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Coronavirus

Covid-19 : pourquoi y a-t-il de plus en plus de jeunes en réanimation ?

Par Jean-Guillaume Bayard

La part des moins de 60 ans présents en service de réanimation progresse sous l’effet du variant britannique. Pour les plus de 70 ans, la tendance est au recul, un effet direct de la campagne de vaccination.

PatrikSlezak/iStock
Alors qu’ils ne représentaient que 30% des entrées lors des précédentes vagues de contamination, les moins de 60 ans représentent aujourd'hui presque 50 % des nouveaux entrants en réanimation.
Ces patients plus jeunes admis en soins critiques restent en moyenne plus longtemps en réanimation car leur état se dégrade plus lentement.
Une étude pré-publiée a conclu que le variant anglais entraîne un risque d’hospitalisation accru d’environ 64 %.

Dans les services de réanimation, les patients atteints d’une forme sévère de Covid-19 n’ont pas cessé d’affluer mais leurs profils ont évolué. L’âge médian des patients Covid-19 en réanimation est passé de 65 ans en 2020 à 63 ans en 2021, selon l’Assistance Publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP). “Cette baisse peut paraître faible, mais ce chiffre ne suffit pas à refléter l’importance du signal que nous voyons, a constaté le professeur Antoine Vieillard-Baron, chef de service en médecine intensive-réanimation à l’hôpital Ambroise-Paré, au Monde. Alors qu’ils ne représentaient que 30% des entrées lors des précédentes vagues de contamination, les moins de 60 ans représentent aujourd'hui presque 50 % des nouveaux entrants en réanimation.

De plus longs séjours en réanimation 

Les courbes d’admission se croisent entre les plus âgés et les moins âgés. En Île-de-France, la part des plus de 80 ans a chuté de 14 points en deux mois et demi, passant de presque la moitié à un petit tiers des hospitalisés tandis que celle des moins de 60 ans a grimpé de presque neuf points, passant de moins de 16 % des hospitalisés à près du quart. “Ces résultats suggèrent une augmentation moyenne de la sévérité des cas chez les patients âgés de 15 à 64 ans, plus marquée chez les jeunes adultes”, a indiqué Santé publique France dans son point épidémiologique du jeudi 18 mars. Ce qui est significatif, c’est que nous avons beaucoup moins de patients en réanimation de plus de 70 ans, ce qui participe fortement à faire baisser la moyenne, souligne le professeur au CHU de Lille, François-René Pruvot. Ils ne sont plus que 25 % des patients, contre 36 % en deuxième vague, cela peut donc être un effet de la vaccination.

Ces patients plus jeunes admis en soins critiques restent en moyenne plus longtemps en réanimation car leur état se dégrade plus lentement que les patients plus âgés. L’AP-HP a noté que la durée des séjours en réanimation avec intubation est passée de 17 jours en moyenne en 2020 à 21 jours ces dernières semaines. Les médecins ont également noté un nombre croissant d’admissions directes dans les services de soins critiques, sans passer par une hospitalisation plus classique. 

Le variant britannique en cause

La seule explication que je vois, c’est le variant anglais, avance Yves Cohen, chef du service de réanimation de l’hôpital Avicenne à Bobigny, car cette courbe de l’âge a évolué chez moi en parallèle de celle de la progression du variant.” Cette explication n’est pas partagée par tous et notamment le professeur Antoine Vieillard-Baron qui y voit la conséquence d’une circulation accrue du virus chez les plus jeunes. “Le phénomène est corrélé à une augmentation du taux d’incidence qui a explosé chez les 20-60 ans, alors que sa progression est moindre chez les plus âgés, l’infection circule plus dans cette tranche d’âge plus jeune”, estime-t-il. En ce qui concerne la sévérité plus élevée du virus chez les plus jeunes, il renvoie lui aussi vers le variant B.1.1.7 du SARS-CoV-2, dit variant britannique. “Ce qui est plus inattendu, en revanche, c’est que le virus mène autant ces personnes moins âgées en soins critiques. Est-ce l’effet du variant plus sévère, ce n’est pas exclu”, juge-t-il.

Cette réalité observée par les services de réanimation répond à de nouvelles études qui montrent que le variant britannique est plus contagieux et plus mortel que la souche “classique” du virus. Une étude pré-publiée le 2 mars dernier suggère que ce variant entraîne également plus de formes sévères de Covid-19. L’analyse de tous les cas positifs détectés par un test RT-PCR entre le 1er janvier et le 9 février au Danemark a conduit les chercheurs à observer un risque d’hospitalisation accru d’environ 64 % en cas d’infection au variant anglais. Ce risque atteint même 84% pour les moins de 30 ans.