Dans l’ombre des vaccins, les traitements contre la Covid-19 constituent l’autre clé pour affronter la pandémie. Olivier Véran a récemment, et pour la première fois, présenté deux traitements qui donnent l’espoir de pouvoir traiter la maladie : les interférons et les anticorps monoclonaux. La recherche française travaille, elle aussi, sur des traitements potentiels qui pourraient bientôt être commercialisés. Jean-Marc Steens, infectiologue et directeur médical de la société Abivax, nous présente ABX464, un anti-inflammatoire qui vise à empêcher les formes sévères de Covid-19 chez les patients hospitalisés.
- Comment ça marche ?
“Nous avons découvert la molécule ABX464 il y a 5 ans pour traiter l’inflammation dans la MICI (les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin, ndlr), dévoile Jean-Marc Steens, infectiologue et directeur médical d’Abivax. Quand la Covid est arrivée et que l’on s’est rendu compte que les formes sévères de la maladie sont causées par une hyper inflammation qui cause des détresses respiratoires, on s’est dit que notre molécule pouvait empêcher cette hyper inflammation.
Le médicament se présente sous la forme d’une gélule qui peut être prise à domicile. Il faut le prendre une fois par jour pendant 28 jours. Nous pensons que la molécule peut également avoir un effet sur la répartition tissulaire donc si le patient présente des lésions à long ou moyen terme, nous espérons pouvoir les soigner.”
- Pour qui ?
“Le médicament est destiné aux patients positifs au virus qui sont à risque de faire des formes sévères de la maladie, donc les plus âgés ou ceux de moins de 65 ans qui présentent des comorbidités. L’objectif est de prévenir l’administration d’oxygène à haut volume et/ou les décès. Cela ne convient pas aux patients qui se trouvent déjà en réanimation puisque l’inflammation est trop établie et il est donc trop tard pour notre médicament. Notre objectif est d’éviter le passage en soin intensif.
Ce médicament devrait être efficace contre tous les types de variants. Il agit sur différentes voies inflammatoires qui sont très certainement communes à tous les variants.
On espère également que prendre le traitement pendant une telle période pourrait inhiber les Covid longs mais on ne le sait pas encore. On effectue actuellement des suivis à long terme pour voir si les lésions fibrotiques causées par l’inflammation due à la Covid-19 peuvent être diminuées.”
- Où en est l’étude ?
“Nous avons démarré nos études randomisées avec placebo entre mai et juin 2020. Notre protocole prévoit d’inclure plus de 1 000 patients. Pour l’instant, l’étude MiR-AGE se déroule bien, avec plus de 400 patients volontaires qui ont déjà reçu le médicament, dont un tiers en Europe et le reste en Amérique Latine. Comme nous étudions cette molécule depuis plusieurs années, nous avons déjà un bon recul sur sa tolérance et le fait qu’elle n’entraîne pas d’effets secondaires majeurs. Cela fait plus de 3 ans que nous traitons des patients dans le cadre des MICI et ils répondent bien au traitement.”
- Pour quand ?
“On espère une commercialisation d’ici à la fin de l’année. Nous attendons les résultats de la phase 2B-3 de l’étude qui devraient intervenir d’ici à la fin du deuxième trimestre. S’ils sont satisfaisants, nous allons demander une autorisation réglementaire pour le troisième trimestre. Parallèlement, on travaille pour augmenter notre capacité de production du médicament.”