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Covid-19

Vaccination : attention au délai entre deux injections et au respect du protocole

Par Jean-Guillaume Bayard

Pour accélérer la vaccination, plusieurs pays réfléchissent à allonger le délai entre les deux injections mais cela pourrait altérer son efficacité. Celle-ci pourrait, par ailleurs, être aussi affectée en France par une erreur dans le protocole du ministère de la Santé pour la vaccination en Ehpad.

Ridofranz/iStock
L’efficacité et la sécurité du vaccin n’ont pas été évaluées pour d’autres calendrier de dosage, a indiqué Pfizer.
Le vaccin doit être injecté par voie intramusculaire mais certains l'injectent par voie sous-cutanée.
La notice du ministère de la Santé a oublié de préciser qu'il ne faut pas secouer le vaccin et les aiguilles fournies sont souvent inadaptées.
L'Agence européenne du médicament vient d'approuver le vaccin Moderna. Près de 160 millions de doses ont déjà été précommandés par l'Union européenne. Il s'agit du deuxième vaccin autorisé sur le sol européen après celui de Pfizer, ce qui pourrait faciliter l'accélération des campagnes de vaccination. 

Mais encore faudrait-il que ces vaccins soient correctement administrés. En suivant les recommandations des scientifiques de Pfizer et BioNtech qui l’ont conçu, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a préconisé que la deuxième dose soit injectée entre 21 et 28 jours après la première. Or, devant le manque de stocks, certains pays ont fait part de leur volonté d’allonger cette période pour pouvoir vacciner le plus grand monde. Problème: l’efficacité maximale n’est pas démontrée si la deuxième injection est retardée. Plus grave, en France, une erreur dans le protocole d’administration du vaccin en Ehpad a été découverte et pourrait bien réduire son efficacité.

Aucune preuve de l’efficacité maximale du vaccin 21 jours après la première injection

Faire vite et bien. Voilà l’enjeu des campagnes vaccinales mondiales. Devant le manque de stocks, certains pays ont prévu d’allonger le délai entre les deux injections. Le Danemark prévoit d’attendre six semaines entre les deux injections, le Royaume-Uni jusqu’à douze semaines et l’Allemagne évalue la possibilité de rallonger ce délai. Ces décisions ne sont pas sans conséquences puisqu’aucune preuve scientifique ne permet d’affirmer que rallonger le temps entre les deux injections garantie que l’efficacité maximale du vaccin est conservé, comme l’a confirmé le laboratoire BioNTech ce mardi 5 janvier au Financial Times. “L’efficacité et la sécurité du vaccin n’ont pas été évaluées pour d’autres calendrier de dosage”, a-t-il indiqué.

Le chef de l’Agence nationale danoise de la Santé, Søren Brostrøm, a justifié sa décision, à la télévision publique TV2, par la volonté de vacciner le plus grand nombre et par la documentation présentée par les laboratoires qui fait état d'une seconde dose reçue “entre 19 et 42 jours” après la première. “Même si des données démontrent qu'il existe une protection partielle dès 12 jours après la première dose, il n'y a pas de données qui démontrent que la protection reste en place au delà de 21 jours, a répondu le porte-parole de BioNTech. Nous estimons qu'une deuxième injection est nécessaire pour procurer la protection maximale contre la maladie.”

Le vaccin doit être administré par voie intramusculaire

En France, c’est une erreur dans le protocole d’administration du vaccin fourni par le ministère de la Santé aux Ehpad qui inquiète sur l’efficacité du vaccin. “Habituellement, la plupart des vaccins sont mono doses, conservés au réfrigérateur et prêts à l’emploi. Le vaccin Pfizer, entre son mode de conservation, à -70 degrés, et le fait que ce ne soit pas un vaccin mono dose, demande une préparation et une vigilance particulière”, a alerté Laurent Fignon, gériatre, qui a procédé a plusieurs vaccinations contre le Covid-19 en Ehpad, à Yahoo!Santé.

Outre les conditions de conservation et de décongélation, l’administration du vaccin doit respecter plusieurs manipulations qui n’ont pas toujours été suivies. “Le vaccin doit être administré par voie intramusculaire”, a indiqué le fabricant. Sur les réseaux sociaux, des professionnels de santé ont relayé des photos de vaccination où il apparaît que les injections sont faites par voie sous-cutanée. Une erreur qui peut être imputée à la notice du ministère de la Santé, selon Frédéric Adnet, chef des Urgences de l’hôpital Avicennes en Seine-Saint-Denis. “J’ai la notice du ministère sous les yeux, il est indiqué par exemple qu’il faut réaliser un pli cutané. C’est un geste préalable à une administration en sous-cutané alors que Pfizer indique clairement que le vaccin doit être administré en intramusculaire.”

Des oublis et des aiguilles inadaptées

Dans sa notice, le ministère a également oublié d’indiquer qu’il faut “retirer 1.8ml d'air dans la seringue” pour égaliser la pression dans la fiole contenant la dose de vaccin. Un manque qui peut être dangereux puisque les infirmières ont tendance à secouer le flacon pour évacuer la bulle d’air, comme c’est habituellement la méthode pour les vaccins, or “ce vaccin à ARN contient des nanoparticules et ne doit pas être secoué, c’est clairement noté par Pfizer dans leur notice, précise Frédéric Adnet. Les nanoparticules de lipide n’aiment pas les chocs.”

Enfin, le dernier problème pointé par les spécialistes concerne les aiguilles utilisées. Le matériel fourni avec les doses du vaccin semble inadapté. “Pour les vaccinations, on a utilisé l’aiguille fournie par Santé Publique France, 25G, qui est une aiguille à injections sous-cutanées. Cela ne respecte pas totalement le protocole de Pfizer puisque l’aiguille n’est pas de la bonne taille”, précise Laurent Fignon. Si l’aiguille est trop courte, le muscle peut ne pas être atteint. “La recommandation tient du fait que les tests ont été fait en intramusculaire. Rien ne dit qu’administrer le vaccin en sous-cutané nuit à son efficacité”, rassure le gériatre.