibrillation auriculaire est aussi évoquée : une ancienne FA a plus de risque de récidiver après une ablation, détaille le cardiologue. Donc c’est vrai que le patient idéal pour l’ablation atriale est un patient pas trop âgé, avec un cœur pas trop malade et une fibrillation pas trop ancienne."
La stratégie pour le patient âgé sera moins invasive avec l’utilisation notamment de l’amiodarone. "C’est un médicament qu’on a beaucoup en initial, mais pour le long terme, on sait qu’il y a un effet cumulatif, qu’on craint un peu moins avec un patient âgé. Si on considère les autres antiarythmiques, la flécaïnide est contre-indiqué en cas d’insuffisance cardiaque ou de cardiopathie ischémique, ce qui est fréquent chez les sujets âgés. C’est donc un médicament plus difficile à manier que l’amiodarne."
Il peut aussi arriver qu’un patient souffre de la maladie de l’oreillette, aussi appelée syndrome brady-tachycardie. Dans ce cas, les recommandations de l’ESC 2020 ont précisé qu’il peut être indiqué de pratiquer l’ablation atriale avant de considérer la pose d’un stimulateur cardiaque. Mais chez les patients âgés, la pose d’un stimulateur cardiaque est privilégiée.
"Chez les patients âgés, on peut aussi adopter une stratégie de contrôle de fréquence avec des médicaments ralentisseurs comme les bêta-bloquants, les anti-calciques, la digoxine en tenant compte de l’insuffisance rénale. Et, en dernier recours, on peut considérer l’ablation auriculo-ventriculaire" avec la mise en place d’un stimulateur cardiaque", poursuit le Pr Taieb, qui précise que cette ablation "n’a rien à voir avec l’ablation atriale et présente des risques immédiats quasi-nuls".
Enfin, chez les personnes âgées, le choc électrique peut être une alternative à l’ablation pour redonner une certaine fonctionnalité à l’oreillette.