- Depuis 2004, les prix des traitements anticancéreux ont augmenté de 47%.
- Il n'existe aucune corrélation significative entre ces augmentations et la valeur ajoutée thérapeutique en termes d’efficacité et/ou de qualité de vie, estiment les chercheurs de l’Institut Paoli-Calmettes.
Payer plus pour être mieux soigné ? Pas forcément en ce qui concerne le cancer, selon une étude réalisée par des scientifiques marseillais. Publiée le 4 janvier dans le European Journal of Cancer, elle conclut que la corrélation entre le prix des nouveaux médicaments contre le cancer et leur bénéfice thérapeutique est “modeste”. Pire, certains médicaments qui n’apportent que de faibles améliorations voient leur prix s’envoler.
47% d’augmentation
L’évolution du prix des médicaments anticancéreux vers le haut est préoccupante. “Il s’agit d’une question brûlante car l’augmentation explosive du prix des médicaments du cancer exerce une pression croissante sur l’équilibre de notre système de Sécurité sociale et va finir par menacer l’accès de chacun aux vraies innovations thérapeutiques”, estime le professeur Anthony Gonçalves, chef de département d’oncologie médicale à l’Institut Paoli-Calmettes (IPC) de Marseille et co-auteur de l’étude. Les chercheurs ont analysé la relation entre l’efficacité et le prix de 36 médicaments contre le cancer pendant 13 ans, entre 2004 et 2013. Ils ont comparé leur valeur ajoutée par rapport à des médicaments plus anciens. Pour cela, ils ont utilisé l’échelle de magnitude du bénéfice clinique de la société européenne pour l’oncologie médicale et le score d’amélioration du service médical rendu par la Haute autorité de santé qui est utilisé pour fixer les prix des médicaments.
Depuis 2004, les prix de ces traitements ont augmenté de 47%. Les chercheurs n’ont pourtant pas trouvé d’amélioration flagrante sur leur efficacité sur les tumeurs. “Il n'existe aucune corrélation significative avec la valeur ajoutée thérapeutique en termes d’efficacité et/ou de qualité de vie, ajoutent-ils, dans un communiqué publié par l’IPC le 20 janvier dernier. Ainsi, même des médicaments n’induisant que de faibles améliorations des résultat médicaux voient leur prix s’envoler. L'étude démontre qu'une grande partie des nouveaux médicaments examinés n’apportent que des bénéfices marginaux.”
Plusieurs facteurs à l’origine de cette flambée
Les chercheurs estiment que ces résultats doivent entraîner une réflexion sur les prix de ces médicaments. “Les autorités politiques devraient s'interroger sur la légitimité des prix fixés au regard des bénéfices thérapeutiques obtenus et identifier de nouvelles approches pour s'assurer que les prix reflètent réellement la valeur médicale des nouveaux traitements anticancéreux”, écrivent-ils. Selon eux, cette flambée des prix est le résultat de plusieurs facteurs. D’abord, il y a “le prix unique de médicaments dans des indications multiples, pour lesquelles le bénéfice clinique peut être très différent”. Ensuite, on trouve des “issues d'études cliniques parfois biaisées”. Enfin, il y a “les remises secrètes négociées entre les compagnies pharmaceutiques et le comité de fixation des prix qui induisent un manque de transparence sur les prix réellement pratiqués et limitent ainsi les stratégies de coopération gouvernementale”.