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Traitement de la douleur

L’effet placebo, comment ça marche ? Une étude nous dit tout !

Par Charlotte Arce

Une vaste méta-analyse met pour la première fois en lumière les mécanismes neuronaux expliquant pourquoi, dans le cadre d’un traitement destiné à réduire la douleur, les personnes sous placebo déclarent elles aussi moins souffrir.

microgen/iStock
Les chercheurs ont passé en revue 20 études précédemment réalisées portant sur l'activité cérébrale liée à la prise de placebos.
Les résultats montrent que plusieurs zones spécifiques du cerveau sont impliquées dans la diminution de la douleur, notamment le thalamus et les ganglions de la base, où naît la sensation de douleur.

Et si une grande partie du bénéfice qu’une personne tire de la prise d’un médicament pour soulager la douleur, n’était pas dû au traitement lui-même, mais à l’état d’esprit du patient ?

C’est tout le principe de "l’effet placebo", qui intervient lorsqu’un patient se voit proposer un traitement dénué d’action pharmacologique sans qu’il le sache, mais en ressent malgré tout les effets positifs.

De nombreuses études se sont interrogées sur les mécanismes neuronaux expliquant cet effet placebo. Leurs résultats ont désormais compilés dans une méta-analyse publiée dans la revue Nature Communications. Ses conclusions montrent que les traitements placebo destinés à diminuer la douleur réduisent en réalité l'activité liée à la douleur dans de multiples zones du cerveau.

Une compilation des résultats de vingt études

Jusqu’à présent, les études portant sur l’effet placebo étaient des études à petite échelle, si bien que les chercheurs ne savaient pas si les mécanismes neuronaux sous-jacents se vérifieraient sur des échantillons plus importants.

Il s’agit ici de la première méta-analyse à grande échelle, qui examine 20 études de neuro-imagerie avec 600 participants en bonne santé. Les résultats fournissent de nouvelles informations sur la taille, la localisation, la signification et l'hétérogénéité des effets du placebo sur l'activité cérébrale liée à la douleur.

"Nos résultats montrent que les participants qui ont montré la plus grande réduction de la douleur avec le placebo ont également montré les plus grandes réductions des zones du cerveau associées à la construction de la douleur, explique Tor Wager, chercheur principal du laboratoire de neurosciences cognitives et affectives de Dartmouth. Nous apprenons encore comment le cerveau construit les expériences de douleur, mais nous savons que c'est un mélange de zones cérébrales qui traitent les apports du corps et de ceux qui participent à la motivation et à la prise de décision." D’après le chercheur, le traitement par placebo "réduit l'activité des zones impliquées dans la signalisation précoce de la douleur par le corps, ainsi que les circuits de motivation qui ne sont pas spécifiquement liés à la douleur".

Plusieurs zones du cerveau impliquées

En compilant tous les résultats d’études, les chercheurs ont pu localiser avec certitude les effets du placebo sur des zones spécifiques du cerveau, notamment le thalamus et les ganglions de la base.

Le thalamus sert de porte d'entrée pour la vue et les sons et toutes sortes d'entrées sensorielles et motrices. Les résultats montrent que les parties du thalamus qui sont les plus importantes pour la sensation de douleur sont aussi celles qui sont les plus fortement affectées par le placebo. Les parties du cortex somatosensoriel, qui font partie intégrante du traitement précoce des expériences douloureuses ont également été touchées, tout comme les ganglions de la base, qui sont importants pour la motivation et pour relier la douleur et d'autres expériences à l'action.

Les traitements placebo réduisent aussi l'activité de l'insula postérieure, qui est l'une des zones impliquées dans la construction précoce de l'expérience de la douleur. C'est le seul endroit du cortex où l'on peut stimuler et invoquer la sensation de douleur. Enfin, les placebos activent aussi le cortex préfrontal. De précédentes études ont montré que lorsque le cortex préfrontal est activé, il existe des voies qui déclenchent la libération d'opioïdes dans le mésencéphale qui peuvent bloquer la douleur et des voies qui peuvent modifier la signalisation et la construction de la douleur.

"Nos résultats suggèrent que les effets placebo ne se limitent pas uniquement aux processus sensoriels / nociceptifs ou cognitifs / affectifs, mais qu'ils impliquent probablement une combinaison de mécanismes qui peuvent différer selon le paradigme placebo et d'autres facteurs individuels, détaille Ulrike Bingel, co-auteur de l’étude. Les résultats de l'étude contribueront également à la recherche future dans le développement de biomarqueurs cérébraux qui prédisent la réponse d'un individu au placebo et aident à distinguer les réponses au placebo des réponses aux médicaments analgésiques."