- Ces observations confirment la capacité d'adaptation profonde du système nerveux à son environnement.
- Dans l'espace, le cerveau change de forme et de taille.
- Le cerveau a tendance à se déplacer vers le haut et peut se coller à la paroi interne de la boîte crânienne, entraînant migraines et troubles oculaires.
Quasiment 60 ans jour pour jour après le décollage de Yuri Gargarin, premier Homme à s’envoler pour l’espace, et deux semaines avant le décollage de l’astronaute français Thomas Pesquet vers la Station spatiale internationale (ISS), des chercheurs de l’Inserm ont publié de nouvelles données sur l’effet de la gravité sur le cerveau. Les résultats, parus le 7 avril dans la revue Science Advances, suggèrent que “le cerveau se sert de la gravité pour minimiser les efforts que nos muscles doivent déployer”, écrit l’institut dans un communiqué.
Le cerveau s’adapte à son environnement
Réunis dans le laboratoire CAPS “Cognition, action et plasticité sensori-motrice”, des chercheurs de l’Inserm et de l’université de Bourgogne étudient les effets de la gravité sur l’organisme. En examinant son impact sur le cerveau, ils ont constaté qu'il envoie des commandes électriques qui activent et désactivent les muscles de manière très précise “durant quelques millisecondes”, précise l’Inserm. Cela lui permet “d’exploiter les effets de la gravité pour accélérer nos mouvements descendants et décélérer nos mouvements ascendants”. Ces résultats confirment “l’hypothèse d’une adaptation profonde du système nerveux à son environnement”, jugent les chercheurs. Ils ont enregistré les activations musculaires envoyées par le cerveau aux muscles, à la fois chez des primates et chez des humains effectuant des mouvements de bras horizontaux et verticaux.
Dans l’espace, le cerveau change de taille et de forme
En apesanteur, le cerveau doit s’adapter à l’absence de gravité. En 2016, des chercheurs de l'université du Michigan et de la Nasa se sont rendus compte que le cerveau des astronautes change de forme pendant les séjours dans l’espace. Dans une étude publiée le 19 décembre 2016 dans la revue NPJ Microgavity, ils ont constaté qu’en fonction du temps passé en micro-gravité, différentes parties du cerveau vont se compresser ou se dilater durant le séjour dans l'espace. “Nous avons découvert que d'importantes régions de matière grise décroissent en volume, ce qui pourrait être lié à la redistribution du fluide cérébro-spinal dans l'espace. Cela pourrait déboucher sur un déplacement de la position du cerveau ou sa compression”, a estimé Rachael Siedler, professeur de kinésiologie et de psychologie à l'université du Michigan et autrice principale de l’étude.
Dans une autre étude, publiée le 2 novembre 2017 dans le New England Journal of Medicine, des chercheurs de l’université de médecine de Caroline du Sud, en collaboration avec la Nasa, ont utilisé l'imagerie par résonance médicale pour étudier l'anatomie du cerveau après un vol spatial. Ils ont étudié les scanners d'une trentaine d'astronautes, une partie ayant passé peu de temps dans l'espace – quelques semaines - à bord de la navette spatiale, une autre étant restée plus longtemps à son bord – quelques mois. Les résultats ont montré le rétrécissement du sillon central qui augmente en fonction du temps passé dans la Station.
Le cerveau se déplace
Ils ont également remarqué que le cerveau a tendance à se déplacer vers le haut et peut se coller à la paroi interne de la boîte crânienne. “L’une de nos théories, c’est que comme il n’y a plus de gravité pour attirer le cerveau en bas, celui-ci se déplace vers le haut du crâne”, a indiqué la neuroradiologue Donna R. Roberts, autrice principale de l’étude. Or, entre le cerveau et la paroi interne de la boîte crânienne se trouve le liquide céphalo-rachidien, dont la mission est d’absorber les chocs reçus à la tête. Soumis à l’apesanteur, ce liquide perd sa fonction et le cerveau de l’astronaute peut alors se fixer sur la paroi intérieure du crâne. Cela pourrait expliquer pourquoi de nombreux astronautes se plaignent de migraines et de troubles de la vision, la partie supérieure du cerveau étant liée à la fonction oculaire.