- Avec le jeûne, la composition des bactéries intestinales change radicalement et les bactéries qui réduisent la tension artérielle se multiplient.
- L'indice de masse corporelle, la pression artérielle et le besoin de médicaments antihypertenseurs sont restés inférieurs à long terme chez les volontaires qui ont commencé une alimentation saine après un jeûne de cinq jours.
Environ un Français sur cinq présente un syndrome métabolique. Autrement appelé syndrome X, il désigne la coexistence de plusieurs troubles de santé associés à un excès de poids. Ces désordres métaboliques augmentent le risque de diabète de type 2, de maladies cardiaques ou encore d’accident vasculaire cérébral (AVC). Pour normaliser le métabolisme lipidique et glucidique, d’où sont originaires la plupart des troubles métaboliques, la perte de poids est l’un des traitements les plus efficaces. Dans une étude présentée le 30 mars dans la revue Nature Communications, des chercheurs allemands suggèrent que faire un jeûne avant un régime alimentaire dans l'optique de perdre du poids agit comme un catalyseur de l'alimentation chez les personnes atteintes du syndrome métabolique.
Un régime méditerranéen est bon…
Les chercheurs ont examiné l'effet d'un changement de régime sur les personnes atteintes du syndrome métabolique et ont souhaité analyser si associer un jeûne à ce régime peut augmenter ses effets. “Le passage à une alimentation saine a un effet positif sur la pression artérielle, a déclaré Andras Maifeld, auteur principal de l’article. Si le régime est précédé d'un jeûne, cet effet est intensifié.” Pour arriver à ces conclusions, il a, avec son équipe de chercheurs, recruté 71 volontaires atteints du syndrome métabolique et d'une pression artérielle systolique élevée. Ces derniers ont été réparti en deux groupes au hasard. Les deux ont suivi le régime DASH (Dietary Approach to Stop Hypertension) - conçu pour lutter contre l'hypertension artérielle - pendant trois mois mais le second groupe a observé un jeûne de cinq jours avant de commencer cette diète. Ce régime de style méditerranéen comprend beaucoup de fruits et légumes, des produits complets, des noix et des légumineuses, du poisson et de la viande blanche maigre.
Les scientifiques ont d’abord observé que le changement de régime alimentaire, qui est passé à une alimentation conçue pour lutter contre l’hypertension, est bénéfique. Ils ont également constaté comment cela se matérialise dans l’organisme. “Le système immunitaire inné est resté stable pendant le jeûne, tandis que le système immunitaire adaptatif s'est arrêté, ont constaté les chercheurs. Au cours de ce processus, le nombre de cellules T pro-inflammatoires diminue, tandis que les cellules T régulatrices se multiplient.”
…mais le jeûne l'améliore
En utilisant des échantillons de selles, les chercheurs ont examiné les effets du jeûne sur le microbiome intestinal. Ces effets sont importants puisque les bactéries intestinales travaillent en contact étroit avec le système immunitaire. Par exemple, certaines souches de bactéries métabolisent les fibres alimentaires en acides gras anti-inflammatoires qui sont bénéfiques pour le système immunitaire. Avec le jeûne, la composition des bactéries intestinales change radicalement et les bactéries qui réduisent la tension artérielle se multiplient. Les chercheurs ont observé que certains de ces changements persistent même après la reprise de la prise alimentaire. “L'indice de masse corporelle, la pression artérielle et le besoin de médicaments antihypertenseurs sont restés inférieurs à long terme chez les volontaires qui ont commencé une alimentation saine avec un jeûne de cinq jours”, avance Dominik Müller qui a co-dirigié l’équipe de chercheurs.
Pour aller plus loin, les chercheurs ont mené une évaluation statistique de ces résultats en utilisant l'intelligence artificielle pour s'assurer que cet effet positif est effectivement attribuable au jeûne et non aux médicaments pris par les volontaires. Pour cela, ils se sont associés à scientifiques allemands du Helmholtz Center for Infection Research et des canadiens de l’université McGill à Montréal. “Nous avons pu isoler l'influence du médicament et observer que le fait qu'une personne réagisse ou non à un changement de régime dépend de la réponse immunitaire individuelle et du microbiome intestinal”, poursuit Sofia Forslund, qui a co-dirigé l’équipe de chercheurs.
Si un régime riche en fibres et faible en gras ne donne pas de résultats, il est possible que cela soit dû au fait qu’il n’y ait pas suffisamment de bactéries intestinales dans le microbiome intestinal qui métabolisent les fibres en acides gras protecteurs. “Ceux qui ont ce problème estiment souvent que cela ne vaut pas la peine et retournent à leurs vieilles habitudes”, ajoute la chercheuse. Associer le jeûne permettrait de palier ce manque. “Le jeûne agit comme un catalyseur pour les micro-organismes protecteurs dans l'intestin. La santé s'améliore clairement très rapidement et les patients peuvent réduire leur prise de médicaments ou même souvent arrêter complètement de prendre des comprimés et cela pourrait les motiver à adopter un mode de vie sain à long terme”, conclut-elle.
Le jeûne peut empêcher le bon développement des muscles
Plusieurs études ont par ailleurs pointé des effets limités du jeûne intermittent pour perdre du poids. Une étude parue le 28 septembre dernier dans le JAMA a même suggéré qu’il empêche le bon développement des muscles. “Quelle que soit la manière dont on le considère, le fait de manger par intermittence a entraîné une perte de poids très modeste", a déclaré Ethan Weiss, co-auteur de l’étude. Il ajoute : “Le jeûne intermittent n'offrait aucun autre avantage métabolique. Par ailleurs, la perte de masse maigre est un signal inquiétant.”