- Les tests cognitifs ne permettent pas d'identifier tous les symptômes de la TDAH
- Un modèle mathématique éclairant sur la prise de décision pourrait améliorer la prise en charge des enfants touchés par ce trouble
Le Trouble Déficit de l’Attention/Hyperactivité (TDAH) est un trouble neurodéveloppemental. Il se manifeste par de l’inattention, de l’impulsivité et de l’hyperactivité. Ainsi, les patients ou souvent du mal à se concentrer, à rester à leur place ou attendre leur tour, ce qui peut entraîner de grosses difficultés au niveau de l’apprentissage. Comme pour la plupart des troubles mentaux, cette affliction et diagnostiquée et traitée sur la base d’entretiens cliniques et de questionnaires. Dans le cas de cette maladie, des tests cognitifs sont utilisés pour identifier les symptômes. Mais le plus souvent, ces tests ne permettent pas de saisir la complexité de ces derniers. D’après une nouvelle étude américaine parue dans le Psychological Bulletin, l’avènement de la psychiatrie computationnelle qui compare un modèle simulé par ordinateur de processus cérébraux normaux à des processus dysfonctionnels observés dans des tests pourrait compléter avec succès le processus de diagnostic. A terme, cela pourrait aider à mieux évaluer la présence et la gravité des problèmes de comportements chez les enfants concernés espèrent les chercheurs de l'Université de l'État de l'Ohio (Etats-Unis).
Pour en arriver à cette conclusion, ils ont examiné 50 études de tests cognitifs pour le TDAH. Ces derniers partaient du principe que les enfants atteints de cette maladie mettent plus de temps que les autres à prendre des décisions quand ils accomplissent des tâches et s’appuyaient sur le temps de réponse moyen pour expliquer la différence.
"Dans notre étude, nous montrons que cette méthode présente de multiples problèmes qui nous empêchent de comprendre les caractéristiques sous-jacentes d'un trouble de santé mentale tel que le TDAH, et qui nous empêchent également de trouver le meilleur traitement pour différents individus", commente Nadja Ging-Jehli, auteure principale de l'étude et étudiante diplômée en psychologie dans l'État de l'Ohio.
"Les symptômes sont difficiles à mesurer avec les outils existants"
"Le but de notre analyse était de montrer qu'il y a un manque de standardisation et une grande complexité, et que les symptômes sont difficiles à mesurer avec les outils existants", poursuit-elle, insistant : "nous devons mieux comprendre le TDAH pour que les enfants et les adultes aient une meilleure qualité de vie et reçoivent le traitement le plus approprié".
"Le TDAH n'est pas seulement l'enfant qui s'agite sur une chaise. C'est aussi l'enfant qui est inattentif à cause de ses rêveries. Même si cet enfant est plus introverti et n'exprime pas autant de symptômes qu'un enfant hyperactif, cela ne signifie pas qu'il ne souffre pas". Les petites filles sont par exemple particulièrement enclines à la rêverie et moins souvent inscrites dans les études sur le TDAH que les garçons, déplore la chercheuse.
Un modèle informatique pourrait toutefois permettre d’aller plus loin en donnant des informations que les médecins ou les proches pourraient utiliser pour faciliter le quotidien des enfants malades, avance l’étude.
Elargir la compréhension du trouble
"Nous pouvons utiliser des modèles pour simuler le processus de décision et voir comment la prise de décision se fait au fil du temps - et mieux comprendre pourquoi les enfants atteints de TDAH mettent plus de temps à prendre des décisions", suggère Nadja Ging-Jehli.
"Nous pouvons utiliser la modélisation informatique pour réfléchir aux facteurs qui génèrent le comportement observé. Ces facteurs élargiront notre compréhension d'un trouble, en reconnaissant qu'il existe différents types d'individus qui présentent différents déficits qui appellent également différents traitements. Nous proposons d'utiliser l'ensemble de la distribution des temps de réaction, en prenant en considération les temps de réaction les plus lents et les plus rapides pour distinguer les différents types de TDAH".
"Cependant, les tests cognitifs et la modélisation informatique ne doivent pas être considérés comme une tentative de remplacer les entretiens cliniques et les procédures basées sur des questionnaires existants, mais comme des compléments qui apportent de nouvelles informations", soulignent les auteurs de l’étude.
C’est pourquoi, selon eux, une batterie de tâches évaluant les caractéristiques sociales et cognitives devrait être assignée pour établir un diagnostic plutôt qu’une seule. Par ailleurs, une plus grande cohérence est nécessaire entre les études afin de s’assurer que les mêmes tâches cognitives sont utilisées, insistent les scientifiques.
Enfin, combiner des tests cognitifs avec des tests physiologiques, comme l'eye-tracking et les EEG qui enregistrent l'activité électrique dans le cerveau, pourrait aider à fournir d’importantes informations objectives et quantifiables pour établir un diagnostic plus fiable. Cela permettrait également aux cliniciens de mieux prédire quels médicaments seraient les plus appropriés. A terme, l’objectif serait donc de mieux caractériser le TDAH et ce qui l’accompagne comme l’anxiété ou la dépression, améliorer les résultats des traitements et éventuellement prédire quels enfants ne souffriront plus de ce trouble une fois adultes.
Quelles solutions sont aujourd’hui possibles ?
A l’heure actuelle, un diagnostic ne peut être établi que si les troubles durent depuis au moins six mois. Plusieurs consultations avec le médecin traitant de l’enfant puis avec un médecin spécialiste du TDAH sont nécessaires. Les experts s’appuieront sur une analyse du comportement de l’enfant, de son travail scolaire et de son environnement familial. Ils poseront également des questions aux parents et aux enseignants. Puis, un orthophoniste et un neuropsychologue réaliseront des tests d’évaluation.
Quant au traitement, s’il n’existe aucun médicament pour soigner le TDAH, il est cependant possible d’en atténuer les symptômes, le plus souvent avec du méthylphénidate qui stimule l’activité cognitive des patients. Le mieux est de compléter ce traitement avec une thérapie cognitive-comportementale (TCC) ou une thérapie familiale. La première donnera des outils aux parents pour mieux gérer leur enfant tandis que la seconde aidera à travailler sur toutes les dimensions du trouble.
Le psychologue conduira l’enfant à identifier les agissements qui posent problème et aidera l’entourage à y réagir de façon positive. Le but étant d’orienter progressivement l’enfant vers de bonnes habitudes. Au quotidien, une adaptation peut être mise en place dans le cadre scolaire pour faciliter l’apprentissage du patient. Des groupes de soutien et des associations de malades existent également afin que les parents puissent partager leur expérience avec d’autres familles.