- Pourquoi docteur - Quelle est l’incidence du cancer du col de l’utérus aujourd’hui en France ?
Xavier Carcopino - Le cancer du col de l’utérus est le treizième cancer de la femme en France, avec environ 3000 cas et 1000 décès par an. C’est un cancer devenu relativement rare, car son dépistage permet de traiter les lésions précancéreuses. Entre 20 000 et 30 000 traitements de lésions pré-cancéreuses sont réalisés tous les jours en France.
L’incidence du cancer de l’utérus est à peu près la même chez nos voisins européens. Dans les pays en voie de développement, cette pathologie est en revanche un véritable fléau.
- Le papillomavirus (HPV) est beaucoup associé dans les médias au cancer du col de l’utérus. Est-ce la seule cause de cette maladie ?
Le HPV est la cause quasi-exclusive du cancer du col de l’utérus. Il ne suffit pas d’avoir une infection à HPV pour avoir un cancer du col, mais pour avoir un cancer du col, il faut qu’il y ait eu une infection à HPV dans 99,9% des cas.
Pas de panique cependant : pour qu’un cancer apparaisse, il faut que l’infection à HPV persiste depuis des années. Par ailleurs, l’infection à HPV, que tout le monde fait un jour ou l’autre, n’a aucune conséquence dans la grande majorité des cas.
- Où en est la vaccination contre le papillomavirus en France ? Quels sont les objectifs en la matière ?
C’est dramatique : la couverture vaccinale est très insuffisante en France, avec seulement 23% des jeunes femmes immunisées. Si rien n’est fait, l’incidence du cancer du col de l’utérus risque ne pas chuter dans les dix ans à venir en France, contrairement à nos voisins européens. Le plan cancer évalue qu’il faudrait vacciner au moins 60% des jeunes femmes et des garçons pour faire baisser le nombre de cas, ce qu’ils ont réussi à faire en Italie, en Espagne, au Portugal ou encore en Angleterre.
- Que sait-on sur le vaccin contre le HPV, arrivé en France en 2007 ?
Cette vaccination est extrêmement efficace pour prévenir les infections persistantes à 9 types de HPV et les lésions précancéreuses. Une grosse étude publiée fin 2020 démontre que la vaccination contre le papillomavirus est aussi très performante contre les cancers du col de l’utérus, avec une réduction de l’incidence de maladie de plus de 80% chez les jeunes femmes immunisées en temps et en heure.
Depuis 2019, la HAS recommande la vaccination contre le papillomavirus chez les jeunes hommes, afin de limiter leur risque d’exposition aux cancers HPV (cancer de la marge annal, cancer de la sphère ORL), pour prévenir les verrues génitales (condilome), et limiter la contagion de leur partenaire.
- Comment administre-t-on le vaccin contre le papillomavirus ?
On administre deux doses pour les 11/14 ans. Il existe aussi la possibilité de faire une vaccination de rattrapage jusqu’à la fin de la 19ème année, auquel cas trois doses sont injectées.
- Le prix du vaccin anti-HPV est assez élevé, n’est-ce pas décourageant pour les parents ?
Le vaccin coûte effectivement un peu plus de 100 euros la dose (remboursée à 65% par l’assurance maladie), mais il semble ce ne soit pas un facteur dissuasif. Les patients qui ont accès à la CMU bénéficie d’une prise en charge, tout comme ceux qui ont une mutuelle. Aux États-Unis, le vaccin n’est pas remboursé, et pourtant la couverture vaccinale y est de 40%.
En France, les freins à la vaccination sont d’abord la méfiance de la population vis-à-vis du processus, mais aussi et surtout un manque d’opportunités. Beaucoup de femmes qui ne sont pas vaccinées ne sont pas contre, on ne leur a juste jamais proposé. Pour remédier à ce problème, on pourrait par exemple vacciner à l’école.
- Faut-il dépister les femmes qui ont été vaccinées ? Et si oui, comment ?
Oui, car même si la vaccination est très efficace, elle ne fonctionne pas à 100%. Les femmes peuvent aussi développer un cancer avec des types d’HPV qui ne sont pas encore ciblés par le vaccin.
Les modalités de dépistage des femmes vaccinées sont les mêmes que pour les autres : le test doit être réalisé tous les 3 ans entre 25 et 30 ans (après 2 tests réalisés à 1 an d’intervalle et dont les résultats sont normaux), puis tous les 5 ans entre 30 et 65 ans.
- L'Institut national du cancer (INCa) va dévoiler la semaine prochaine la nouvelle stratégie décennale contre le cancer. Des évolutions sont-elles prévues concernant le cancer du col de l’utérus ?
Pas à ma connaissance. On pourrait imaginer de vacciner encore plus tôt, car entre 11 et 14 ans, les jeunes ne vont plus chez le pédiatre, pas encore chez le gynécologue, et ne consultent leur médecin traitant que s’ils sont malades.