Face à l’engouement des Français pour cette pratique, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) liste les potentiels dangers des tatouages sur la santé, et émet de nouvelles recommandations sanitaires. "Il s’agit en particulier de faire des recommandations sur les actions complémentaires qui pourraient être mises en oeuvre concernant le risque infectieux et les produits utilisés lors des pratiques de tatouage et de détatouage", précisent les auteurs du rapport.
La pratique de tatouage est en très forte progression en France : elle concerne tous les âges et les milieux socio-professionnels. En 2016, une enquête estimait que 14 % des Français étaient porteurs d’un tatouage (versus 10% en 2010) ; aujourd'hui, 26% des jeunes âgés de 18 ans à 24 ans sont tatoués. Actuellement, seule une petite fraction des personnes tatouées procède à des détatouages. Environ 20 % des tatoués regrettent au moins un de leurs tatouages, et cela est trois fois plus fréquent chez les hommes que chez les femmes, surtout si ce tatouage a été réalisé vers l’âge de 18 ans.
VIH, hépatites B et C
Les risques pour la santé liés aux pratiques de tatouage, maquillage permanent et détatouage sont multiples. "Les complications liées au tatouage peuvent être de survenue aiguë ou chronique, essentiellement avec une localisation cutanée, locale ou locorégionale, plus rarement systémique", explique le HSCP. Il poursuit : "les infections peuvent aussi être d’origine bactérienne ou virale, de manifestation aiguë ou plus tardive".
Ainsi, le risque de transmission du VIH est possible, et est majoré lorsque le tatouage est réalisé par un non professionnel. En matière virale, le risque de contamination du client par le virus des hépatites B ou C lors de tatouages a aussi été bien démontré, y compris lorsqu’il est pratiqué par des tatoueurs "officiels".
Infections et allergies
Les infections bactériennes peuvent être locales ou générales, comme les fasciites nécrosantes, les endocardites, voire les chocs septiques. Des contaminations par Treponema pallidum ont aussi été décrites. Les principaux germes concernés dans les infections aiguës post tatouage sont Staphylococcus aureus et Streptococcus pyogenes. Outre les germes présents sur la peau de la personne tatouée ou du tatoueur, les infections sont liées également à la contamination des pots d’encre, y compris non encore ouverts.
Les réactions allergiques sont quant à elles observées essentiellement avec les tatouages rouges ; les tatouages noirs sont plus souvent associés à des nodules et à la formation de corps étrangers par agrégation des pigments. Des dermatoses peuvent se dévelloper sur le dessin corporel.
Les risques potentiels associés aux tatouages dans le domaine du soin
Enfin, il faut citer les risques potentiels associés aux tatouages dans le domaine du soin :
- une plus grande difficulté pour repérer des lésions cutanées cachées par le tatouage ;
- un risque supplémentaire lors de la réalisation de certains actes (péridurale, ponction lombaire) ;
- un risque de migration des particules contenues dans les encres de tatouage, qui peut être à l'origine de diagnostics erronés en imagerie médicale.
Pas de causalité directe entre l'encre et le cancer
Concernant les liens possibles entre tatouage, encre et cancer, malgré la présence effective possible de produits potentiellement cancérigènes ou procarcinogènes dans les encres de tatouage, "la revue de la littérature montre que le nombre de cancers de la peau qui apparaissent dans les tatouages est faible, sans causalité directe démontrée", précise le HSCP.
Certaines personnes ne doivent pas se faire tatouer
Face à l’ensemble de ces risques, des contre-indications ou des situations nécessitant une discussion en amont de l’acte de tatouage ont été identifiées : les femmes enceintes, les patients atteints d’hépatite B ou C (une vaccination contre l’hépatite B est fortement recommandée avant un tatouage), de troubles de la coagulation (hémophilie) ou sous traitement anticoagulant, les patients allergiques à l’une des substances utilisées lors du tatouage (encres, pigments, métaux), l’insuffisance rénale, le diabète, les maladies du coeur, les maladies auto-immunes, les personnes séropositives pour le VIH, et enfin les sujets sensibles aux poussées d’herpès cutanéomuqueux.
Pour les patients avec une dermatose chronique, il est recommandé de les prévenir des possibles risques de localisation de leur dermatose sur tatouage. "Tout patient présentant une pathologie chronique ou une immunodépression doit prendre contact avec son médecin pour discuter de la possibilité de se faire tatouer", résument les experts. "Les contre-indications du maquillage permanent sont similaires à celles du tatouage", concluent-ils.
Les recommandations du HCSP pour améliorer la sécurité sanitaire
Afin d’améliorer la sécurité sanitaire des tatouages, le HCSP recommande, entre autres :
- pour les mineurs, n’autoriser l’acte de tatouage qu’à partir de l’âge de 16 ans avec le consentement écrit d’une personne titulaire de l’autorité parentale, puis limiter la zone et la surface globale du tatouage.
- envisager une évolution des textes réglementaires permettant la venue d’un tatoueur professionnel au sein des établissements pénitentiaires.
- pour le détatouage, interdire toute utilisation de produits chimiques et réserver cet acte aux médecins, avec un recours exclusif au laser adapté à cet acte.
Les 42 autres recommandations du HCSP visent à garantir les "6 B" tout au long du parcours du tatouage : "le Bon acte réalisé par le Bon professionnel avec le Bon produit, auprès de la Bonne personne, avec une Bonne information et un Bon suivi/une bonne surveillance".