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Phtalates

Grossesse : l'exposition de la mère à la pollution plastique nuit au développement cérébral du bébé

Par Jean-Guillaume Bayard

Les phtalates, une classe de produits connue pour interférer avec la fonction hormonale et le développement, entraînent un risque de baisse cognitive à la naissance d’un enfant si la future mère y est trop exposée.

encrier/iStock
Les enfants dont les mères ont eu de fortes expositions aux phtalates ont un traitement d'information ralenti par rapport aux autres.
Les petits garçons ont eu plus tendance à traiter lentement les informations si leur mère avait été exposée à des concentrations élevées de phtalates.

Plastiques et développement cérébral ne font pas bon ménage. Les phtalates, des substances chimiques utilisées lors de la fabrication d’objets plastiques pour les rendre plus souples, ont été associés à une vitesse de traitement cérébral réduite chez les nourrissons lorsque la mère y a été exposée à des niveaux élevés. Ce constat a été révélé par des chercheurs américains de l’université de l’Illinois Urbana-Champaign. Ils ont présenté ces résultats dans une étude parue le 13 février dans l’International Journal of Environmental Research and Public Health.

Une substance chimique perturbatrice du système hormonal

Cette recherche s’inscrit dans le cadre de l’Illinois Kids Development Study (IKIDS), qui suit les effets des substances chimiques perturbatrices du système hormonal sur le développement physique et comportemental des enfants, de la naissance à l’enfance. L’étude IKIDS, qui en est à sa septième année, a recruté des centaines de participants et suit l’exposition aux produits chimiques des femmes enceintes et le développement de leurs enfants.

IKIDS fait partie d’une initiative plus vaste financée par les National Institutes of Health, le programme Environmental Influences on Child Health Outcomes. Il permet de suivre l’impact des expositions chimiques prénatales et du stress psychosocial de la mère sur la croissance et le développement des enfants au fil du temps, a déclaré l’auteure principale de l’étude Susan Schantz, neurotoxicologue et professeure de biosciences comparatives à l’université de l’Illinois Urbana-Champaign. Nous mesurons de nombreux résultats de naissance, notamment le poids de naissance et l’âge gestationnel. Nous évaluons également la cognition des nourrissons en étudiant leur comportement d’observation. Cela nous permet d’obtenir des mesures de la mémoire de travail, de l’attention et de la vitesse de traitement de l’information.”

Les garçons les plus touchés

Les chercheurs ont mesuré l’exposition aux phtalates des femmes enceintes participants à l’étude à travers l’analyse des métabolites de trois phtalates courants dans des échantillons d’urine prélevés régulièrement. Ces données ont été utilisées en combinaison avec les évaluations de 244 nourrissons, âgés de 7,5 mois. Pour cela, ils sont montré deux évènements en vidéo à l’enfant, l’un familier et l’autre non familier. Les nourrissons regardent généralement plus longtemps les vidéos ou les événements non familiers, ce qui permet de définir une certaine vitesse de traitement cérébral. Les chercheurs ont ensuite utilisé un traceur oculaire à infrarouge pour suivre le regard de chaque enfant pendant plusieurs essais en laboratoire. Dans cette expérience, les chercheurs ont familiarisé les enfants avec deux images identiques d’un visage et, une fois que le nourrisson a appris à le reconnaître, lui ont montré ce même visage associé à un visage inconnu. “En analysant le temps passé à regarder les visages, nous avons pu déterminer à la fois la vitesse à laquelle les nourrissons traitaient les nouvelles informations et évaluer leur capacité d’attention”, a observé Susan Schantz.

Les résultats ont montré une différence dans la vitesse de traitement cérébral entre les enfants et permis d’établir un lien entre l’exposition des femmes enceintes à la plupart des phtalates testés et le ralentissement du traitement de l’information chez leurs nourrissons. Dans le détail, les résultats ont été différents en fonction du produit chimique auquel a été exposé la mère, du sexe du bébé et de la série de visages considérés comme familiers par ce dernier. Les petits garçons ont eu plus tendance à traiter lentement les informations si leur mère avait été exposée à des concentrations élevées de phtalates. “La plupart des études précédentes sur la relation entre l’exposition prénatale aux phtalates et la cognition se sont concentrées sur la petite et la moyenne enfance, a conclu la chercheuse. Ce nouveau travail suggère que certaines de ces associations peuvent être détectées beaucoup plus tôt dans la vie d’un enfant.”