"Personne ne comprend ce qu’il se passe et qu’est-ce qui provoque l’épidémie." En 2018 déjà, le Dr Daniel O’Brien, expert en maladies infectieuses, avouait être désarmé face à l’augmentation des cas d’ulcère de Buruli en Australie. En l’espace de trois ans, la propagation a encore empiré. De 74 cas constatés en 2013, le pays est passé à 186 en 2016 et à 286 l’année suivante. Soit une augmentation de 400 % du nombre de personnes touchées par cette bactérie mangeuse de chair au cours des quatre dernières années.
Interrogé à nouveau par la BBC, le Dr O’Brien estime que les ulcères de Buruli sont désormais devenus "terriblement plus fréquents et aussi plus graves" dans l’État de Victoria, au sud-est de l’Australie. "On ne sait pas pourquoi l’ulcère, généralement trouvé dans les zones tropicales, est apparu dans le climat tempéré de Victoria", reconnaît-il.
Qu’est-ce que l’ulcère de Buruli ?
L’ulcère de Buruli est dû à une bactérie appelée Mycobacterium ulcerans. Elle fait partie de la même famille de bactéries que la lèpre et la tuberculose. Elle produit une toxine qui détruit les tissus de la peau, les petits vaisseaux sanguins et la graisse. Cela provoque de graves ulcères, qui peuvent parfois atteindre les os. Souvent, ce sont les bras ou les jambes qui sont touchés. Si la victime n’est pas traitée suffisamment tôt, cela peut créer de graves handicaps ou nécessiter de la chirurgie réparatrice. Dans tous les cas, le traitement repose sur une association d'antibiotiques. Il faut aux patients plusieurs mois, voire une année pour se remettre totalement.
Une maladie qui reste encore mystérieuse
Habituellement présente dans les régions rurales d'Afrique de l'Ouest, d'Afrique centrale, de Nouvelle-Guinée, d'Amérique latine et des régions tropicales d'Asie, la bactérie Mycobacterium ulcerans se répand depuis quelques années en Australie. D’abord cantonnés dans les régions tropicales du Queensland, avec des cas occasionnels dans d'autres États, la bactérie est aujourd’hui implantée dans les régions côtières de l’Australie, notamment autour de Melbourne.
Les moustiques, vecteurs de contamination ?
Et cela désarçonne les médecins, qui n’ont pas encore trouvé comment la maladie se transmettait aux humains. L’une des hypothèses les plus probables est que la bactérie provient de l’environnement et du sol, et serait transportée par les précipitations. Certains scientifiques avancent qu’elle pourrait aussi être transportée par les moustiques. "Personne ne comprend ce qui se passe et ce qui est à l'origine de cette épidémie. Nous pouvons émettre des hypothèses mais pas des conseils définitifs. C'est un mystère, explique à la BBC le Dr O’Brien. Le problème est que nous n'avons pas le temps de nous asseoir et de pontifier à ce sujet - l'épidémie a atteint des proportions effrayantes."
Dans un article publié dans le Medical Journal of Australia, des médecins ont appelé à un financement gouvernemental pour en savoir davantage sur les causes de l’ulcère de Buruli. De son côté, l’État de Victoria, le plus impacté, a dépensé plus de 1 million de dollars australiens (654 000 euros) pour la recherche sur la maladie et ont lancé des campagnes d'éducation pour sensibiliser le public à son sujet.