- Les infections urinaires sont les infections bactériennes communautaires les plus fréquentes chez les femmes.
- L'identification du mécanisme de régulation d'une molécule qui "nourrit" les bactéries pourrait permettre la mise au point de nouveaux traitements antibiotiques
Des chercheurs d’INRAE ont compris le fonctionnement d’une "bactérie vampire" (Enterococcus faecalis), ce qui pourrait permettre de mieux lutter contre les infections urinaires mais aussi cardiaques.
Utilisés en médecine à partir de la seconde guerre mondiale, les antibiotiques sont des alliés de taille dans la lutte contre les infections bactériennes. Leur usage massif a cependant fait émerger des résistances chez les bactéries, rendant ces médicaments inefficaces.
Détecter et mesurer la quantité d’hème disponible
Ces dernières années, les chercheurs ont remarqué que les antibiotiques tuent non seulement la bactérie responsable de l’infection, mais aussi une grande majorité des autres bactéries présentes dans notre corps, en particulier celles du microbiote intestinal. Ce qui fait surgir un autre problème : toutes les bactéries ne sont pas tuées, et certaines, initialement inoffensives, émergent et contaminent l’hôte. Enterococcus faecalis, la 3e cause d’infection nosocomiale (contractée en milieu hospitalier au moment des soins) fait partie de ces opportunistes. Comme beaucoup d’autres bactéries intestinales, elle doit puiser dans son environnement une molécule qu’elle n’est pas capable de fabriquer : l’hème*. Cette molécule, essentielle au développement de la bactérie, devient toxique si elle est présente en trop grande quantité.
Partant de ces postulats, les chercheurs de l’INRAE ont étudié la capacité d’Enterococcus faecalis à trouver dans l’environnement intestinal suffisamment d’hème pour subvenir à ses besoins, tout en évitant les effets toxiques de cette molécule. C’est ainsi qu’ils ont découvert un mécanisme qui permet à la bactérie de détecter et mesurer la quantité d’hème disponible.
"Une approche antibiotique novatrice et complémentaire aux traitements actuels"
Leurs travaux, publiés le 2 février 2021 dans mBio, mettent au jour une toute nouvelle pompe moléculaire chez cette bactérie, activée par un capteur qui détecte la quantité d’hème. On sait désormais comment et quand cette pompe est active : à faible concentration, l’hème entre passivement dans la bactérie. Lorsqu’il y en a trop, la pompe s’active et rejette l’hème en surplus hors de la bactérie. Enterococcus faecalis est donc capable de "sentir" la présence d’hème et d’activer sa pompe pour éliminer ce qui pourrait lui être fatal.
"La découverte de ce mécanisme de régulation du transport de l’hème chez Enterococcus faecalis permet une avancée dans la compréhension de la physiologie de cette bactérie pathogène opportuniste", concluent les scientifiques dans un communiqué. "Montrer que ce mécanisme est indispensable à la survie d’Enterococcus faecalis lors des infections et le bloquer pourrait constituer une approche antibiotique novatrice et complémentaire aux traitements actuels", se félicitent-ils.
*L’hème est une molécule contenant du fer présente dans le sang en grandes quantité et permet le transport de l’oxygène. Elle donne sa couleur rouge au sang.