Les pesticides sont bien dangereux pour la santé. Une nouvelle recherche menée par des chercheurs français du CHU Tours, et publiée le 21 janvier dans la revue Scientific Reports, rapporte qu’une forte exposition à ces produits, principalement aux insecticides, augmente le risque de développer une leucémie aiguë myéloïde, un cancer des cellules de la moelle osseuse.
50% de risques supplémentaires
Les chercheurs tourangeaux ont analysé les données scientifiques publiées ces 75 dernières années. “Cette démonstration est inédite, car c'est la première fois que l'on établit clairement le lien entre une exposition forte aux pesticides et l'apparition de leucémies aiguës myéloïdes”, poursuit le Pr Olivier Hérault, chef du service d'hématologie biologique au CHRU de Tours, en charge de l'étude, à France Bleu Touraine. Avec son équipe de scientifiques, il a disséqué 14 études internationales parues entre 1946 et 2020 qui ont concerné près de 3 955 patients atteints de leucémie.
Les résultats ont révélé que l’exposition aux insecticides en particulier est responsable d’une augmentation de 50% du risque de développer une leucémie aiguë myéloïde. Cette maladie touche principalement les agriculteurs mais elle n’est pas encore reconnue comme une maladie professionnelle. “La publication de cette étude va peut-être changer les choses”, espère le Pr Olivier Hérault.
Des risques de développer plusieurs cancers
Ces résultats s’ajoutent à ceux d’études précédentes qui ont montré que l’exposition aux pesticides augmente le risque de développer certains cancers tels que les cancers du sang, de la prostate, de la peau ou encore des lèvres. C’est le constat du bulletin de la cohorte Agrican, adressé mercredi 25 novembre aux 180 000 adhérents, éleveurs et cultivateurs, de la Mutuelle sociale agricole (MSA) enrôlés dans cette étude épidémiologique, la plus importante au monde réalisée sur plus de 10 ans. Il se fonde sur une dizaine d’articles scientifiques publiés concernant plus d’un million de personnes en activité en France, exploitants ou salariés d’exploitations.
Les cancers du sang, de la prostate, de la peau ou encore des lèvres sont plus présents dans cette catégorie de population. À cela s’ajoutent les lymphomes non hodgkiniens, myélomes et certaines leucémies. En cause : l’utilisation d’antiparasitaires sur le bétail, l’enrobage des semences avant le semis, la pulvérisation de pesticides en champ et en arboriculture, ou encore la désinfection des bâtiments d’élevage. L’application de pesticides en plein champ ou sur les arbres fruitiers, l’utilisation de produits antiparasitaires sur les bovins et les porcins sont également associées à un risque accru de cancer de la prostate. “Les arboriculteurs réalisant des traitements pesticides ou des récoltes sur plus de 25 hectares ont un doublement de risque”, ont écrit les chercheurs.
Si les tumeurs du cerveau et du système nerveux central ne sont pas surreprésentées chez les agriculteurs, certaines de leur activité sont, elles, associées à un risque accru, notamment l’utilisation de pesticides. “Les analyses ont permis de montrer une association entre les tumeurs du système nerveux central et le travail au contact des porcs ou de certaines cultures, telles que le tournesol, les betteraves et les pommes de terre pour les méningiomes, et les prairies pour les gliomes, ont observé les chercheurs. Elles ont également mis en évidence que les utilisateurs de pesticides avaient en moyenne deux fois plus de risque de développer une tumeur du système nerveux central que les autres participants de la cohorte.”